PRomotion des Initiatives Sociales en Milieux Educatifs

Rapport du Comité de pilotage septembre 2005
Rapport du Comité de pilotage
à l’attention du Président de la Région Ile de France

A/S : définition d’une politique régionale d’égalité des droits et mise en place d’un Conseil régional de l’égalité

Le Président de la Région Ile de France trouvera ci-joint une note du Comité de pilotage relative à la définition d’une politique régionale d’égalité des droits et à la mise en place du Conseil régional de l’égalité. Ce rapport n’engage pas le Conseil régional d’Ile-de-France mais ses seuls auteurs.

Introduction

Aujourd’hui la mise en œuvre d’une politique régionale d’égalité d’accès aux droits communs pour tous, appuyée par la création d’un Conseil régional de l’égalité répond à plusieurs besoins :

– une demande sociale très forte d’égalité d’accès aux droits et d’égalité de traitement entre les personnes. Cette demande existe chez l’ensemble des Franciliens. Elle est particulièrement forte chez les jeunes, comme l’a montré l’enquête TNS Sofres de consultation des 15-25 ans, réalisée pour la Région Ile de France en 2005. Les jeunes y placent la lutte contre le racisme, la tolérance vis-à-vis d’autrui, la mise en place de solidarités et le renforcement des droits des minorités en position prioritaire ;

– l’attente des associations, des élus d’Ile de France et de l’ensemble des acteurs impliqués sur ces sujets qui souhaitent pouvoir s’appuyer sur une structure relais de soutien, de mutualisation des expériences et de débats ;

– les difficultés objectives d’accès aux droits en Ile de France pour certaines populations comme l’ont montré les travaux de la Mission Interministérielle des Politiques de lutte contre l’Exclusion Sociale.

La définition d’une politique régionale d’égalité des droits déclinée dans l’ensemble des champs d’activité régionaux (développement économique, éducation, recherche, culture, politique de la ville, solidarités…) et la mise en place d’un Conseil régional de l’égalité qui définirait les priorités du programme régional sont les deux axes de travail proposés au Président de la Région Ile de France dans cette note.

1) La méthode de travail et les objectifs du comité de pilotage

A la suite de la délibération relative à la démocratie régionale du 17 novembre 2004, un comité de pilotage composé de 8 membres et coprésidé par deux élus (Lucile Schmid, élue du groupe socialiste chargée par le Président Jean-Paul Huchon d’une délégation pour « l’égalité réelle et la lutte contre les discriminations », et Zine-Eddine Mjati élu du groupe Verts) a été désigné.

La composition du comité a croisé les critères suivants : domaines de discriminations les plus fréquents (emploi, logement, éducation, santé), représentation du milieu associatif, expertise (Voir Annexe pour la composition du comité de pilotage)

La première réunion du comité de pilotage en présence de Jean-Paul Huchon a eu lieu le 3 février 2005. À cette occasion le Président de la Région a donné deux objectifs au Comité : a) tracer les perspectives d’une ou de politiques régionale(s) favorisant l’égalité d’accès aux droits ; b) lui proposer un schéma d’organisation du Conseil régional de l’égalité comme instrument d’une politique régionale globale de lutte contre les discriminations et pour l’accès aux droits.

Le Comité de pilotage a auditionné depuis cette date une vingtaine d’élus (pour l’essentiel des vice-présidents), de responsables politiques et administratifs de la Région, de représentants syndicaux, d’experts et de personnalités qualifiés afin remplir sa mission. Les entretiens avec les vice présidents ont essentiellement porté sur trois points : un état des lieux des actions engagées en matière de solidarité et de lutte contre les inégalités, un point de vue plus personnel de la personne auditionnée sur la portée politique du thème des « discriminations » et la définition de perspectives d’avenir.

Des auditions personnalisées de certains membres du comité de pilotage ont également été réalisées pour mettre en valeur leur point de vue sur la pertinence de l’action régionale par rapport aux approches engagées à d’autres échelons (national, ou plus local, exemples étrangers).

Le comité de pilotage s’est fixé pour objectif de proposer au Président et aux élus de la région Ile-de-France un schéma général d’organisation et de mission pour le Conseil régional de l’égalité. On ne trouvera, par conséquent, pas dans ce rapport la formulation de propositions concrètes pour des politiques publiques ou des dispositifs d’action contre les discriminations, le comité de pilotage considérant qu’il incombera directement à un futur Conseil régional de l’égalité d’avancer ce type de propositions.

A partir de ces éléments le Comité s’est appliqué principalement à :

– établir un état des lieux des connaissances relatives aux discriminations et à l’égalité des droits en Ile-de-France ;

– Définir la grille d’interprétation qui guide aujourd’hui l’analyse de ces questions à la Région et en évaluer la place dans les dispositifs existants ;

– Formuler des pistes pour mieux intégrer l’objectif de lutte contre les discriminations et d’égalité d’accès aux droits dans les politiques de la région dans une approche dynamique des notions d’égalité et de justice ;

– Préfigurer l’organisation, les missions et les compétences d’un Conseil régional de l’égalité ;

– Réfléchir à l’articulation possible entre le Conseil régional de l’égalité et les autres instances de démocratie participative.

