PRomotion des Initiatives Sociales en Milieux Educatifs

In gingko.Neottia.net – le 1er avril 2013 :

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Le bien-être est à la mode. Les « coachs » font  florès en la matière nous promettant des merveilles en matière d’épanouissement personnel, au sein de la famille comme dans l’environnement professionnel.

C’est devenu nécessaire. Tout, autour de nous, semble nous tirer dans le lit de la morosité ambiante duquel il est souvent bien difficile de s’échapper. 

Les entreprises, au premier chef, malgré la crise, ont pris conscience de l’importance du bien-être pour tous au travail, dans le but de prévenir ainsi les absences éventuelles, les frais de santé, les réorganisations fonctionnelles possibles. Dans cette perspective aussi, les entreprises ont compris tout l’intérêt du numérique :

«  Dans ces projets d’investissement‚ le numérique joue un rôle de premier plan. Portails‚ capteurs‚ applications mobiles sont mobilisés au sein de “plateformes de bien-être” pour manger mieux‚ bouger plus‚ éviter le burnout‚ équilibrer vie professionnelle et vie de famille. »

C’est avec ces mots qu’on annonce sur le site « Petit traité du bonheur 2.0 » une conférence sur le sujet, très bientôt.

Et à l’école, comment ça se passe ?

Au moment où l’école de France est secouée et remise en questions à la fois par des résultats défavorables dans les enquêtes internationales et par des débats internes (rythmes scolaires, évaluation, refondation), l’irruption du numérique, souvent traumatisante, qui remet en cause bien des certitudes, à commencer par la posture du maître et la transmission des savoirs, est aussi et surtout, pour ceux qui veulent bien s’y risquer, source de plaisir, de bonheur renouvelé et de bien-être pédagogique. Ce n’est certes pas une dimension à négliger, d’autant qu’avec la fiabilité des matériels et la qualité des applications, le confort pédagogique semble enfin vouloir accompagner ce nouveau bonheur professionnel.

Comment en effet ne pas être sous le charme de tous ces nouveaux outils, tableaux numériques, tablettes, vidéoprojecteurs, toujours plus puissants, toujours meilleurs et plus adaptés ? Comment ne pas avoir l’envie irrépressible d’utiliser toutes ces nouvelles ressources applicatives offertes par l’amélioration des techniques, manuels numériques ou encyclopédies, libres qui plus est ? Comment ne pas investir illico tous ces nouveaux espaces numériques qu’on nous offre pour publier et collaborer en ligne ? 

C’est vrai que cette notion de plaisir est indissociable du fameux « bordel ambiant » cher à Moreno et préliminaire de l’investissement dans le numérique. Que de pionniers et, plus tard, d’autres professeurs à leur exemple, ont osé franchir le pas et intégrer ces outils et ressources dans leur enseignement, dans un sentiment entremêlé d’appréhension et de grande joie enfin ! 

Bonheur, confort, disais-je… Béatitude, félicité, délices ! Le nirvana pédagogique, quoi.

Foutaises, je n’y crois pas une seconde !

Au-delà du plaisir immédiat, de nouvelle version en nouvelle version, de nouvelle fonctionnalité en nouvelle fonctionnalité, de nouvel ordinateur plus puissant, forcément plus puissant, en nouvelle tablette numérique tactile mieux connectée et pourvue d’étonnants applicatifs, on finit inéluctablement par se lasser et le plaisir s’étiole…

Il s’étiole d’autant plus vite quand chacun finit par s’apercevoir que l’ergonomie de certains des outils proposés est finalement fort détestable et que nombre de ces merveilleuses applications pédagogiques offrent souvent des fonctionnalités bien inutiles. De ce point de vue, la palme de l’imposture revient sans doute à pas mal de ces fameux « jeux sérieux » que l’édition tente de nous refiler, au nom de la modernité triomphante…

Non, le vrai bonheur pédagogique numérique, car il existe, n’est certainement pas là…

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Le numérique, l’Internet, les réseaux ont tout changé. Tout.

À commencer par la manière de produire des contenus, d’échanger, de partager, de coopérer, de collaborer, de co-construire ses savoirs, de s’entraider. À continuer aussi par la manière dont s’organisent ces échanges, entre pairs, en faisant fi des hiérarchies et des mandarinats.

Car le vrai bonheur est là, et c’est, il est vrai, un effet de l’émergence du numérique, dans le plaisir du partage et de la collaboration, le plaisir du travail ensemble.

Avec le numérique, il devient difficile et compliqué de continuer comme avant et de travailler seul. Et surtout, il y a de fortes chances que cela vous fasse définitivement passer pour un ringard. L’engagement numérique s’accompagne d’une modification radicale des attitudes. L’échange, le partage, la collaboration deviennent, à l’heure du numérique, les maîtres mots de toute pratique professionnelle.

Concrètement, quand on est professeur, cela peut signifier, par exemple :

  • mettre à la disposition de ses collègues ses progressions, ses séquences, ses documents, ses bonnes idées, partager ses réussites et ses échecs, sans rien attendre en retour ;
  • coopérer, dans sa discipline ou pour l’ensemble des compétences exigibles, par exemple via le socle commun, à l’évaluation des élèves de ses classes ;
  • collaborer aux projets de classe ou d’établissement, disciplinaires ou transversaux ;
  • veiller sur les réseaux sociaux et partager sa veille (médiation, curation) ;
  • participer, à la hauteur de ses moyens, à la construction collective de savoirs communs et partagés…

Et peu importe que ces échanges se fassent par pigeon voyageur ou sur des forums, des listes de discussion ou des espaces collaboratifs en ligne — quoique ces derniers représentent un moyen à la fois plus rapide et plus efficace —, travailler avec les autres sur ou avec des objets numériques, quels qu’ils soient, conduit inévitablement au bonheur.

Comment faire autrement ?

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