PRomotion des Initiatives Sociales en Milieux Educatifs

Les attentats qui ont touché la France début janvier et les quelques difficultés qui ont pu suivre dans un petit nombre d’écoles ont remis au cœur des débats la question de la transmission des valeurs de la République à l’Ecole. Dès 2012, le ministre de l’Education de l’époque, Vincent Peillon, avait voulu faire de la morale laïque un des piliers de la refondation de l’Ecole. La FCPE avait accueilli favorablement cette idée tout en refusant que cet enseignement soit l’objet d’une nouvelle matière déconnectée des autres et d’un énième cours magistral délivré aux élèves.

L’enseignement moral et civique doit développer l’esprit critique des élèves. Entre « si l’on te frappe sur une joue, tends l’autre joue » et pour « un œil, les deux yeux, pour une dent, toutes les dents », il y a un chemin qui participe sans doute à la morale laïque. D’autre part, il y a des évolutions de société qui rendent obsolètes des concepts encore enseignés ou en vigueur aujourd’hui. Je prendrais l’exemple de la maxime suivante : « La liberté des uns s’arrête là où commence celle des autres ». C’est faux, nous le savons, la morale laïque doit enseigner que la « liberté des uns se construit avec la liberté des autres ».

L’enseignement moral et civique doit aussi être l’occasion de mettre en valeur et en pratique dans l’Ecole de la République, la convention internationale relative aux droits de l’enfant, adoptée par l’ONU en 1989 et dont l’Ecole semble parfois totalement oublier l’existence.

Apprendre aux enfants, à l’Ecole, les principes et les comportements qui permettent de mieux vivre ensemble dans la République, nous paraît être un objectif louable. C’est aussi notre rôle de parents. En tant que partisans de la coéducation, nous souhaitons que nos enfants puissent faire le lien entre ce qu’ils peuvent apprendre avec nous, et ce que l’Ecole doit leur inculquer.

L’enseignement de la morale laïque peut s’avérer une approche progressive de l’enseignement de la philosophie et du droit. En tant que défenseur de la République laïque, nous ne pouvons que nous réjouir si nos enfants peuvent aborder à l’Ecole sous le prisme de la laïcité tous les sujets et les débats auxquels ils sont confrontés au quotidien et en dehors de toute morale religieuse. Cette dernière a pris à notre avis bien trop de place dans le débat public ces dernières années, notamment lors du débat sur le mariage pour tous… Permettre un rééquilibre, dans la vie de nos enfants, citoyens en devenir, grâce à l’Ecole, ne peut être que positif.

Déjà en 2011 dans notre projet éducatif, nous appelions à mettre en place l’enseignement de la philosophie dès le plus jeune âge. Pour ouvrir les élèves au monde, il est primordial de les initier au questionnement afin qu’ils développent leurs capacités de réflexion, qu’ils goûtent tôt à la philosophie, aux langues, aux sciences, à la culture et aux arts, aux approches des sciences économiques et sociales. L’École amène les élèves à comprendre, à s’approprier et à respecter les règles communes permettant la vie en société. Elle doit leur donner des outils pour que plus tard, cette société continue à se construire au service de l’humain. Elle favorise le développement de leur esprit critique afin qu’ils deviennent des citoyens libres et éclairés.
L’élaboration annuelle des règlements intérieurs à travers une écriture collective peut être un excellent exercice pédagogique dans l’enseignement de la morale et civique car il s’agit alors de réfléchir collectivement à des règles qui permettent de vivre ensemble. Cela peut permettre aussi aux élèves de commencer à appréhender des concepts tels que la hiérarchie des normes : en effet, même si les établissements disposent d’une certaine autonomie, ils n’en restent pas moins soumis à l’ensemble des lois et des règlements qui s’appliquent partout en France.

Si les objectifs du gouvernement sont donc partagés, nous ne sommes pas sûrs que la méthode qui a déjà été proposée soit ce que nous voudrions. En effet, nous ne souhaitons pas rajouter aux élèves une nouvelle discipline, un nouveau cours magistral, de nouveaux livres où ils prendraient note de ce qu’est la morale laïque. Parce que nous ne sommes pas partisans du cloisonnement des disciplines en général, nous ne pouvons bien évidemment pas l’être sur ce sujet en particulier. Nous pensons au contraire que ce temps consacré à la morale laïque peut être l’occasion d’un travail en classe différent où les élèves pourraient eux-mêmes devenir acteurs de ces temps d’instruction. Alimenter la réflexion d’exposés et de recherches, organiser des débats en prenant en compte l’actualité et en la rapprochant du quotidien de ces élèves : la morale laïque doit être comprise et prendre sens, elle doit privilégier la réflexion au conflit.

Paul Raoult, président de la FCPE

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