PRomotion des Initiatives Sociales en Milieux Educatifs

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Déconcentration, décentralisation : ces deux processus concernent désormais de nombreux systèmes éducatifs dans le monde. Le transfert des pouvoirs du gouvernement central à des administrations ou collectivités locales a profondément modifié leur organisation. Avec quels résultats ? Est-ce un facteur de réussite pour les élèves ? Entretien avec une spécialiste de ces questions, Nathalie Mons.

Les deux dernières décennies ont été marquées par une vague de transferts de compétences aux acteurs locaux qui ont fortement redistribué l’organisation des pouvoirs dans les systèmes éducatifs. Quelle est aujourd’hui la situation au sein de l’OCDE ?
Tous les pays ont été affectés par ces évolutions institutionnelles qui ont emprunté des voies diverses. Ainsi, un premier tiers des pays de l’OCDE panachent aujourd’hui des mesures d’autonomie scolaire qui visent à déléguer de nouveaux pouvoirs à des professionnels de l’éducation – les établissements scolaires – et des mesures de décentralisation politique qui contribuent à un nouveau partage territorial du pouvoir dans le champ éducatif. Il s’agit aujourd’hui du schéma dominant. Un autre quart des pays s’est orienté vers la solution technique de la déconcentration qui assure aux systèmes éducatifs une plus grande souplesse de gestion par le transfert de nouvelles attributions à des entités locales demeurant sous la hiérarchie de l’administration centrale. Enfin, les mesures isolées, soit d’autonomie scolaire – 7% des pays de l’OCDE – soit de décentralisation politique – 14% des pays – ont été mises en œuvre plus ponctuellement. Ces évolutions multiformes des anciens systèmes éducatifs centralisés cohabitent toujours avec les structures historiquement fédérales qui concernent 18% des membres de l’OCDE. La France s’inscrit dans ce mouvement global, selon un modèle que l’on pourrait qualifier de « décentralisation minimale ». 

Ces différents modes de gouvernance ont-ils des conséquences sur l’efficacité des systèmes éducatifs ?
L’autonomie scolaire – plus que la décentralisation politique ou la déconcentration – s’avère associée positivement avec le niveau général des élèves ou le développement des élites scolaires. C’est le cas par exemple de la Finlande, de la Nouvelle Zélande, du Royaume-Uni. Le transfert de nouvelles attributions vers des professionnels de l’éducation situés au plus près de l’élève semble donc davantage bénéfique d’un point de vue pédagogique que la délégation de pouvoirs à des autorités politiques locales ou à des entités déconcentrées, chargées il est vrai le plus souvent d’un rôle de gestionnaire. Les équipes des établissements scolaires sont-elles des acteurs à privilégier dans la nouvelle gouvernance locale parce qu’elles sont constituées de professionnels de l’éducation, parce qu’elles sont au plus près des élèves ou parce qu’elles sont autorisées à intervenir dans le domaine pédagogique (conception des programme, recrutement des enseignants…) ou pour les trois raisons conjointement ? Il est difficile de répondre à cette question, le schéma autorisant rarement une localisation des contenus à enseigner et un recrutement local des enseignants. 

En est-il de même en matière d’équité ?
Autre constat de l’étude : la décentralisation politique, lorsqu’elle est poussée dans sa logique extrême – une structure fédérale sans coordination nationale forte – n’est pas associée à une progression du niveau général des élèves mais se solde au contraire par des inégalités scolaires globales et d’origine sociales fortes. Enfin, dernier constat, la centralisation, quand elle concerne certaines compétences – la conception des programmes, la certification et la gestion du personnel – est en lien avec des inégalités scolaires d’origine sociale faibles.                              

Les comparaisons entre pays permettent-elles de privilégier une organisation plus qu’une autre ?
La gouvernance locale semble pouvoir être positive pour les apprentissages des élèves, dans le cas de l’autonomie scolaire. Elle apparaît cependant systématiquement associée à des résultats négatifs tant en termes d’efficacité que d’équité quand elle ne s’inscrit plus dans un cadre régulateur national. Mais s’il y a une chose à retenir de cette recherche, c’est qu’elle milite pour un dépassement de la dichotomie traditionnelle et simpliste entre une décentralisation gage d’efficacité et une centralisation source de dysfonctionnements. Manifestement, il faut tendre vers un système d’agencement complexe qui allie des compétences gérées au niveau national et d’autres traitées aux différents niveaux locaux. Nous avons aujourd’hui besoin de davantage de recherches pour avancer dans notre compréhension de ces systèmes complexes. Aujourd’hui, la recherche sur le sujet est encore largement embryonnaire.

Maître de conférence à l’Université Pierre-Mendès France-Grenoble II, membre du Laboratoire de Sciences de l’Education (LSE), Nathalie Mons est spécialisée dans l’analyse des politiques éducatives dans une perspective de comparaison internationale. Intégrée dans plusieurs projets de recherche européens, elle travaille plus particulièrement sur les effets des politiques éducatives sur les performances des élèves, tant en termes d’efficacité que d’équité. Auteur d’un ouvrage récent sur Le standard dans le monde francophone (IRDP, 2006), elle a contribué à plusieurs recherches sur la décentralisation en France et l’étranger. Pour le grand public, certaines des conclusions de ces recherches se retrouvent dans l’ouvrage Améliorer l’école (PUF, 2006).

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