PRomotion des Initiatives Sociales en Milieux Educatifs

I- Introduction :

Les PEP en tant qu’acteur de l’éducation populaire complémentaire de l’éducation nationale interviennent aussi bien dans les temps scolaires qu’extra-scolaires et péri-scolaires. Des SAPAD (Service d’aide pédagogique à domicile) et classes de découvertes aux ALAE (Accueils de Loisirs à l’école) et dispositifs de réussite éducative en passant par les colonies de vacances.
C’est l’intervention sur tous les temps de l’enfant et du jeune qui amène les PEP à être attentifs à cette question de la cohérence éducative et de la mobilisation des acteurs.
Les PEP participent d’ailleurs au chantier projet « En associant les parents tous les enfants peuvent réussir » avec une quinzaine de sites innovants en matière de prise en compte des parents dans les structures éducatives. Projet mené en partenariat avec Prisme, la FCPE, l’IRDSU, ATD Quart Monde…
Il n’en reste pas moins que la notion d’éducation partagée n’est pas récente, on la trouvait déjà dans la loi de 1989 (dites Loi Jospin) avec la mise en avant de la place des enfants et des jeunes comme acteurs de leur orientation mais surtout la notion de « communauté éducative » déjà affirmée par la loi Haby qui citait les membres de cette « communauté éducative » : les élèves, les enseignants, les personnels non enseignants et les parents d’élèves.
Durant les années 90, les acteurs ont tentés de réaliser ce « partage éducatif » avec par exemple la signature des CEL en 1998 impulsée par l’Etat.
L’objectif était de rassembler tous les acteurs de l’éducation autour d’un projet éducatif global cohérent faisant suite à un diagnostic précis établissant une liste des besoins repérés sur le territoire, des actions et ressources déjà disponibles ou à créer.
Le plus intéressant fut de penser ce dispositif comme une synthèse des dispositifs existants et non comme un dispositif supplémentaire. Ce fut un réel levier pour innover et répondre aux besoins identifiés et non pourvus en fédérant les contrats locaux d’accompagnement à la scolarité, les contrats temps libre …

De la même manière, en France, l’éducation prioritaire a permis la mise en place dès 1981 d’une réflexion sur la territorialisation de l’éducation avec par exemple les ZEP ayant pour objet de "renforcer l’action éducative dans les zones où les conditions sociales sont telles qu’elles constituent un facteur de risque, voire un obstacle, pour la réussite scolaire des enfants et adolescents qui y vivent et donc, à terme, pour leur intégration sociale".
On voit bien à travers ces exemples que la réflexion et les projets tentant de mettre en cohérence l’ensemble des acteurs éducatifs sont nombreux depuis des dizaines d’années au service de l’épanouissement et de la réussite des enfants.
A ces projets nationaux s’ajoutent des initiatives locales comme :

– Le Schéma Départemental pour des Politiques Educatives Concertées en Ariège. Au travers de ce schéma départemental, les institutions et fédérations d’éducation populaire proposent non seulement aux collectivités d’évaluer leur projet éducatif territorial, mais également de les accompagner et de les soutenir.
– Les démarches poussées et précurseurs de la création des PEL de Brest et de Rennes en impliquant davantage les usagers dans les politiques éducatives locales furent aussi une preuve que oui, l’éducation partagée c’est possible.

II – Une éducation partagée par qui ?

L’éducation partagée pose tout d’abord la question du avec qui partager l’éducation et pourquoi ?

Les PEP défendent une visée émancipatrice de l’action au service de valeurs : solidarité, laïcité, égalité ; entendu comme des valeurs à décliner dans et par l’action :

Le respect des familles et de leur rôle éducatif
Le fait de favoriser leur prise de parole et l’exercice de leurs pouvoirs

Oui mais avec qui ?

