PRomotion des Initiatives Sociales en Milieux Educatifs

In Ministère des Sports, de la Jeunesse, de l’Education populaire et de la Vie associative – le 28 juin 2013 :

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Lors du Congrès triennal de la Ligue de l’Enseignement à Nantes, le vendredi 28 juin, Valérie Fourneyron a défendu la modernité de l’éducation populaire et dévoilé ses engagements pour favoriser son essor.

Monsieur le Président, cher Jean-Michel DUCOMTE,

Monsieur le Secrétaire général, Cher Jean-Marc ROIRANT,

Monsieur le Secrétaire national, chargé de la question de congrès, Cher Nicolas Sadoul,

Monsieur le Président de la Ligue de l’Enseignement de Loire-Atlantique,

Madame la Présidente de la CPCA, Chère Nadia Bellaoui,

Madame la Présidente du CNAJEP, chère Irène Péquerul,

Monsieur le Conseiller du Premier ministre,

Mesdames et messieurs les élus,

Mesdames et messieurs les congressistes,

Chers amis,

L’éducation populaire est-elle soluble dans notre monde moderne ? Ou plutôt, est-elle compatible, avec les injonctions de la modernité ?

Question provocatrice, peut-être, mais question, néanmoins, qui m’a souvent été posée depuis que je me suis vu confier les responsabilités qui sont les miennes au gouvernement.

« Archaïque », « utopiste », « folklorique », « exotique », « dépassée » … que n’ai-je pas entendu depuis que j’ai pris la tête d’une maison où les mots « Education populaire » peuvent à nouveau, enfin, fièrement, s’écrire au fronton ?

Sans parler, bien sûr, du fameux : « non mais, CONCRETEMENT, c’est quoi l’éducation populaire ? »

« Concrètement » : voilà l’impératif suprême lâché. Etre concret.

Concrètement, ai-je envie de répondre, l’éducation populaire, c’est tout ce que le simplisme de notre époque médiatique n’aime pas.

Elle aime les définitions figées et réductrices. L’éducation populaire est mouvante, en perpétuelle évolution. Elle se réinvente sans cesse.

Elle aime que les cibles soient clairement définies et que les limites soient fixées, intangibles. L’éducation populaire s’adresse à tous et existe partout. Elle infuse notre société toute entière.

Notre époque aime les visions utilitaristes, où l’on vous explique doctement à quoi « sert » quelque chose. L’éducation populaire ne vise rien de moins qu’à l’émancipation individuelle, au progrès collectif, et à faire justement sortir l’homme de l’aliénation du « service » à une cause.

Elle aime aussi les calendriers, avec une finitude bien nette. L’éducation populaire est un mouvement qui ne cessera jamais. Car jamais nous ne pourrons nous retourner et dire « voilà, objectif atteint. La mobilisation et la participation citoyennes sont acquises. Chaque individu est désormais acteur de son projet de vie. La transformation sociale est achevée. »

Notre époque aime les choses simples. Et bien, raté, l’éducation populaire, c’est un corps vivant. Et comme tout corps vivant, l’éducation populaire est complexe.

Bref, à tous ceux qui me demandent « ce qu’est l’éducation populaire », je réponds qu’elle est comme l’art : la définir, c’est l’enfermer. Et l’enfermer, c’est nier son essence. C’est nier ce qui fait sa puissance. Et c’est nier ce qui fait son incontestable modernité.

J’ai envie de dire que l’éducation populaire a germé et grandi en même temps que se propageait cette idée folle que les hommes naissaient libres et égaux en droits…

Car, nous le savons, proclamer un droit, fut-il inaliénable, ne suffit pas pour atteindre cet idéal indépassable d’une société juste, solidaire, égalitaire, pleinement démocratique. Une société où chaque homme et chaque femme peut s’affranchir des déterminismes et des carcans, peut s’émanciper et peut s’épanouir. Peut être acteur de sa vie. Peut préparer un avenir meilleur pour tous.

C’est ce combat que mène inlassablement l’éducation populaire, aux côtés de l’école républicaine.

A vous tous, qui êtes des militants de la Ligue de l’Enseignement, je souhaite donc rendre hommage aujourd’hui. Vous êtes les héritiers d’un mouvement qui depuis 150 ans a éveillé les consciences, formé des citoyens, lutté contre toutes les formes d’oppression, combattu les poncifs et les préjugés, nourri les aspirations démocratiques.

