PRomotion des Initiatives Sociales en Milieux Educatifs

In IFE – Centre Alain SAVARY :

Accéder au site source de notre article.


Parmi les enjeux de la « Refondation de l’école », figure naturellement la réussite scolaire et donc celle des élèves dont la confrontation à l’école est la plus problématique : élèves des milieux populaires ou encore jeunes aux parcours chaotiques. Dans des contextes souvent difficiles et depuis plusieurs années de nombreux dispositifs et situations d’apprentissage dans la classe, ou hors de la classe, sont expérimentés afin de soutenir et favoriser leur réussite scolaire. Soutenir ? Accompagner ? Etayer ? De quoi parle-t-on ? Qu’est-ce qui soutient les élèves dans leurs apprentissages ? De quels apprentissages s’agit-il ? Qu’est ce qui fait que les élèves ne progressent pas malgré les efforts déployés par les praticiens au quotidien ? Et donc qu’est-ce qui fait réussir les élèves ? Comment les trajectoires culturelles et familiales influent-elles sur cette réussite ?

 

 

Sommaire
  1. Soutenir l’activité des élèves de quoi parle-t-on ?
    1. Soutenir, accompagner, étayer : quelles postures et quels dispositifs ?
    2. Soutenir les élèves dans leur apprentissages : Quels apprentissages ? Quels soutiens ?
    3. Soutenir les élèves, comment ?
    4. Soutenir et accompagner les équipes aussi
  2. Socialisation familiale, trajectoires personnelles et réussite scolaire
    1. Quelles interactions entre le profil des élèves, leur réussite et l’accompagnement proposé ?
    2. Comment les spécificités culturelles, familiales et sociales rencontrent-elles les dispositifs de soutien et influent-elles sur la réussite des élèves ?
    3. L’enfant, entre institutions, familles et dispositifs : l’apport du PRE
  3. En guise de conclusion : florilège de quelques idées fortes rédigées par les participants et reprises par Patrice Bride, rédacteur en chef des Cahiers pédagogiques. 

Cette formation est introduite par Patrick Picard responsable du Centre Alain Savary et Emmanuel Dupont, directeur des interventions et des études à l’Acsé.

La réflexion proposée lors de cette formation articule paradigmes de recherche et témoignage d’expériences concrètes sans crainte des controverses entre les savoirs de recherche et les savoirs de métier. Il s’agit de mieux comprendre comment fonctionne le soutien à la réussite des élèves et de dépasser le « rien ne marche » en accordant de l’importance à ce que les acteurs disent qu’ils font. Qu’est ce qui marche ? Qu’est ce qui marche moins bien ? Cette posture de recherche, modeste, est particulièrement intéressante au moment où les décideurs sont submergés d’études quantitatives.

Voir l’introduction de Patrick Picard et Emmanuel Dupont (15 min):

Soutenir l’activité des élèves de quoi parle-t-on ?

Soutenir, accompagner, étayer : quelles postures et quels dispositifs ?

Laurent Lescouarch, maitre de conférence en sciences de l’éducation à l’université de Rouen, indique que pour penser les innombrables dispositifs d’aide aux élèves en difficulté il est important d’analyser les postures professionnelles qui émaillent ces dispositifs et renvoient à des logiques pédagogiques différentes.

– Le soutien est centré sur le rattrapage et la reprise scolaire. Il s’agit bien souvent d’externaliser la difficulté autour d’un contenu simplifié qui demeure pourtant une reproduction à l’identique de ce qui a engendré l’échec.

– L’aide repose sur une dissymétrie relationnelle forte avec des pratiques plus ouvertes sur le sujet et moins sur les questions scolaires.

– L’accompagnement est aujourd’hui le concept le plus mobilisé (pas forcément à bon escient). Il s’inscrit dans la sémantique du verbe accompagner dans le sens de cheminer avec. C’est une posture qui rompt avec la logique des formes scolaires traditionnelles.

– L’étayage ouvre la réflexion sur ce qui pourrait être fait à partir de la situation de l’élève/enfant, dans une visée d’ajustement progressif en dépassant la stricte reprise scolaire. Dans une perspective d’autonomisation, il est nécessaire de penser également le déstayage progressif.

Voir un extrait l’intervention de Laurent Lescouarch (35 min):

 

Lire le diaporama de Laurent Lescouarch

Soutenir les élèves dans leur apprentissages : Quels apprentissages ? Quels soutiens ?