L’État : l’État est le premier éducateur, au nom de la société il peut retirer pour le bien de l’Enfant les droits parentaux. C’est aussi lui qui est garant de l’égalité éducative entre les territoires (répartition des moyens aux communes par exemple).
Les éducateurs : parce qu’ils sont en charge de transmettre des valeurs et des savoirs en usant de pédagogies différenciées faisant émerger le citoyen de demain.
Les parents : la trajectoire de l’enfant ne peut être définie par des professionnels et des institutions n’oeuvrant que sur un temps limité de la vie. Il ne s’agit pas seulement de faire une place aux familles dans l’Ecole, mais bien qu’elles puissent toutes conquérir un pouvoir d’agir pour favoriser la réussite des enfants et des jeunes. Les parents sont tous capables de s’associer aux professionnels pour l’éducation de leurs enfants.
Les associations, la collectivité : acteurs majeurs des temps scolaires, extrascolaires et périscolaires elles sont au même titre que l’école un espace éducatif primordial pouvant permettre l’accrochage scolaire (en référence à la stratégie du détournement).
Les enfants : j’aurais pu et dû commencer par les enfants puisque qu’au centre c’est bien le projet de l’enfant qui se construit avec lui mais surtout par lui. L’objet est la production du sens commun pour et avec l’enfant et le jeune pour qu’il soit auteur de son projet grâce à des acteurs jouant une seule et même partition.

Il me semble indispensable pour les professionnels d’accepter la non pérennité de l’action éducative qu’ils mènent, elle sera transformée par les familles et par l’enfant. Cette transformation est appropriation…
La clé est peut-être celle du dialogue et des espaces à mettre en place (sans pour autant institutionnaliser le dialogue). Le dialogue ne peut se construire, être productif sans cette conscience qu’il n’est pas une fin en soi, une démonstration de forces et de convictions mais bien un outil pour cheminer et permettre le cheminement de l’enfant.
Pour les PEP c’est l’accompagnement des enfants et des jeunes au plus près des besoins et des territoires dans le cadre de projets formalisés qui va permettre d’atteindre cette émancipation éducative.

Une éducation partagée pour permettre la réussite des enfants…oui mais une éducation inclusive.

Une première approche pour cerner ce qu’on entend par « éducation inclusive ».
C’est une éducation « qui éduque, sans distinction et sans condition(s), tous les enfants présents sur le territoire national mais aussi une éducation qui prend en compte – et s’y adapte – les diversités et particularités des enfants/jeunes, y compris quand ces diversités et particularités nécessitent des accompagnements spécifiques ».
La finalité est de permettre à tous d’accéder à une culture commune dans une égalité de droits et de dignité.
Cela amène forcément à un changement de paradigme et à un bouleversement des pratiques comme par exemple arrêter de fonctionner à la sélection (scolaire, sportive…).
L’éducation ne peut être inclusive que si elle est elle-même incluse dans un maillage territorial qui tend à l’extraterritorialité en permettant aux enfants et jeunes d’accéder à la mobilité. Elle n’enferme pas mais ouvre les esprits et les frontières des possibles.

III – Education partagée dans le cadre des aménagements des rythmes scolaires

Les PEDT, un nouveau cadre réglementaire pour une éducation partagée

Les PEP se sont fortement mobilisés pour qu’apparaisse dans la réforme :
– La notion d’école inclusive (article 1)
– L’obligation des PEDT, non obligatoire dans la loi mais rendue de fait incontournable (obtention des dérogations sur l’encadrement et du fond d’amorçage).

Les PEP se sont ensuite investis pour mettre en place, tout en ayant un regard et des apports critiques, la réforme avec la création d’un guide de construction des PEDT.

Pourquoi se mobiliser pour la création des PEDT ?