Mon parcours, comme celui de nombreux responsables associatifs, politiques ou syndicaux, est un parcours façonné par l’éducation populaire et par les mouvements de jeunesse. C’est dans le guidisme que j’ai goûté pour la première fois à l’expérience de l’action collective.

Il y a des choses qu’on sait, intellectuellement, instinctivement. On sait qu’elles existent, qu’elles sont là. Et puis, un jour, on les expérimente, on se les approprie. Elles deviennent une réalité personnelle. Et là, on les comprend.

C’est cela que l’éducation populaire m’a apporté : c’est grâce à l’éducation populaire que j’ai compris le monde qui m’entourait, que j’y ai trouvé ma place, que j’ai eu envie d’agir pour le transformer et de militer pour l’améliorer. Que j’ai trouvé aussi les outils pour le faire.

Aujourd’hui, c’est donc avec une immense fierté mais aussi avec beaucoup d’humilité que j’ai envie de rendre à l’éducation populaire ce qu’elle m’a donné.

Je le fais en ayant pleinement conscience de l’importance des enjeux auxquels vous êtes confrontés et de la difficulté des questions que vous devez résoudre.

*****

Ces questions sont presque tout entières résumées dans le slogan dont vous vous êtes doté : « Un avenir PAR l’éducation populaire ».

« PAR » l’éducation populaire et pas « POUR » l’éducation populaire.

N’en déplaise aux esprits chagrins que je citais en préambule, il y a en effet longtemps que le débat sur la modernité de l’éducation populaire a été tranché.

Oui, l’éducation populaire est moderne, résolument moderne, foncièrement moderne.

Pourquoi ? Simplement parce qu’elle demeure une réponse valide et pertinente, par bien des aspects unique, aux grandes interrogations qui traversent notre temps.

Des interrogations d’ailleurs que vous n’éludez pas et que vous regardez en face, comme en attestent le rapport sur la question du congrès 2013 et le programme des interventions qui rythmeront ces 3 jours d’échanges et de débats.

Pour ma part, mon opinion est faite : l’éducation populaire est essentielle en 2013. Elle n’a peut-être même jamais été aussi vitale pour notre lien social menacé de délitement.

· Les défis éducatifs et culturels de notre société interrogent nos modes traditionnels de création du lien social et d’accès à la citoyenneté. Face à la surabondance de l’information, à la perte de grands repères collectifs, face à ce sentiment angoissant de dessaisissement que l’on décèle en creux dans certains phénomènes sociaux, nous avons besoin de cultiver la convivialité, l’échange citoyen, le débat critique et la solidarité.

· Les inégalités sociales et économiques qui se creusent, l’individualisme et le mercantilisme croissants, la défiance vis-à-vis des institutions républicaines, le sentiment grandissant de précarisation nous dictent de réaffirmer sans relâche, farouchement notre attachement aux valeurs démocratiques. Ils nous imposent de ne jamais considérer comme acquis ce qui est essentiel : le partage, l’intérêt général, la justice sociale.

· La paupérisation de certains territoires populaires, dans nos banlieues, dans les espaces périurbains, doit nous interpeller enfin et nous rappeler sans cesse à notre devoir de fabriquer et d’entretenir la cohésion, la fraternité, l’égalité. De refuser cette idée qu’il peut exister des zones de non-droit, de non accès à la citoyenneté. La laïcité est, à ce titre, un des fondements qui doit inspirer notre action.

Nous devons être à la hauteur de ces défis. Il y a urgence.

Et si je sais que ce constat est sévère, peut-être même alarmiste, je n’en ai pas moins conscience que des solutions existent… et que l’éducation populaire participe de ces solutions.

La présence de l’éducation populaire sur tous ces terrains est un enjeu majeur de la reconquête.

Il faut savoir le reconnaître : c’est dans l’éducation populaire, dans sa liberté, que nous trouverons quelques unes des réponses que les institutions et les acteurs publics ne peuvent pas apporter.

Je pense au devoir d’impertinence de l’éducation populaire, à son pouvoir d’indignation, à son rejet du formatage et du fatalisme. A sa générosité aussi.

J’évoquais à l’instant les idéaux d’égalité, de fraternité, de justice sociale, de citoyenneté. Entre les murs de l’école, tous les enfants peuvent apprendre la signification de ces mots, appréhender pourquoi ces notions sont essentielles.

Mais entre les mains de l’éducation populaire, ces idées prennent chair. Elles sont palpables. Elles sont incarnées. On les goûte, on les expérimente, on les triture. On s’y engage. Et ce faisant, on les rend vivantes.

