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In Observatoire des inégalités – le 19 février 2013 :

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Entre la ville, l’habitat périurbain ou rural, où les niveaux de vie sont-ils les plus élevés ? Le débat sur les niveaux de vie des territoires n’est pas nouveau. Extrait du Centre d’observation de la société.

Entre la ville, l’habitat périurbain ou rural, où les niveaux de vie sont-ils les plus élevés ? Longtemps, la richesse des villes a attiré les populations démunies de la campagne, et entraîné un phénomène qualifié d’exode rural. La division de l’espace est devenue plus complexe, notamment du fait de l’étalement urbain. Les banlieues des villes se sont étendues, en particulier du fait de l’essor de l’habitat pavillonnaire périurbain.

Le débat sur les niveaux de vie des territoires n’est pas nouveau. Les banlieues défavorisées, et en particulier les quartiers définis comme "zones urbaines sensibles", sont souvent présentés comme les territoires qui cumulent les difficultés [1]. Selon une thèse qui rencontre un certains succès médiatique [2] ce serait désormais loin de la ville, dans l’espace périurbain et rural que se localiserait la pauvreté. Pourtant, selon les données de l’Insee, l’espace périurbain, même s’il est très loin d’atteindre les niveaux de vie des quartiers aisés de centre-ville, reste, en moyenne, largement favorisé. Les personnes aux revenus les plus faibles vivent en partie dans le monde rural éloigné et vieillissant, mais surtout dans les quartiers d’habitat social.

Les campagnes plus pauvres que les villes

Les campagnes demeurent en moyenne moins riches que les villes. Le niveau de vie médian (après impôts et prestations sociales) de l’espace urbain vaut 19 200 euros annuels pour une personne seule, contre 18 800 euros pour l’espace rural, soit 2 % d’écart (données 2009). Ces moyennes cachent des inégalités selon les territoires : dans près de la moitié des régions (Champagne-Ardenne, Ile-de-France, Haute-Normandie notamment), le niveau de vie des ruraux dépasse celui des urbains, et dans une autre moitié (Aquitaine, Limousin, Midi-Pyrénées par exemple), c’est l’inverse.

Le taux de pauvreté au seuil de 60 % du niveau de vie médian (données 2009) est beaucoup plus élevé en ville. Il y atteint en moyenne 14 %, contre 11,6 % dans les campagnes, soit 20 % de plus. En Ile-de-France le taux de pauvreté des villes est même 2,7 fois supérieur à celui des campagnes. Si la ville est en moyenne plus riche, les écarts y sont beaucoup plus grands que dans le monde rural, et les populations défavorisées bien plus pauvres.

Bien entendu, il existe des inégalités au sein des campagnes : on y trouve des exploitations agricoles dont la rentabilité varie très fortement, des populations aisées qui s’y établissent au moment de la retraite ou pour échapper aux nuisances de la ville. Les régions où la pauvreté rurale est la plus forte par rapport à la ville (Auvergne, Limousin et Bretagne notamment) sont celles qui comprennent des populations d’agriculteurs âgés avec des pensions de retraite très faibles, pauvreté accentuée par le fait que l’activité des femmes sur les exploitations n’a pas toujours été enregistrée officiellement, comme l’Insee Auvergne l’a montré pour le Cantal et la Haute Loire par exemple.

Niveau de vie médian en milieu rural et urbain
Revenu annuel après impôts et prestations sociales pour une personne
  Rural
en euros
Urbain
en euros
Ecart urbain/rural
en %
France métropolitaine 18 805 19 172 1,95
Province 18 681 18 637 – 0,24
 
