PRomotion des Initiatives Sociales en Milieux Educatifs

Il est rare que la rentrée scolaire ne soit pas l’occasion pour le ministre de l’éducation nationale de se souvenir qu’outre les élèves et les professeurs existent les parents… S’ensuivent des déclarations souvent généreuses, rarement efficaces et un grand nombre de pages incantatoires publiées auBulletin officieldu ministère que peu de gens lisent d’ailleurs…

Najat Vallaud-Belkacem ne déroge pas à la tradition en « affirmant qu’il faut améliorer les relations des parents avec l’école ». Je partage évidemment ce point de vue, mais je crains qu’une nouvelle fois on ne confonde « école » et « enseignant » au singulier.

Que souhaitent les parents?? Ils veulent comprendre un système compréhensible essentiellement pour les initiés culturels. Pour avoir créé la fonction de médiateur de l’éducation nationale en 1998, je peux affirmer que nombre de parents sont désarçonnés par un système complexe mais surtout souvent inutilement compliqué. Mais ils sont surtout choqués moins par l’absence de dialogue avec l’établissement représenté par un chef d’établissement dépendant pieds et poings liés de ses enseignants que par la difficulté d’avoir un dialogue équilibré et confiant avec un professeur déterminé de leur enfant.

Le système fonctionne essentiellement sur un mode représentatif protecteur pour les professionnels que sont les enseignants et même les fédérations de parents assez peu représentatives. Des progrès ont sans doute été faits dans le domaine institutionnel même si la participation à un conseil de classe permet de douter de la place effective des parents dans ces instances… En fait nous sommes dans un système où on tâtonne et où on ne se résout pas à affronter les risques de conflits.

L’expérimentation tendant à donner le dernier mot aux parents en matière d’orientation suscite assez normalement (lire la tribune de Claude Obadia, La Croix du 10 septembre) la réticence des enseignants, mais si ces derniers peuvent avoir quelques lueurs sur le potentiel d’un élève, sauf les cas extrêmes, peut-on dire qu’ils ont une quelconque approche prédictive?? Que savent-ils de la vie active, eux qui sont « à l’école depuis leur première enfance »??

Ce n’est pas leur faire injure que de dire que l’orientation n’a rien de scientifique, qu’ils sont bien mal armés en la matière. Il en est de même pour les conseillers d’orientation-psychologue dont la connaissance du milieu du travail est très variable et qui ont « psychologisé » leur métier, ce qui les a démonétisés aux yeux de nombreux parents.

Pour ma part, je n’ai pas de solution miracle, mais je pense qu’il faut traiter plusieurs problèmes simultanément. Tout d’abord les parents doivent prendre conscience que le comportement de leurs enfants en classe n’est pas nécessairement le même qu’à la maison et donc faire confiance a priori au « maître » comme nous disions jadis.

Les enseignants de leur côté, confrontés à des élèves plus exigeants et parfois plus turbulents qu’eux-mêmes quand ils étaient bons élèves, doivent diversifier encore plus leurs méthodes pédagogiques et surtout bénéficier d’une formation notamment continue qui fait largement défaut. À cet égard ils doivent aussi accepter de rompre avec ce principe protecteur et parfois destructeur d’une liberté pédagogique proche des affirmations de Ferdinand Buisson… Enfin, ils doivent avoir conscience qu’ils sont des représentants de l’État éducateur et à ce titre doivent rendre des comptes à la nation, mais aussi aux parents selon des modalités qui respectent l’identité de chacun.

Je reconnais volontiers que ce n’est pas en se limitant à afficher de tels principes qu’on progressera surtout avec le monde enseignant rétif à toute injonction, mais en montrant par la pratique qu’un dialogue de qualité est possible, sans empiéter sur les responsabilités de chacun.

Pour aller dans cette direction et pour rompre avec les formules habituelles, je propose à nouveau la charte du dialogue Parent/Enseignant (au singulier), document élaboré par mes soins en 2005 après une longue concertation avec des parents et des enseignants, tous « ordinaires », et un test dans plusieurs établissements. Il s’agit tout simplement de préciser les champs d’intervention/question de chaque partie sans que celle-ci se sente attaquée dans son identité. Jusqu’où aller en demandant des précisions sur le programme réalisé, la méthode utilisée par exemple, sans que le professeur considère qu’on veut lui apprendre son métier. Jusqu’où aller en interrogeant le parent sur le mode vie de l’élève, sa vie familiale sans que le parent considère qu’il s’agit d’une intrusion dans sa vie privée.

Cette approche à l’époque où j’étais le premier médiateur de l’éducation nationale avait reçu un accueil poli et avait été diffusée, hélas, par voie administrative alors qu’il aurait fallu la faire vivre et se l’approprier par les enseignants et les parents de chaque établissement sous l’impulsion du chef d’établissement. Comme souvent elle est restée « un astre mort » et je pense qu’il ne faut pas désespérer… Le dialogue est possible à condition aussi que les interlocuteurs se retrouvent en un lieu correct, de préférence à la salle des professeurs ou… au couloir. Elle est consultable sur le site du médiateur de l’éducation nationale et de l’enseignement supérieur.

Jacky Simon

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