Alors oui, en 2013, l’éducation populaire est moderne. Elle est plus que cela : elle est garante de notre vitalité démocratique présente et future.

*****

Ancrer l’éducation populaire dans cette modernité appelle également que l’on réinterroge les relations qui unissent les mouvements d’éducation populaire et les pouvoirs publics.

Sur ce sujet, je veux être très claire.

C’est la 1ère fois sous la Vème République que l’éducation populaire est visible dans l’intitulé d’un ministère. Et c’est même la 1ère fois de l’histoire de la République qu’elle apparaît dans l’intitulé d’un ministère de plein exercice.

Cette reconnaissance institutionnelle de la part du gouvernement de Jean-Marc AYRAULT redit l’attachement du peuple de gauche à l’éducation populaire. Je le dis avec force ici, à Nantes.

Cette reconnaissance, elle était nécessaire. Mais elle n’est pas suffisante.

Et il est de ma responsabilité d’inventer désormais avec vous de nouveaux modes d’interaction, de nouveaux lieux de dialogue, de nouveaux outils pour élaborer et mettre en œuvre ensemble une nouvelle politique de jeunesse.

Je détaillerai dans un instant les propositions que je souhaite vous soumettre en ce sens.

Mais d’ores et déjà, permettez-moi de dessiner le principe central de ce partenariat que j’appelle de mes vœux.

Le ministère que j’ai l’honneur de diriger sera à vos côtés, aux côtés de tous les acteurs de l’éducation populaire, pour vous accompagner dans cette période délicate de mutation. Mais il le sera dans le respect de votre indépendance et de cet « idéal protestataire » qui fait la richesse et la diversité de votre mouvement.

Je serai toujours attachée à respecter la pluralité des expérimentations et des idées ; attachée à préserver ce foisonnement, ce bouillonnement qui nourrit le corps social ; attachée à ce qu’il n’y ait pas de « récupération » politique ni d’interventionnisme.

L’éducation populaire se fonde avant tout sur le militantisme et la volonté de transformer. Vous êtes un contre-pouvoir, un aiguillon, une respiration démocratique. Préserver cette liberté est une responsabilité collective et vous pouvez compter sur moi pour prendre toute ma part dans ce combat.

*****

Ce principe étant posé, j’aimerais à présent aborder la question du futur et de la manière dont nous allons pouvoir travailler ensemble dans les mois et les années à venir.

Je vous l’ai dit : je suis attachée à ce que le ministère que j’ai l’honneur de diriger aujourd’hui soit aux côtés des mouvements et associations d’éducation populaire pour les accompagner dans ce tournant périlleux du renouveau, où il faut se réinventer.

Depuis un peu plus d’un an, nous nous sommes donc rencontrés à de multiples reprises, la semaine dernière encore cher Jean-Marc, cher Nicolas. Nous avons échangé, j’ai suivi avec intérêt les travaux préparatoires à ce congrès et les propositions qui en émergeaient.

C’est à partir de cette matière riche que j’ai travaillé pour élaborer 5 engagements, 5 engagements que je suis venue vous présenter aujourd’hui.

Le 1er engagement, c’est bien sûr la question du financement des associations et des mouvements de jeunesse et d’éducation populaire.

Dans un contexte contraint, où chaque ministère, y compris le mien, contribue à l’effort national de redressement des comptes publics, je tiens – et je le dis avec force – à ce que les financements qui vous sont alloués ne soient pas considérés comme une variable d’ajustement pour le bouclage d’un budget ou pour le financement de dispositifs gouvernementaux.

Vous le savez, le gouvernement a choisi de réduire les dépenses de l’Etat. Ces économies sont indispensables pour redresser nos finances publiques et limiter l’effort fiscal demandé aux Français.

Tous les ministères contribuent. C’est une question de solidarité nationale.

Mais le sérieux n’est pas la rigueur : le ministère que je dirige conserve des moyens pour agir et pour financer ses priorités.

Pour porter la politique de la Priorité Jeunesse du Président de la République et du gouvernement, j’ai besoin de votre soutien et de votre mobilisation. Vous êtes au cœur du projet que je porte à la tête de ce ministère.

Certes, notre budget est contraint mais je m’attacherai à ce que les crédits nationaux que nous apporterons en 2014 aux acteurs associatifs et d’éducation populaire, soient globalement préservés après des années d’hémorragies. C’est déjà ce que j’ai fait en 2013. Je souhaite le poursuivre en 2014.