Ile-de-France 23 416 21 382 – 8,69
Champagne-Ardenne 19 382 17 438 – 10,03
Picardie 19 269 17 751 – 7,88
Haute-Normandie 19 847 18 205 – 8,27
Centre 19 249 18 981 – 1,39
Basse-Normandie 18 304 18 095 – 1,14
Bourgogne 18 991 18 241 – 3,95
Nord-Pas-de-Calais 18 779 16 972 – 9,62
Lorraine 19 073 18 108 – 5,06
Alsace 21 244 19 521 – 8,11
Franche-Comté 19 215 18 292 – 4,80
Pays de la Loire 18 048 19 016 5,36
Bretagne 18 149 19 226 5,93
Poitou-Charentes 17 890 18 526 3,56
Aquitaine 18 000 19 196 6,64
Midi-Pyrénées 18 166 19 230 5,86
Limousin 17 737 18 797 5,98
Rhône-Alpes 19 615 19 619 0,02
Auvergne 17 785 18 669 4,97
Languedoc-Roussillon 17 478 17 630 0,87
Provence-Alpes-Côte d’Azur 18 412 18 895 2,62
Corse 17 627 17 669 0,24
 
Source : Insee. Année des données : 2009
Taux de pauvreté dans les grandes villes et dans l’espace périurbain
Seuil de 60 % du niveau de vie médian
  Grands pôles urbains
en %
Espace périurbain
en %
Rapport grands pôles urbains/périurbain
Ile-de-France 13,2 7,1 1,9
Champagne-Ardenne 18,0 8,8 2,0
Picardie 19,3 9,3 2,1
Haute-Normandie 16,1 8,4 1,9
Centre 13,8 7,6 1,8
Basse-Normandie 15,2 9,3 1,6
Bourgogne 14,1 8,5 1,7
Nord-Pas-de-Calais 20,1 11,9 1,7
Lorraine 16,2 10,1 1,6
Alsace 15,7 6,2 2,6
Franche-Comté 16,8 9,1 1,9
Pays de la Loire 12,2 9,0 1,4
Bretagne 12,4 8,8 1,4
Poitou-Charente 14,6 10,2 1,4
Aquitaine 12,2 11,0 1,1
Midi-Pyrénées 13,3 10,8 1,2
Limousin 14,1 10,4 1,4
Rhônes-Alpes 12,9 8,9 1,5
Auvergne 13,9 10,1 1,4
Languedoc-Roussillon 20,4 15,1 1,3
Provence-Alpes-Côte d’Azur 16,3 11,3 1,4
Corse 18,2 16,1 1,1
 
Province 15,4 9,7 1,6
France métropolitaine 14,8 9,4 1,6
 
Source : Insee. Année des données : 2009

Le périurbain plus riche que les grands pôles urbains

Le niveau de vie moyen de l’espace périurbain s’élève à 19 700 euros, contre 19 300 dans les grands pôles urbains, un écart moyen de 2 %, similaire à celui qui existe entre la ville et la campagne au niveau national. Mais la différence est défavorable au périurbain dans quatre régions seulement : Pays de la Loire, Aquitaine, Midi-Pyrénées et Bretagne.

Le taux de pauvreté dans les grands pôles urbains (14,8 %) est supérieur de 60 % à celui de l’habitat périurbain (9,4 %). En Alsace, le taux de pauvreté des villes est même 2,6 fois supérieur (15,7 % contre 6,2 %). Dans aucune des régions la pauvreté n’est plus élevée dans l’habitat périurbain que dans les villes, mais elle atteint des niveaux très importants en Corse (16 %) et en Languedoc-Roussillon (15,1 %).

L’espace périurbain rassemble un grand nombre de couches moyennes salariées qui ont choisi l’habitat pavillonnaire et ses avantages : espaces verts, maisons individuelles, coût du logement inférieur, etc. Là aussi entre les résidences haut de gamme et l’univers pavillonnaire moyen les écarts de niveaux de vie sont notables, ce qui n’en fait pas pour autant le cœur territorial des difficultés économiques et sociales [3].

Niveau de vie médian dans les grands pôles urbains et le périurbain
Revenu annuel après impôts et prestations sociales pour une personne
  Grands pôles urbains
en euros
Espace périurbain
en euros
Ecart périurbain/grands pôles urbains
en %
France métropolitaine 19 309 19 715 2,1
Province 18 651 19 504 4,6
 