Tout d’abord comme évoqué un peu plus tôt, pour éviter l’accroissement des inégalités entre les territoires.
Chaque territoire (commune, intercommunalité) doit pouvoir à un moment donné faire un état des lieux de l’ensemble des dispositifs existants, recueillir l’avis des professionnels (assistantes sociales, éducateurs spécialisés, enseignants, animateurs…) et les besoins des usagers pour aller vers la définition d’un projet qui partage des valeurs et des objectifs évaluables.
Le premier intérêt du PEDT est de se « poser » autour d’une table pour faire le bilan et améliorer les réponses apportées, voire à les simplifier (ou en créer de nouvelles sans chercher à superposer).
Deuxième intérêt, le PEDT devrait enfin permettre de simplifier les dispositifs existants, qui souvent s’empilent, tels que les CEL, PEL, PRE etc.
Des questions restent néanmoins en suspens comme celle du statut des enseignants et de leurs missions surtout celles du directeur d’école pour aller vers une école ouverte vers les autres.
Entendre aujourd’hui que l’école doit être sanctuarisé est un contre sens au vue de l’évolution en cours qui doit permettre à l’école de s’inscrire dans le territoire comme un espace éducatif ouvert, lieu de transmissions de valeurs et de savoirs mais aussi d’échanges, de rencontres, de débats…
Il n’en reste pas moins que la manière dont ont été pensés le PEDT et son cadre réglementaire les rendent peu ouverts sur d’autres espaces que le périscolaire. Je pense notamment à la petite enfance, aux établissements sociaux et médico sociaux. Est-ce une raison pour laisser passer cette occasion ? Je ne le pense pas, essayons, mettons en place cette dynamique et allons de l’avant pour améliorer ce qui nous est proposé aujourd’hui pour la réussite des enfants.

Temps scolaire, temps périscolaire : quelle complémentarité ? La réussite des enfants, au coeur de l’aménagement des rythmes ?

Le temps scolaire et le temps périscolaire doivent permettre de trouver un équilibre, je n’irai pas sur les questions de chrono biologie mais je vous invite à lire Hubert MONTAGNER et la complémentarité qu’il développe entre le temps scolaire, le temps familiale et le tiers temps avec la notion d’enfant « secure » et « d’enfants insecure ».
Le temps périscolaire est un temps éducatif qui doit permettre de mettre en application le savoir transmis dans le temps scolaire avec des pédagogies différentes (collaborative, du jeu…). Cela doit permettre d’accrocher les enfants ayant décroché pendant le temps scolaire et d’éveiller leur curiosité. Cette complémentarité au service d’ambition éducative se
complète avec la volonté dans les temps périscolaires de créer une dynamique de socialisation et d’autonomisation des enfants.
Les activités périscolaires sont un atout pour favoriser la réussite de tous les enfants, en mettant en place un accompagnement adapté aux besoins y compris dans les temps périscolaires (et extrascolaires par extension).

Où en est-on de la mise en place des nouveaux rythmes scolaires ? (MEN 25 octobre 2013) : 1094 PEDT et 27 académies

Les principaux éléments que l’on peut tirer de cette enquête sont encourageants.
Les travaux ont été menés par les municipalités avec l’appui des groupes d’appui départe-mentaux, associant l’éducation nationale, la direction départementale de la cohésion sociale (DDCS) et tous les partenaires (Caisse d’allocations familiales (CAF).
Ainsi, à Dijon par exemple, une réflexion spécifique a été menée en fonction des probléma-tiques des quartiers en difficulté. À Brest se montent des groupes de projet par quartier.
Cela a pu les amener à annoncer leur intention de faire évoluer les compétences de l’intercommunalité.

Les activités

Les activités physiques et sportives représentent 31% du total, et les activités artistiques et culturelles 30%. Cependant, les municipalités ont profondément diversifié les acti-vités proposées.
Le point noir de cette réforme se situe en maternelle, dans quelques PEDT se sont développés des thématiques différentes et adaptées centrées sur la motricité, l’expression artistique ou la découverte du livre. Enfin, les académies soulignent la volonté de prise en compte de la difficulté scolaire, et des réflexions menées pour garantir une continuité de l’aide apportée aux élèves en situation de handicap (présence d’un AVS) comme cela avait été demandé par les PEP.