J’ai bien conscience que vous attendez plus et je vous demande d’être patients. Le gouvernement est 100% mobilisé pour inverser la courbe du chômage et retrouver le chemin de la croissance. Quand ce temps arrivera – et il arrivera -, les fruits de cette croissance retrouvée bénéficieront à tous.

Dans le champ jeunesse et éducation populaire, j’aurai à cœur que les mouvements et associations que vous représentez retrouvent des moyens d’agir à la hauteur de leurs ambitions.

Mon deuxième engagement à votre égard, c’est de vous épauler dans ce processus de renouveau que vous avez entamé et de vous donner des moyens supplémentaires pour enclencher cette dynamique.

Plus précisément, j’ai entendu vos propositions :

- Favoriser l’apprentissage critique des outils numériques ;

- Œuvrer pour préparer les citoyens à la participation ;

- Mieux prendre en considération la parole des jeunes dans vos organisations associatives.

En un mot : donner aux jeunes des porte-voix, des outils pour s’exprimer et accéder à la citoyenneté. Des outils qui leur conviennent, qui répondent à leurs codes, à leurs usages, afin qu’ils puissent en retirer tous les bénéfices culturels, sociaux et économiques.

Sur ces enjeux essentiels, laissez-moi vous dire que vos préoccupations rejoignent celles du gouvernement et qu’elles recoupent les mesures prises lors du Comité Interministériel de la Jeunesse, présidé par le Premier ministre, en février dernier.

C’est pour cette raison que, dès cet été, nous allons lancer un appel à projets pour susciter des actions innovantes dans 3 domaines : le numérique, les lieux innovants, les médias jeunes.

3 millions d’euros seront consacrés au financement de ces projets par le fond d’expérimentation pour la jeunesse, ce bel outil qui a trop longtemps ignoré l’éducation populaire. Un appel à projet sera lancé en janvier 2014

Nous comptons sur vous pour relayer activement cette opportunité dans vos réseaux de la Ligue.

L’enjeu n’est pas mince : il s’agit de laisser libre-cours à la créativité de l’éducation populaire pour qu’elle se dote elle-même de nouveaux espaces d’expression et d’animation pour la jeunesse.

3 millions donc pour impulser cette démarche.

Troisième engagement, celui de répondre à la question cruciale du financement des associations d’éducation populaire, et au-delà, des associations en générale, par les collectivités.

Hier encore, une conférence organisée par le ministère sur le sujet de l’évolution des relations entre collectivités et associations pointait du doigt le constat, que vous avez fait de manière empirique : les associations ont le sentiment d’être progressivement passées d’un statut de partenaires à celui de prestataires ou d’auxiliaires des collectivités publiques.

La faute à un recours croissant à la logique marchande de mise en concurrence et d’appel d’offres, qui a remplacé progressivement le recours à la subvention.

Je sais que c’est un vrai sujet d’inquiétude pour vous puisque cette évolution remet en cause votre capacité d’initiative sur les territoires et votre rôle dans la co-construction des politiques publiques.

Les faits vous donnent d’ailleurs raison. Entre 2005 et 2011, les subventions publiques ont baissé de 8%, tandis que les commandes publiques triplaient. Résultat : les subventions publiques qui représentaient 34% du budget des associations en 2005 ne représentent plus aujourd’hui que 24%… et la tendance s’accélère.

Face à cette situation préoccupante, j’ai décidé de recréer les conditions d’un partenariat fructueux entre associations et collectivités. Un partenariat qui soit garant de votre capacité à expérimenter et à innover sur les territoires, et qui sécurise les collectivités.

J’ai souhaité que nous arrivions à une définition légale de la subvention. Cette disposition, qui a fait l’objet d’un travail avec mon collègue Benoit Hamon, ministre délégué à l’Economie Sociale et Solidaire, figurera dans le projet de loi relatif à l’ESS, dont la présentation en première lecture s’est achevée cette nuit à l’Assemblée nationale.

La subvention bénéficiera ainsi d’une assise juridique solide, précise et encadrée, qui confortera les collectivités dans leur droit d’y recourir.

Ce chantier, certes technique mais nécessaire, s’accompagne d’une dimension politique visant à mieux reconnaître la fonction associative dans son rôle démocratique et citoyen.

Pour cela, à la fin de l’année, le Premier ministre signera une nouvelle charte d’engagements réciproques liant l’Etat, les collectivités territoriales et les associations. Cette charte, 13 ans après la première, reconnaîtra pleinement le rôle essentiel joué par la société civile, et en particulier par vous, sa composante associative, dans la construction de l’intérêt général.

