PRomotion des Initiatives Sociales en Milieux Educatifs

In Les Cahiers Pédagogiques – le 12 juin 2014 :

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Eric Favey, membre du conseil supérieur des programmes et Secrétaire général adjoint de la Ligue de la Ligue de l’Enseignement, souhaite recentrer le débat vers l’essentiel et appelle à un dialogue d’une qualité et d’une ampleur à la hauteur des enjeux du socle commun.


La France est un étrange pays. Nous semblons incapables de nous transformer sans tensions, incidents et conflits stériles. Nous voulons y voir la preuve d’une passion pour les grandes causes, alors qu’il n’y a là qu’un agrégat de conservatismes et de peurs, une lutte pour des places et des positions, une inculture de la négociation collective et un déni de démocratie… L’Ecole en est une des plus belles preuves, au moment où quelques poignées d’agités tentent encore d’entretenir l’incendie sur les rythmes. Et au moment où le socle, dès avant sa diffusion, a vu les camps se réorganiser, les arguments s’aiguiser autour de lui.

Certains sont sérieux et contribuent déjà au débat qui doit s’organiser nationalement durant l’automne. Ce débat concernera les personnels certes, mais aussi les parents, les collectivités, les mouvements pédagogiques et associatifs… et les élèves.

D’autres assertions témoignent d’une lecture partielle et partiale des propositions du Conseil supérieur des programmes. Notamment quand il est fait allusion à une absence d’audace ou à un consensus mou qui tueraient l’ambition de faire enfin du collège une « grande Ecole » et plus un petit lycée. Ou, à l’inverse, quand les sirènes de l’élitisme républicain entonnent l’hymne d’une baisse d’exigence. Ou encore quand d’autres regrettent le passage de sept piliers à cinq domaines, y voyant un abandon des « huit compétences clés du cadre européen pour l’éducation et la formation tout au long de la vie » alors qu’elles y sont plus que jamais, y compris celle qui ne figurait pas dans le socle de 2005, « apprendre à apprendre ». Ou quand il fait allusion à une évaluation terminale, alors qu’au contraire les principes sont affirmés dans le socle d’une évaluation progressive, à la fin de chaque cycle. Ainsi sonnera la fin de la concurrence entre l’évaluation du socle et le brevet.

Le Conseil supérieur des programmes n’est pas un service du ministère de l’éducation nationale : la loi de refondation de l’Ecole de la République en précise la fonction, le mandat et l’indépendance. Il se nourrit des travaux et qualités de la Dgesco et de l’inspection générale, des recherches et des pratiques. Il travaille actuellement avec un groupe d’études et de propositions pour la maternelle et les cycles 1 et 2, soit près de 150 personnes. Les avis des organisations professionnelles et syndicales doivent évidemment être entendus dans ce débat. Mais la politique éducative ne relève pas d’un dialogue et d’une négociation exclusives entre elles et le ministre de l’éducation nationale, pas plus que la politique de santé publique ne relèverait d’un dialogue exclusif entre les médecins et le ministère de la santé.

La proposition du CSP est évidemment perfectible et ses choix doivent être débattus, mais avec le sérieux et la qualité démocratique qui s’imposent pour un tel enjeu. L’épisode de la démission d’Alain Boissinot de la présidence du conseil supérieur des programmes doit servir de leçon, mais aussi être rapidement dépassé. Parce que le socle commun de connaissances, de compétences et de culture constitue un des leviers majeurs vers une école où les enfants et les jeunes auront accès à ce « qui unit et ce qui libère ». C’est à tout un pays de contribuer à chercher quelles compétences, quelles connaissances et quelle culture le permettent, au-delà des camps et des clivages. Dans l’aboutissement comme dans la méthode, résident deux ingrédients précieux : la démocratie et à la justice.

Eric Favey

Membre du conseil supérieur des programmes

Secrétaire général adjoint de la Ligue de l’Enseignement

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Categories: 4.2 Société

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