PRomotion des Initiatives Sociales en Milieux Educatifs

In VousNousIls – le 19 décembre 2013 :

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A l’aube de la nou­velle année, Vincent Peillon, ministre de l’éducation natio­nale, dresse le bilan des pro­jets en cours et évoque ceux à venir. Il nous livre aussi sa vision idéale du métier enseignant.

Le 12 décembre der­nier, vous avez fait un point d’étape sur les dis­cus­sions rela­tives aux évolu­tions des métiers. Où en sommes-nous au juste ?

En un an et demi, nous avons engagé de très nom­breuses réformes, car notre sys­tème éduca­tif en avait grand besoin : nou­veaux rythmes sco­laires, recons­truc­tion de la for­ma­tion ini­tiale des ensei­gnants, entrée de l’école dans l’ère du numé­rique, refonte de tous les pro­grammes ; les postes qui seront créés au cours du quin­quen­nat nous per­met­tront de les mettre en œuvre.

Nous conti­nuons à réfor­mer, dans le dia­logue avec les per­son­nels, au pre­mier rang des­quels figurent les ensei­gnants. On ne réforme pas l’éducation natio­nale sans les ensei­gnants et encore moins contre eux.

Plusieurs groupes de tra­vail ont donné lieu à des avan­cées sub­stan­tielles, notam­ment au sujet des métiers du pre­mier degré. Par exemple, nous confor­tons les Rased, les maîtres for­ma­teurs et les conseillers péda­go­giques ; nous créons aussi une fonc­tion inédite : des for­ma­teurs aca­dé­miques pour le second degré – des ensei­gnants de ter­rain qui inter­vien­dront dans les ESPE.

En ce qui concerne plus géné­ra­le­ment les ensei­gnants du secon­daire, nous devons pour­suivre les dis­cus­sions autour de prin­cipes simples et accep­tés de tous : la jus­tice, la trans­pa­rence et l’équité. Les pro­po­si­tions ont été mises sur la table, nous devons à pré­sent lais­ser à cha­cun, sur le ter­rain, le temps de se les approprier.

Alors que les assises de l’éducation prio­ri­taire sont en cours, quels chan­ge­ments pour­raient être envi­sa­gés pour les ensei­gnants en zones difficiles ?

Les ensei­gnants qui exercent dans l’éducation prio­ri­taire sont confron­tés aux dif­fi­cul­tés sociales et sco­laires de leurs élèves ; ils font preuve d’un enga­ge­ment excep­tion­nel et sou­vent d’une grande capa­cité à mettre en œuvre des péda­go­gies inno­vantes. Malgré cela, nous devons mesu­rer à quel point notre sys­tème éduca­tif n’arrive pas à lut­ter contre les déter­mi­nismes socio­lo­giques : les tests PISA sou­lignent que nous sommes le pays déve­loppé dans lequel l’origine sociale est le plus déter­mi­nante pour la réus­site scolaire.

Pour don­ner un nou­veau souffle à l’éducation prio­ri­taire, nous avons choisi d’associer les ensei­gnants de ces réseaux à notre réflexion, car ce sont eux qui savent le mieux ce dont leurs élèves ont besoin et de quelle manière nous pou­vons agir ensemble pour les faire tous réus­sir. Pour cette rai­son, nous avons engagé une démarche de concer­ta­tion, avec des assises aca­dé­miques ou inter­aca­dé­miques qui se tiennent cet automne. J’attends avec beau­coup d’intérêt les pro­po­si­tions qui en émane­ront, avant d’annoncer, en jan­vier, les orien­ta­tions de notre poli­tique visant à faire de l’éducation prio­ri­taire une véri­table prio­rité nationale.

J’ai d’ores et déjà annoncé, dans le cadre des dis­cus­sions sur les métiers, que la charge de tra­vail spé­ci­fique à l’exercice du métier d’enseignant dans cer­tains réseaux serait recon­nue : nous créons une pon­dé­ra­tion de 1,1 pour le cal­cul des ser­vices des ensei­gnants du secon­daire (1h de cours vaut 1,1 heure), et pro­po­se­rons un dis­po­si­tif équi­va­lent pour les ensei­gnants du pre­mier degré.

De nom­breux dis­po­si­tifs péda­go­giques donnent, dans cer­tains réseaux d’éducation prio­ri­taire, des résul­tats remar­quables ; nous devrons nous don­ner les moyens de dif­fu­ser et de géné­ra­li­ser ces pra­tiques au plus grand nombre d’écoles et d’établissements.