Ile-de-France 21 353 22 269 4,3
Champagne-Ardenne 17 609 20 005 13,6
Picardie 17 406 19 817 13,9
Haute-Normandie 18 211 19 846 9,0
Centre 19 091 20 049 5,0
Basse-Normandie 18 200 19 256 5,8
Bourgogne 18 551 19 770 6,6
Nord-Pas-de-Calais 16 841 18 968 12,6
Lorraine 18 105 19 264 6,4
Alsace 18 851 21 329 13,1
Franche-Comté 18 143 19 339 6,6
Pays de la Loire 19 302 18 819 – 2,5
Bretagne 19 247 19 211 – 0,2
Poitou-Charentes 18 750 19 016 1,4
Aquitaine 19 549 18 973 – 2,9
Midi-Pyrénées 19 852 19 457 – 2,0
Limousin 18 976 19 266 1,5
Rhône-Alpes 19 664 20 109 2,3
Auvergne 18 778 19 379 3,2
Languedoc-Roussillon 17 503 18 244 4,2
Provence-Alpes-Côte d’Azur 18 821 19 916 5,8
Corse 18 010 18 774 4,2
 
Source : Insee. Année des données : 2009
Taux de pauvreté selon le type de commune
Seuil de 60 % du niveau de vie médian
  Urbaine
en %
Rurale
en %
Rapport urbaine/rurale
Ile-de-France 12,8 4,7 2,71
Champagne-Ardenne 17,8 10,0 1,78
Picardie 17,1 10,6 1,62
Haute-Normandie 15,1 8,4 1,80
Centre 12,9 9,7 1,33
Basse-Normandie 14,6 11,8 1,23
Bourgogne 14,1 10,7 1,32
Nord-Pas-de-Calais 19,5 12,2 1,60
Lorraine 15,3 10,4 1,47
Alsace 12,9 5,8 2,22
Franche-Comté 15,2 9,8 1,55
Pays de la Loire 11,2 11,0 1,02
Bretagne 10,9 11,7 0,93
Poitou-Charente 13,9 13,7 1,02
Aquitaine 12,4 14,3 0,87
Midi-Pyrénées 13,5 14,8 0,91
Limousin 13,7 15,8 0,87
Rhônes-Alpes 12,3 9,9 1,24
Auvergne 13,5 14,8 0,91
Languedoc-Roussillon 18,8 17,8 1,06
Provence-Alpes-Côte d’Azur 15,8 14,7 1,08
Corse 19,0 19,9 0,95
 
Province 14,5 11,8 1,23
France métropolitaine 14,1 11,6 1,22
 
Source : Insee. Année des données : 2009

Les "cités" beaucoup plus pauvres

A l’intérieur des pôles urbains, les inégalités ont une toute autre dimension. Les revenus moyens des villes sont tirés vers le haut par quelques quartiers très aisés. Les zones urbaines sensibles demeurent, de très loin, les territoires les plus défavorisés de France. La comparaison des niveaux de vie est sans équivoque. Le revenu fiscal annuel moyen par personne (données 2009) atteint 12 300 euros, moitié moins que celui des agglomérations comprenant une zone urbaine sensible (22 561 euros). Attention toutefois, le concept de revenu fiscal utilisé ici ne comprend ni les impôts ni les prestations sociales, contrairement aux données précédentes : prendre en compte ces ressources augmenterait le niveau de vie des plus démunis et réduirait le niveau de vie réel des plus riches, mais ne modifierait pas, loin s’en faut, le sens de la comparaison.

Le taux de pauvreté à 60 % du niveau de vie médian (en incluant les prestations sociales) atteint 36 % dans les zones urbaines sensibles, trois fois plus que dans le reste de la France hors des quartiers sensibles. Chez les jeunes vivant en ZUS, il atteint 49 %, près d’un sur deux, contre 16 % en moyenne dans le reste du territoire hors de ces quartiers.

Certes, le visage des ZUS est très différent de la caricature médiatique qui en est fait. Mais les niveaux de vie et de pauvreté qui existent dans les quartiers populaires n’ont tout simplement rien à voir à ce que l’on peut rencontrer dans le périurbain et les centres-villes favorisés. Ceci est dû en grande partie à l’implantation de l’habitat social : c’est là que logent les familles les moins aisées, souvent celles qui n’ont pas les moyens de vivre en pavillon hors de la ville et encore moins au cœur des villes.