C’était un geste attendu, je le sais. Je souhaite qu’il inscrive dans le marbre les termes d’un partenariat durable, équilibré et régénéré entre les pouvoirs publics, les collectivités et les associations, au service de l’intérêt général et de nos valeurs communes.

Quatrième engagement : celui de la lisibilité, de la valorisation et de la reconnaissance de l’apport de l’éducation populaire à notre société

La politique de jeunesse « nouvelle génération » mise en place par le gouvernement repose sur plusieurs piliers. L’un d’entre eux est l’éducation populaire. Oui, nous souhaitons renforcer votre contribution dans l’élaboration et la mise en œuvre de la politique jeunesse.

Pour cela, il était essentiel de nous doter des bons outils et de faire évoluer les structures de l’Etat. C’est ce qui a été décidé lors du CIJ avec la création d’un (ou une) délégué interministériel à la jeunesse.

Son rôle sera essentiellement d’impulser la mise en œuvre des mesures interministérielles décidées et de veiller à la cohérence des actions des différents ministères.

Mais sa mission sera aussi de vous associer dans les processus de co-construction des politiques publiques, avec également les collectivités locales et les organisations de jeunes.

Une fois cette ambition affirmée, il faut être en mesure de l’appliquer. C’est pour cela que nous avons entrepris une réforme des opérateurs et des entités de l’Etat associées à la jeunesse et à l’éducation populaire.

Certains ont pu s’inquiéter de cette réforme. Je les comprends. Après tout, les fantômes de la RGPP hantent encore les esprits !

Mais je tiens ici à les rassurer sans ambigüité : notre volonté est de décloisonner les dispositifs, d’organiser davantage de transversalité, de mutualiser les ressources pour élargir notre rayon d’action et de gagner en efficacité, sans perte d’autonomie pour les opérateurs.

S’agissant de l’Institut National de la Jeunesse et de l’Éducation populaire (l’INJEP) auquel je sais que vous êtes très attachés, tout comme moi, je tiens à rassurer ceux qui craignent qu’il soit menacé et que nous n’en fassions un outil bêtement statistique « à la botte » de l’Etat, comme on dit.

Je le dis : l’Injep verra au contraire son rôle élargi, notamment à la vie associative, et renforcé sur les volets évaluation des politiques publiques et statistiques. Il verra ses ressources humaines accrues et ses missions étendues.

L’Injep est une pièce maitresse de notre politique publique en faveur de la jeunesse dont le rôle a été renforcé par le CIJ. Je m’engage à ce qu’il puisse le remplir avec toute l’objectivité nécessaire. La stricte impartialité de sa recherche sera garantie, notamment par le maintien de son conseil scientifique, dans le nouveau statut qui sera le sien et qui est en cours de discussion.

Je souhaite enfin que l’Injep garde, quelle que soit la formule choisie, la capacité de contractualiser. L’idée est qu’il conserve ses liens avec tous les acteurs du champ : les associations, les collectivités, les chercheurs.

Avec cette évolution de l’ensemble des outils de mon ministère, je souhaite que l’Etat se dote des moyens d’atteindre les objectifs ambitieux que je me suis donné sur le champ de la jeunesse, de l’éducation populaire et de la vie associative. L’objectif est également de valoriser davantage votre apport dans la réflexion collective, d’être une caisse de résonnance pour entrer dans la co-construction effective des politiques publiques en matière notamment d’éducation populaire.

En un mot : inventer ensemble le visage de l’éducation populaire au XXIème siècle.

Enfin, 5ème engagement – qui résume peut-être à lui seul mon message – : mon adhésion pleine et entière à cette notion de « capacitation » des jeunes que vous portez.

Poursuivons cet objectif commun d’ « empowerment » de la jeunesse, cette envie qui nous réunit de valoriser son pouvoir d’agir, de lui permettre de s’emparer des clés de son avenir.

La clé de voûte de la Priorité Jeunesse du gouvernement, c’est de faire le pari de l’engagement des jeunes. De dire stop aux clichés misérabilistes sur la jeunesse passive, désabusée, égoïste, assistée, ces idées préconçues malsaines qui alimentent une vision angoissée de notre avenir. Je dis « stop ! »

C’est vrai, les jeunes sont la catégorie d’âge qui souffrent le plus de la crise, la plus impactée par le chômage. Et nous travaillons sans relâche pour changer la donne. Mais ne résumons pas la jeunesse à cela : les jeunes sont aussi généreux, investis, pleins d’idées et d’envies. Ils sont optimistes et ils font confiance à la vie associative pour faire évoluer la société dans le sens qu’ils souhaitent.