Vous avez annoncé des mesures en faveur des direc­teurs d’école. Concrètement, qu’est-ce qui va chan­ger pour eux ?

La mise en œuvre de la prio­rité au pri­maire repose en grande par­tie sur l’engagement des direc­teurs d’école qui accom­plissent des mis­sions nom­breuses et essen­tielles. Ce sont eux qui per­mettent la réus­site de l’introduction du « plus de maître que de classes » et qui orga­nisent le retour de la sco­la­ri­sa­tion des enfants de moins de trois ans. Et ils jouent un rôle essen­tiel dans le pas­sage aux nou­veaux rythmes sco­laires, en favo­ri­sant un dia­logue de qua­lité entre les dif­fé­rents inter­lo­cu­teurs (parents, ensei­gnants, élus, agents muni­ci­paux, asso­cia­tions..). Je veux les remer­cier très cha­leu­reu­se­ment pour les efforts qu’ils ont déployés depuis plus d’un an.

Leurs mis­sions ont beau­coup évolué der­niè­re­ment et doivent donc être mieux recon­nues. Ils béné­fi­cient déjà, en tant que pro­fes­seurs des écoles, de l’indemnité de 400€ annuels.

Dans le cadre des pre­mières annonces sur l’évolution des métiers de l’éducation natio­nale, j’ai décidé d’améliorer les condi­tions d’exercice, de rému­né­ra­tion et de car­rière des direc­teurs d’école.

Par exemple, pour les direc­teurs d’école de 3 classes, nous mul­ti­plions leur décharge de ren­trée par 5 d’ici 3 ans (elle pas­sera de 2 à 10 jours), nous tri­plons leur décharge d’activités péda­go­giques com­plé­men­taires (de 6 à 18 heures), et nous aug­men­tons de 66% la part com­plé­men­taire de leur indem­nité de sujé­tion spé­ciale (de 300 à 500€). Quant au direc­teur d’une école de 9 classes, il pas­sera dès 2015 d’un quart à un tiers de décharge, et verra la part com­plé­men­taire de son indem­nité aug­men­ter de 100€.

L’accès de tous les direc­teurs d’école à la hors-classe sera faci­lité, et une « classe excep­tion­nelle » sera créée, à laquelle ils auront un accès prio­ri­taire. Enfin, leur tra­vail admi­nis­tra­tif sera sim­pli­fié et plus de 15 000 contrats aidés sont en train d’être recru­tés pour les accom­pa­gner dans leurs tâches.

En quelques mots, le pro­jet qui vous tient le plus à cœur pour que le métier ensei­gnant du XXIe siècle soit vrai­ment le plus beau métier du monde ?

Au cours de l’histoire, l’enseignement s’est trans­formé au rythme des grandes muta­tions tech­niques. La tech­no­lo­gie fait évoluer les formes du savoir, et l’on n’enseigne pas de la même façon avant ou après l’invention de l’imprimerie – par exemple.

La révo­lu­tion des tech­no­lo­gies de l’information et de la com­mu­ni­ca­tion est au moins aussi lourde de consé­quences que l’avènement de l’imprimerie. C’est pour­quoi je sou­haite que l’enseignant du XXIe siècle soit plei­ne­ment formé aux usages péda­go­giques du numé­rique, afin qu’il puisse prendre appui sur ces outils pour inno­ver et pour per­son­na­li­ser son ensei­gne­ment. Beaucoup le font déjà, et nous devons don­ner les moyens à tous ceux qui le sou­haitent de s’emparer du numé­rique dans leur classe, pour mieux ensei­gner et faire en sorte que leurs élèves puissent mieux apprendre – s’intéresser davan­tage au contenu du cours, s’investir dans des exer­cices inter­ac­tifs… Pour cela nous créons des ser­vices numé­riques inno­vants pour les ensei­gnants et les élèves, tels que m@gistère, un dis­po­si­tif de for­ma­tion conti­nue tuto­rée pour accom­pa­gner les ensei­gnants du 1er degré ou encore D’COL, un accom­pa­gne­ment inter­ac­tif per­son­na­lisé pour les élèves en dif­fi­cul­tés, pour ne citer que ces deux exemples.

Je suis convaincu que cette appro­pria­tion des tech­no­lo­gies par les ensei­gnants est l’une des clés de la reva­lo­ri­sa­tion du métier.

Sandra Ktourza

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