Les revenus dans les zones urbaines sensibles
  Zones urbaines sensibles France métropolitaine hors Zus Rapport Zus/France hors Zus
Taux de pauvreté à 60 % du niveau de vie médian (en %) 36,1 12,6 2,9
Taux de pauvreté à 40 % du niveau de vie médian (en %) 8,2 3,2 2,6
Taux de pauvreté des moins de 18 ans à 60 % du niveau de vie médian (en %) 49,0 16,4 % 3,0
Part des allocataires Caf percevant le RSA * (en %) 30,2 18,7 1,6
Revenu fiscal moyen par personne * (en euros) 12 345 22 561 0,55
* La comparaison est faite avec les données pour les villes comprenant une Zus. Données 2009.
Source : Onzus – Rapport 2012. Année des données : 2010

Le bilan

Le monde rural dispose en moyenne de revenus inférieurs, mais les taux de pauvreté y sont moins élevés, sauf dans les campagnes les plus reculées, où persiste une pauvreté d’agriculteurs âgés. L’habitat périurbain est davantage favorisé que le reste du territoire de la ville, dont il a attiré une partie des couches moyennes, notamment des familles. Pour mieux comprendre la disposition des revenus dans l’espace, il est intéressant d’observer la carte des revenus d’un département. Nous avons choisi celle de l’Indre-et-Loire, mais même si les revenus sont inégaux selon les villes, le paysage des revenus offre à peu près partout le même visage [4] :

Au centre, Tours [5] dispose de revenus moyens inférieurs à sa périphérie où l’habitat pavillonnaire constitue l’essentiel des logements (Saint-Avertin, Saint-Cyr, Fondettes, etc.), puis les revenus décroissent en se dirigeant vers les communes rurales les plus éloignées [6]. Mais la ville est elle-même divisée. Sa moyenne regroupe des quartiers très favorisés, le plus souvent au centre, et des territoires d’habitat social en grande difficulté économique, que continuent à quitter les couches moyennes et qui subissent lourdement les effets de l’accentuation de la crise de l’emploi depuis 2008. [7].

Les inégalités spatiales de niveau de vie les plus vives se situent entre les quartiers de la ville centre, et non entre cette partie de la ville et l’habitat périurbain ou le monde rural. Si ces inégalités ne débouchent pas sur davantage de tensions, c’est en partie parce que les quartiers demeurent marqués par des séparations physiques créées par l’aménagement urbain (routes, voies de chemin de fer, bureaux, commerces), mais aussi symboliques.

Au-delà des revenus : logement, transports, cadre de vie…

L’observation des revenus ne reflète pas exactement ce dont disposent les ménages pour consommer. En particulier, elle ne prend pas en compte des coûts de logement. Si c’était le cas, on observerait une diminution des inégalités, car les plus aisés se logent en moyenne dans les quartiers les plus chers. Les niveaux de vie corrigés des campagnes, du périurbain ou de l’habitat social seraient plus élevés du fait de coûts de logement inférieurs. Il faudrait alors prendre en considération d’autres éléments, comme les coûts de transports, défavorables à ceux qui vivent le plus loin des emplois, des commerces et des loisirs, ce qui rééquilibrerait très partiellement les niveaux de vie. Compte tenu de son poids dans le budget des ménages, l’effet du coût du logement est sans commune mesure avec l’effet transport.

Au-delà des niveaux de vie, les populations les plus éloignées des centres-villes n’ont pas accès aux mêmes services (loisirs, culture, commerce, santé, etc.). En contrepartie, elles disposent d’autres avantages : logements plus spacieux, nuisances réduites (bruit, pollution, etc.), environnement naturel. « C’est en couronne périurbaine que la satisfaction sur le cadre de vie est la plus forte et que le sentiment de sécurité est le plus développé. », notait le Crédoc dans un rapport sur le logement. La difficulté est de déterminer la part de choix et de contraintes de l’éloignement du centre-ville, notamment du fait des coûts prohibitifs du logement. Ce qui à un moment donné du cycle de vie relève du choix de quitter un monde trop urbain peut devenir une contrainte du fait de l’élévation du coût des transports, d’un changement d’emploi, d’une séparation, etc.

Extrait du Centre d’observation de la société.

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