La dernière étude de France Bénévolat montre que la progression de l’engagement bénévole dans la tranche d’âge des 15-35 ans a été de +32% depuis 2010 (contre seulement +10% chez les 35-65 ans) !!

Alors oui, osons faire confiance à la jeunesse et à sa formidable envie de transformer la société ! Donnons-lui les moyens de s’engager et d’accéder à la citoyenneté.

Vous le ferez à votre niveau, avec les outils qui sont propres à la Ligue de l’Enseignement.

Je le ferai au mien, en soutenant et en valorisant la participation des jeunes dans la société et dans ses institutions. En les encourageant inlassablement à s’investir dans les mouvements politiques, associatifs et syndicaux. Une cellule d’accompagnement a d’ailleurs été créée au sein du ministère pour appuyer la création d’associations de jeunes dirigées par des jeunes, avec des moyens financiers, et pour les aider à se structurer.

Et je souhaite oui, que les jeunes dès qu’ils soient en âge de voter dans une élection, quelle qu’elle soit, puissent aussi être élus. Je veux encourager toutes les instances concernées à abaisser les seuils d’âge pour les personnes éligibles. Nous avons commencé à l’imposer dans les CESER. Si on peut voter, on doit pouvoir être élu !

Le non-cumul des mandats doit également aller dans ce sens : place aux jeunes !

La capacitation, j’y travaillerai avec ardeur, avec constance, et je suis heureuse que nous partagions cet objectif commun pour bousculer les habitudes, vaincre les résistances, transformer la société !

*******

Voilà pour mes engagements.

Avant de conclure, je veux saluer la manière dont vous vous êtes emparés de ce sujet majeur qu’est la réforme des rythmes éducatifs, et la manière dont vous vous y êtes investis, comme Vincent PEILLON et moi nous y sommes investis.

Au cœur de cette réforme, il y a la question de l’acte éducatif et de sa pertinence ; il y a la question des ressources que nous devons mobiliser pour assurer la réussite de chaque enfant.

Vous faites évidemment partie de ces ressources, car l’éducation ne se construit pas qu’à l’école. Elle se construit aussi en-dehors, avec les parents, les enseignants, les collectivités locales, les éducateurs, les habitants, les bénévoles…

Tout l’enjeu est d’assurer la cohérence des savoirs dispensés à l’école et en-dehors de l’école, en décloisonnant les ressources, qu’elles soient publiques ou privées.

C’est là le sens des projets éducatifs de territoire. Leur réussite passe par l’animation de partenariats, l’accompagnement des ressources locales et le dialogue. Autant de choses que vous savez faire. J’ai envie de dire : qui sont dans votre ADN !

Les mouvements d’éducation populaire doivent donc être moteurs, à l’échelle des territoires, pour soutenir cette ambition.

Elle n’atteindra son objectif ultime– la réussite de chaque enfant – que si vous nous y aidez, en y apportant cette indispensable mixité géographique, sociale, économique, culturelle, cultuelle, que vous portez depuis 150 ans.

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Depuis la prise de fonctions du gouvernement, il y a un peu plus d’un an, la Ligue de l’Enseignement a répondu présente pour accompagner les politiques publiques prioritaires du gouvernement, qu’il s’agisse des emplois d’avenir, de la montée en charge du service civique, du sport pour tous…

Demain, la réforme des rythmes éducatifs.

Devant autant de preuves éclatantes de votre investissement pour l’intérêt général, osera-t-on encore poser la question de votre modernité ?

Nous ne sommes qu’au début du chemin que je veux parcourir avec vous pour remettre l’éducation populaire au cœur du vouloir-vivre ensemble, au cœur d’une société plus solidaire, au cœur de cet idéal qui nous guide.

150 ans…. On pourrait dire que la Ligue est une institution, avec ses codes, ses certitudes, son âge d’or. Je ne vous ferai pas cette insulte. A 150 ans, on est jeune, on est curieux, on se projette dans le futur, on n’a peur de rien. A 150 ans, on est audacieux.

Et c’est donc par un éloge à l’audace, signé de René Char, que je conclurai mes propos, car cet éloge vous va bien :

« Impose ta chance, serre ton bonheur et va vers ton risque. A te regarder, ils s’habitueront. »

Je vous souhaite à toutes et à tous un excellent congrès et je vous remercie de votre attention.

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