Patrick Rayou, professeur de sciences de l’éducation à Paris 8, s’interroge : pourquoi faut-il soutenir les apprentissages ?

On n’apprend pas à l’école comme on apprend ailleurs et les élèves, bien souvent, ne comprennent pas ce que les enseignants demandent. Ils sont plus ou moins connivents de la forme scolaire et cette connivence varie en fonction de l’origine sociale des enfants.

Ce n’est pas parce qu’on expose les élèves aux savoirs, qu’ils apprennent, tant les implicites sont nombreux. L’externalisation du travail scolaire accroit les inégalités et les malentendus entre des élèves en situation de décrochage scolaire et l’école.

Pour soutenir les élèves on peut mobiliser des registres d’apprentissage qui diffèrent en fonction des contrats didactiques et des trajectoires scolaires :

-le registre cognitif qui relève des fonctions intellectuelles des jeunes

-le registre culturel fait des savoirs sur le monde nécessaires à la réussite scolaire

-le registre symbolique qui construit un type d’identité personnelle en relation à une communauté pour laquelle il vaut.

La forme scolaire républicaine est centrée sur "le cognitif". Les pratiques culturelles restent aux portes de l’école et les jeunes sont supposés être des élèves. Ce constat peut-être bousculé en prenant en compte les registres précités, en les organisant afin que les élèves s’en saisissent par des formes de soutien appropriées pour réussir.

 Voir l’intervention de Patrick Rayou (56 min) :

Soutenir les élèves, comment ?

Voici quelques exemples issus des ateliers de présentation et d’échange d’expériences

–  L’internat de réussite pour tous de Noyon:

 La tête ailleurs. Comment aider les élèves en situation de fragilité ?

– Le collège Jean Zay de Lens :

La pédagogie 3D

Les cartes mentales pour développer l’estime de soi

– Le collège Lamartine de Villeurbanne :

Soutenir la mobilisation des élèves par des pratiques de co-intervention

– Le collège Colette de St Priest :

Le soutien une activité ordinaire dans le quotidien de la classe.

Analyse des gestes professionnels (22 min) :

Exploration de ce qui pourrait constituer des invariants de la réussite des élèves :

Synthèse des ateliers

Soutenir et accompagner les équipes aussi

Dans des contextes différents trois chefs d’établissement (Fabienne Morand-Morel, principale du collège Colette à Saint-Priest ; Dominique Didier-Viforel, principale du collège Lamartine à Villeurbanne ; Jacques Ory, proviseur du lycée d’excellence à Douai) rappellent que le soutien à la réussite des élèves nécessite de soutenir aussi les enseignants  dans la mise en œuvre de leurs projets et le développement de leurs compétences professionnelles.

S’il existe plusieurs manière d’opérer, c’est dans la tension et les écarts entre ce que l’on veut faire et ce que l’on arrive vraiment à réaliser que se situe l’activité réelle. Abdelkader Larbi, directeur général adjoint à la mairie de Vaulx-en-Velin, repère les points de divergence et de convergence avec sa propre activité.

Lire le compte rendu de la table ronde

Socialisation familiale, trajectoires personnelles et réussite scolaire

Quelles interactions entre le profil des élèves, leur réussite et l’accompagnement proposé ?

Caroline Daverne, maître de conférence en sociologie de l’éducation, à l’université de Rouen, distingue trois profils d’élèves :

-Des élèves porteurs d’un projet qui parviennent à donner du sens à l’école et aux dispositifs de soutien proposés

-Des jeunes à problèmes qui conservent un rapport négatif à l’école

-Des jeunes qui manquent de cadre et dont l’appétence scolaire reste à construire.

Pour Arielle Compagnon, maitre de conférence en sociologie de l’éducation à l’université de Grenoble, les acteurs de l’éducation s’accordent à déclarer que la réussite des élèves doit être le cœur du fonctionnement de l’école. Cependant celle-ci n’est pas mise en pratique avec la même réalité selon que deux temps de la construction des dispositifs éducatifs ont été travaillés ou non par l’équipe enseignante : l’approche de la réussite  et le sens de l’accompagnement. Ce sont deux axes forts qui expliquent au CLEPT (Collège Lycée Élitaire Pour Tous à Grenoble) la réussite des élèves.

