PRomotion des Initiatives Sociales en Milieux Educatifs

In Huffingtonpost – le 8 mars 2013 :

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La question du passage des vacances d’été à six semaines et la réintroduction du mercredi matin ont monopolisé les interventions et commentaires, depuis la présentation du projet de réforme des rythmes scolaires. Très peu de prises de paroles se sont attardées sur la place du sport et la défense d’un meilleur accès aux activités physiques et sportives (APS) et culturelles ainsi qu’une meilleure articulation avec les activités périscolaires.
Le mouvement sportif mais aussi les parties prenantes dans le domaine des APS se doivent d’intervenir dans ce débat. Il représente une opportunité pour mettre fin aux politiques de saupoudrage dans ce domaine et pour lancer une réelle discussion quant à la place à accorder au sport dans l’éducation de nos enfants.

Retour sur la réforme : lutter contre un rythme scolaire très soutenu en France

C’est presque un lieu commun, mais rappelons le constat opéré par le gouvernement : la réussite des enfants à l’école primaire dépend pour une part essentielle des conditions dans lesquelles se déroulent leurs apprentissages. Or, la journée type d’un écolier français est plus chargée et plus longue que la plupart de ses camarades européens. La France dispose aujourd’hui du nombre de jours d’école le plus faible d’Europe : "aujourd’hui, à l’école primaire, il y a cent quarante-quatre jours de classe par an pour les élèves […]. En moyenne, dans les autres pays européens, c’est cent quatre-vingt-dix." De plus, la semaine des écoliers français est particulièrement courte avec 4 jours d’école, contre 5 voire 6 chez la plupart de nos voisins européens ; et l’année s’étale seulement sur 36 semaines. Cette extrême concentration du temps d’enseignement, unique en Europe, peut s’avérer inadaptée et préjudiciable aux apprentissages. Elle est source de fatigue et de difficultés scolaires. C’est en tout cas le constat qui justifie la réforme pour le gouvernement Ayrault.

Donner une véritable force pédagogique aux activités physiques

Si nous laisserons le soin aux analystes politiques de juger de la pertinence et du timing de cette réforme, nous saisissons l’occasion pour ouvrir le débat sur la dimension sportive dans ce nouvel agencement de l’école.

En effet, à travers cet allègement des rythmes scolaires, le sport ne doit pas être délaissé. La formation du corps est aussi importante que celle de l’esprit. Le projet lui-même affirme que "les élèves pourront accéder sur le temps périscolaire à des activités sportives, culturelles, artistiques qui développeront leur curiosité intellectuelle, leur permettront de se découvrir des compétences et des centres d’intérêt nouveaux et renforceront le plaisir d’apprendre et d’être à l’école". Une meilleure articulation des temps scolaire et périscolaire est ainsi proposée, bien que les contours de sa mise en œuvre soient sujets à débats. Les nouveaux rythmes envisagés permettent de dégager des plages horaires supplémentaires pour la pratique d’activités sportives au sein de l’école mais aussi en dehors. Il est donc essentiel de veiller à ce que ces nouveaux rythmes se concrétisent par une meilleure prise en compte du rôle éducatif du sport, tout en assurant une répartition adéquate et efficiente avec les professionnels du sport extra-scolaire.

Surtout, selon le professeur François Trudeau de l’Université du Québec à Trois-Rivières, la pratique du sport améliore les résultats scolaires des enfants. Mieux, "en remplaçant jusqu’à 5 heures de cours par semaine pour les remplacer par de l’activité physique, les élèves auraient des résultats semblables – voire meilleurs – que ceux qu’ils avaient auparavant" (1).

Comment font les autres ?

Longtemps pris en référence, le système scolaire allemand semble néanmoins avoir perdu de son prestige. Concrètement, le constat est simple : "les après-midi sportifs ont été rendus responsables du mauvais classement de l’Allemagne à l’évaluation internationale Pisa (qui mesure dans une trentaine de pays les compétences des élèves à 15 ans). Depuis 2004, plus de 4 milliards d’euros (2) ont été investis pour permettre à un tiers des écoles primaires et un quart des collèges d’offrir une journée complète de classe". L’analyse des autres calendriers, des politiques sportives mises en place et des résultats scolaires obtenus témoignent d’une grande hétérogénéité au sein de l’Union Européenne.
Peu de conclusions et solutions facilement identifiables peuvent donc être mise en avant. Cependant, plus que la simple (et facile) formule des après-midis de libre, il apparait que l’éducation sportive doit se concevoir dans un projet éducatif plus global. De même, il semble essentiel de limiter, voire d’éradiquer la dévalorisation de certains enseignements au regard d’autres matières tel que le sport, souvent jugé comme une discipline "annexe" dans l’hexagone.

Plusieurs de nos voisins européens ont compris l’importance du sport dans le parcours éducatif. En Norvège, toutes les matières sont considérées au même niveau, que ce soient les matières obligatoires, les options ou le sport. Aussi, le système scolaire finlandais attache beaucoup d’importance au sport mais aussi à la musique, à l’art, et aux langues vivantes que l’on apprend très tôt dès les petites classes. Le très faible nombre d’heures de cours ne l’empêche pourtant pas d’être considéré comme un des plus performants d’Europe (1er en savoir-lire (2000), 1er en mathématiques (2003), 1er en sciences (2006) pour le classement PISA (3)).

L’activité physique n’est pas une option, c’est une nécessité !

Le débat lancé par l’annonce du Ministre de l’enseignement doit être perçu comme une opportunité pour repenser les activités périscolaires (culturelles et sportives) mais aussi la place du sport au sein de l’école. A ce titre, le récent rapport de la Cour des Comptes "Sport pour tous et sport de haut niveau : pour une réorientation de l’action de l’Etat" (4), confirme ce besoin : "la période qui s’ouvre est favorable à une réflexion sur l’adaptation des politiques publiques en faveur du développement du sport pour tous". Des préoccupations qui ne sont pas simplement "franco-françaises" : le comité d’éducation du Parlement anglais a ainsi annoncé le 11 février 2013 une enquête sur le sport à l’école qui vise notamment à recueillir des informations sur l’impact et l’efficience des politiques gouvernementales et des dépenses actuelles sur le développement du sport à l’école.

Une fenêtre d’opportunité s’ouvre pour initier une réflexion autour de la place du sport en matière éducative. La réforme des rythmes scolaires présente ainsi l’avantage d’ouvrir un dialogue auquel les représentants du mouvement sportif, les associations et les autorités sportives dans leur ensemble doivent prendre part.

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