Les intervenants

Les intervenants sont pour :

59%, des personnels employés par les mairies, des animateurs en premier lieu

26%, les membres d’associations

(plus bénévoles, enseignants…)

III – Ouverture culturelle et éducation à la citoyenneté, axes pouvant fédérer le partenariat.

Le parcours d’éducation artistique et culturelle (extrait du site du Ministère de l’EN)

« Le parcours d’éducation artistique et culturelle est mis en oeuvre progressivement à partir de la rentrée 2013, en s’appuyant sur les enseignements artistiques proposés dans les écoles et les établissements. Il doit être pensé de manière à assurer une complémentarité entre les temps scolaires, périscolaires et extrascolaires, notamment à travers les PEDT. Ce parcours doit permettre à chaque élève d’aborder, dans leur diversité, les grands domaines des arts et de la culture ».
Je ne développerai pas ici la théorie de Bourdieu (néanmoins à nuancer) sur les inégalités liées au capital notamment culturel.
La citoyenneté culturelle remonte au milieu du siècle dernier avec le sociologue Raymond William qui fut le premier à parler du droit d’accès à la culture de chaque citoyen. « Pour lui, c’est le citoyen qui s’approprie les outils culturels, et les institutions sont là pour favoriser cet épanouissement et cette expression culturelle ».
Plusieurs questions se posent néanmoins. Qui peut intervenir dans le cadre de ces parcours :
Les associations non lucratives ? Les opérateurs lucratifs ? Avec quelles valeurs ?
Comment faire dans une commune rurale à classe unique qui n’a pas d’associations à proximité à part le club de Scrabble ?

Conclusion

Pour terminer, je dirai que, malgré une satisfaction certaine pour les communes ayant mis en place la réforme à la rentrée de septembre, 83 % de satisfaction d’après l’étude menée par l’AMF (même si les villes l’ayant mis en place en 2013 étaient majoritairement des villes de « gauche »), de nombreuses questions se posent :
Les locaux ? Les transports ? La restauration ? Les activités ?
Pour autant, l’enjeu et les changements induits pour aller vers une éducation et une société plus inclusive sont immenses laissons le temps au débat loin des idées reçues et des prises de positions politiciennes bien éloignées de l’intérêt des enfants et des jeunes.

Divers

Evaluation des CEL : les objectifs communs sont éducatifs, ils permettent de créer des perspectives mais aussi des espaces de régulation entre les acteurs. L’évaluation de 2005 a montré que les CEL participent, je cite : « au dynamisme des territoires et des collèges, ainsi qu’à l’épanouissement personnel des jeunes, leur implication dans la vie sociale et leur réussite scolaire. Mais les coordonnateurs regrettent la complexité des dispositifs et la lourdeur des contraintes administratives. Ils souhaitent massivement une implication plus forte des partenaires concernés (élus, enseignants, parents, etc.) et un effort d’information et de formation envers ces derniers ».

La territorialisation de l’éducation…vers un accroissement des inégalités territoriales ? Une question légitime et qui divise tant elle est importante (malgré un processus déjà bien engagé avec les Agences Régionales de Santé par exemple), l’éducation étant à la base de l’organisation de la cité. Entre une vision centrale (et les craintes de particularisme, de clientélisme, d’utilitarisme qui vont avec) et les besoins de mieux prendre en compte les différences et les adaptations nécessaires. Il est urgent de reposer cette question qui amène plus largement à reposer les modes de contractualisations entre les collectivités, l’état, les associations et la place des citoyens comme acteurs et créateurs de démocratie.

La mobilité : tout en étant vigilant à ne pas enfermer les enfants dans le territoire, se sentir bien dans un territoire et le rendre apprenant est essentiel. L’enjeu est de donner la possibilité aux enfants et aux jeunes d’agir dans et sur le territoire mais aussi d’en sortir. Les associations autant que les pouvoirs publics doivent être garants de ce droit pour que l’espace local ne devienne pas un espace d’enfermement à ciel ouvert, facteur d’inégalités …

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