Dominique Glasman, professeur à l’université de Savoie, revient sur les internats d’excellence et constate que les résultats des élèves ne sont pas forcément ceux que l’on attendait, au regard des moyens déployés par les professionnels. Comment le comprendre ? Au delà de l’histoire singulière et sociale des élèves on peut se demander si les étayages offerts sont toujours placés là où ils devraient l’être au regard de leurs besoins. On est pris par les contraintes du résultat immédiat alors que le soutien devrait être pensé dans la durée.

Certes la réussite ou l’échec est bien une aventure individuelle qui se déroule dans un contexte social donné mais l’attention aux personnes et l’individualisation comme pédagogie de soutien ne doivent-elles pas être pensées dans des collectifs organisés ? Ce sont des espaces de requalification symbolique qui peuvent avoir des effets sur les registres de l’apprentissage au niveau culturel et cognitif également.

Voir l’intervention de Dominique Glasman (37 min) :

Lire l’exposé de Dominique Glasman

Comment les spécificités culturelles, familiales et sociales rencontrent-elles les dispositifs de soutien et influent-elles sur la réussite des élèves ?

Pour Françoise Lorcerie, directrice de recherche au CNRS à Aix en Provence, la notion de « capital » est important pour favoriser la réussite des élèves. Le capital économique, le niveau d’éducation et le réseau social d’une part, le capital biographique, la façon dont les épreuves ont été gérées dans l’espace familial, d’autre part, et la notion de communauté peuvent être pris en compte. Ils constituent alors des ressources pour la réussite de l’enfant

On distingue trois grands modèles de famille : le modèle contractualiste plutôt permissif, le modèle statutaire et autoritaire qui est majoritaire dans les familles populaires, enfin le modèle maternaliste, incarné par la mère, à la fois statutaire et bienveillant, mobilisé sur le souci de faire barrage au quartier.

Voir l’intervention de Françoise Lorcerie (1H):

L’enfant, entre institutions, familles et dispositifs : l’apport du PRE

Table ronde avec Hossein Iken, coordonnateur Éducation prioritaire, Sandrine Lelarge, assistante sociale, Saint-Priest (Rhône), Sophie Ebermeyer, chargée de mission Réussite éducative et Éloïse Clot, coordonnatrice DRE, Grenoble Métropole.

On constate que le PRE a fait bouger, non sans tensions, les lignes d’intervention et les postures professionnelles des acteurs de l’éducation sur des territoires donnés.

Un dispositif de plus, certes, mais des ouvertures aussi pour aborder ensemble les questions vives qui se posent dans l’accompagnement des familles en situation de fragilité.

En guise de conclusion : florilège de quelques idées fortes rédigées par les participants et reprises par Patrice Bride, rédacteur en chef des Cahiers pédagogiques

« Aider l’élève à réussir scolairement, c’est lui permettre de comprendre ce qu’on attend de lui »

« étayer c’est bien, penser à désétayer c’est mieux »

« Le temps de l’apprentissage n’est pas le temps de l’enseignement alors apprenons à cheminer ensemble »

« Réinterroger les notions d’accompagnement, d’aide et de soutien »

« Prendre davantage en compte la parole de l’élève pour mieux co-construire l’accompagnement »

« Les formes de soutien différent selon les registres d’apprentissage cognitif, culturel, identitaire et symbolique »

« Faire le deuil des bonnes solutions »

« être pédagogue c’est être en tension »

« C’est le déplacement du regard sur la nature de la difficulté qui crée du pouvoir d’agir »

« En éducation, la controverse sur ses croyances est impérative pour dépasser les doxas »

« L’opiniâtreté de l’école à ne pas mettre en œuvre des changements profonds »

« Donner du sens aux apprentissages en développant l’estime de soi par des outils comme les cartes mentales»

« Définir la réussite de l’élève comme un développement humain favorisant l’émancipation de l’individu… même si ce n’est pas la commande première de l’école »

« Faire avec l’élève et à côté, non pas devant lui »

« Connaître les missions de chacun pour mieux travailler ensemble »

« Les familles d’immigration ont la faculté de trouver leurs propres ressources et leurs propres cadres de soutien »

« L’accompagnement social est un soutien »

« Les élèves  présentent des profils différents pour apprendre à l’école »

« Ne pas être conforme, mais loyale et cohérente avec ses valeurs »

« Accompagner c’est cheminer ensemble »

Print Friendly

Répondre