PRomotion des Initiatives Sociales en Milieux Educatifs

La consultation sur les futurs programmes qui se déroule ce mercredi matin, 15 octobre demande aux enseignants de maternelle de plancher sur le futur programme propre à leurs niveaux, et à ceux de l’école élémentaire et du collège sur le projet de socle commun de connaissances, de compétences et de culture. Ce faisant, les établissements sont fermés aux élèves, et dans le contexte des conflits autour des rythmes scolaires, une polémique est relancée. Cette situation me semble être un bon analyseur de l’état de notre système scolaire. Un petit post rapide et d’humeur.

Constat

Claude Lelièvre a proposé sur son blog une mise en perspective historique : Les consultations « banalisées ». Une mise en cause « singulière ». « On peut s’étonner de leur mise en cause toute récente par des organisations appartenant à la PEEP ou à la FCPE. Ces journées (ou demi-journées) »banalisées » au service de »consultations » sont apparues en effet il y a plus de trente ans. Et il y en a eu plusieurs en ce début de siècle sans qu’elles fassent l’objet d’une interpellation publique (et encore moins de recours devant un tribunal administratif). » Donc pourquoi cette fois-ci « ça bouge » ?

Sur le terrain, un exemple sans doute pas isolé rapporté par le JSL de Châlon : Un mercredi d’improvisation. Chacun se renvoie la balle. “Fabien Ben, le directeur des services académiques de l’Éducation nationale, explique qu’« un courrier a été adressé aux mairies il y a environ deux semaines pour avertir de cette journée sans cours. » Problème, tout le monde n’a visiblement pas été destinataire. « Nous avons appris ça incidemment il y a une semaine par des parents qui sollicitaient un dispositif d’accueil, explique-t-on ainsi au service éducation de la mairie de Mâcon. Cela ne nous laissait pas le temps matériel d’organiser un accueil et, de toute façon, les collectivités n’ont pas vocation à assurer un accueil des enfants lors des absences d’enseignants… »

La consultation du mercredi matin 15 octobre 2014 semble déclencher avant qu’elle n’ait lieu plus de débats non pas sur son contenu mais sur son mode d’organisation.

Faire réfléchir ensemble, est-ce possible ?

Avant de savoir si on peut « faire réfléchir », faut-il encore se demander quand faire réfléchir ensemble les acteurs professionnels d’un établissement ? La réponse semble simple. On va pas supprimer les heures de cours du mercredi matin et on va organiser la consultation le mercredi après-midi, lorsque l’établissement est fermé et que les élèves ne sont pas là. C’était d’ailleurs la demande d’associations de parents d’élèves. A quoi peut-on s’attendre alors ? Sans trop d’imagination je peux évoquer quelques formules qui seront agitées :

  • « Ah, ça c’est une bonne idée, on ne perd pas de cours, et ça ne change rien pour les élèves, ils ne sont pas dans l’établissement. » Ah, ça c’est bon signe, mais…
  • « Mais qui viendra le mercredi après-midi sur son « temps libre et personnel » ? »
  • « Le chef d’établissement ne peut pas m’imposer de venir. Ce n’est pas dans mon emploi du temps. »

Bon le mercredi après-midi ne fera pas recette !

Donc la solution c’est de le faire sur leur temps de travail, comme d’habitude.

Mais est-ce si simple ? Avec très peu d’imagination, on peut là encore proposer quelques exemples de refus :

  • « Moi monsieur, je n’ai pas cours le mercredi matin ! Je ne vais pas venir dans l’établissement alors que je n’ai pas cours. »
  • « Je n’ai qu’une heure de cours (situation très exceptionnelles, mais possible néanmoins). Je ne vais pas rester trois heures. »
  • « Et si je ne fais pas cours mercredi matin quand est-ce que je vais rattraper ces heures de cours ? »
  • « Je suis payé pour faire cours, pas pour réfléchir à ce ne pas quoi avec des collègues qui en plus ne sont pas de ma discipline ! »
  • Etc. etc.

Autrement dit, d’une manière générale organiser un temps de réflexion dépend de la bonne volonté de chacun. C’est bien là une caractéristique de notre fonctionnement du système scolaire. Le temps de travail contraint, celui que le chef d’établissement peut en partie contrôler et organiser est le temps « scolaire », l’heure de cours. Bien sûr l’enseignant travaille et travaille beaucoup en dehors de ces heures de cours, mais essentiellement par rapport à ces cours. De plus ces heures « hors-cours » sont vécues comme des heures personnelles, qu’il gère selon son besoin.

Mais le fonctionnement de l’éducation et de l’établissement nécessite de plus en plus la participation des enseignants à son organisation par un travail collaboratif. La bonne volonté individuelle ne suffira plus.

Une institution

« un courrier a été adressé aux mairies il y a environ deux semaines pour avertir de cette journée sans cours. »

Donc on informe les mairies et les parents d’élèves et ??? Et l’autorité de l’Institution ne fonctionne plus à elle seule. En effet comme le remarquait Claude Lelièvre c’est une première.

Mauvais signe pour les uns, désinstitutionalisation de l’école, comme François Dubet l’avait décrit dans son livre qui ne concernant d’ailleurs pas que l’école. L’école n’assure plus le service de garde des enfants, ce que réclament les parents. Il y a encore plus longtemps, Robert Ballion avait déclaré le pouvoir des consommateurs d’école des parents, et s’était beaucoup fait critiquer.

Mais peut-être bon signe au fond. Cette toute puissance n’est pas tenable. Et le travail qui commence avec les rythmes scolaires suppose également un vilain mot : collaboration. Collaboration de la part des différents partenaires engagés dans l’éducation des enfants.

Mais faut-il encore rompre avec deux vieux principes français à l’origine de notre système scolaire :

  • L’éducation se fait contre celle des parents ;
  • L’état est l’éducateur.

Le système scolaire est un des partenaires dans l’éducation des enfants et non le seul.

Bernard Desclaux

Lire la suite : http://blog.educpros.fr/bernard-desclaux/2014/10/15/la-consultation-comme-analyseur/

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