2) Le contexte général : inégalités, discriminations, mise en œuvre d’une égalité réelle des droits. Des approches complémentaires

La lutte contre les discriminations est un défi pour la démocratie et la République. Les inégalités de traitement contreviennent aux principes d’égalité juridique entre les personnes, et mettent en péril l’unité de la République en reléguant en marge des territoires et des groupes entiers d’individus exclus de la sphère d’égalité des droits.

Ces processus de ségrégation et de ghettoïsation touchent particulièrement l’Ile-de-France. En effet les auditions du comité de pilotage ont mis en évidence l’existence de fortes discriminations, de fortes inégalités et des obstacles persistants à l’égalité des droits en Ile-de-France. Elles ont également mis en lumière des positions différentes mais souvent complémentaires des vice-présidents sur la manière d’en analyser les causes et les moyens de les résoudre.

Dans le cadre des auditions les termes de « discriminations » et d’« inégalités » ont été fréquemment employés l’un pour l’autre ou en association étroite. Les auditions ont montré une relative incertitude quant au lien logique et philosophique à établir entre des termes qui relèvent pourtant d’un avis général d’un même registre, celui de la justice sociale. Les auditions ont aussi révélé un large consensus autour de l’idée que la lutte contre les discriminations ne peut ni ne doit se substituer à la lutte contre les inégalités sociales, mais qu’elle vient prolonger et en quelque sorte compléter l’arsenal des moyens mis en œuvre pour la réalisation de la justice sociale.

De manière générale, le sens du mot « inégalité » apparaît plus clair à l’ensemble des personnes auditionnées. Il n’y a là rien d’étonnant, compte tenu de la tradition d’analyse française. Le Comité ne s’est d’ailleurs pas attaché à établir dans le cadre des entretiens de véritable différenciation méthodologique. Il a considéré que dans un premier temps la démarche à suivre pour être utile à la Région Ile de France était de faire l’inventaire, d’une part, des inégalités et discriminations existantes et, d’autre part, des réponses que la Région y apportait, ou était en mesure de leur apporter.

Une grille d’interprétation des termes discriminations/inégalités a été réalisée à partir des auditions par Patrick Simon chercheur à l’INED et membre du Comité de pilotage, qui doit permettre dans un second temps d’analyser les interactions entre inégalités et discriminations dans le discours des acteurs.

Pour le Comité, l’action régionale doit avant tout apporter des réponses concrètes au problème des « discriminations », c’est-à-dire de « pratiques discriminatoires » ou d’inégalités de traitement entre les personnes et les territoires générées le plus fréquemment, non par une intention délibérée de différenciation, mais par le fonctionnement « normal » de procédures en apparence neutres. Il apparaît clairement que ces « discriminations » résistent aux schémas traditionnels d’analyse des inégalités socioéconomiques et ne peuvent pas être résolues par la simple réaffirmation officielle du principe d’égalité formelle entre les individus.

Différentes études sur les discriminations ont ainsi montré que les outils du droit commun fondés sur des critères uniquement sociaux ne permettent pas de résoudre certaines inégalités, voire les amplifient. Le traitement social des discriminations ne résout pas toutes les inégalités de traitement, alors même que les personnes discriminées sont aussi touchées par la « question sociale ». Il n’y a donc pas de lien direct et univoque entre discriminations et inégalités socioéconomiques. Mais il va de soi que le Comité s’est également attaché dans ses auditions à recenser les inégalités socio-économiques classiques sur le territoire de la Région Ile de France.

C’est un fait. La France est l’un des grands pays européens où la lutte contre les discriminations et les réflexions sur la mise en œuvre d’une égalité réelle des droits ont rencontré les plus fortes résistances. Après une longue période de déni, les pouvoirs publics se sont engagés dans les années 1990 sur cette question sous une double contrainte : action des associations notamment dans les secteurs de l’emploi, du logement et de la formation, obligations européennes en second lieu, alors que France affichait un véritable retard dans la transposition des directives communautaires en matière de lutte contre les discriminations et dans le développement de dispositifs anti-discriminatoires .

La nécessité d’apporter des réponses concrètes aux discriminations est aujourd’hui de plus en plus largement admise mais le débat sur les moyens d’y remédier reste conflictuel.

La création du numéro vert anti-discriminations (le 114), des commissions départementales d’accès à la citoyenneté (CODAC) et du groupe d’études et de lutte contre les discriminations (GIP-GELD) à la fin des années 1990 ont permis de faire progresser les connaissances et de mesurer la nécessité d’une implication d’envergure des acteurs publics sur ces sujets. Ces dispositifs n’ont pourtant pas convaincu et ont dévoilé des résistances fortes à une implication résolue de l’Etat sur ces sujets.

Après une période de reflux, le débat sur les discriminations dans la société française a ressurgi au moment de la création de la Haute autorité de lutte contre les discriminations et pour l’égalité (HALDE) et d’un débat public sur l’opportunité d’un recours à des instruments de politiques publiques relevant d’une logique de « discrimination positive » pour refonder une égalité réelle des chances.

Plusieurs possibilités ont ainsi été évoquées : nominations dans des emplois publics et dans les entreprises à raison des origines, positionnement sur les listes électorales à raison des origines, mécanismes d’accès aux grandes écoles fondés sur une discrimination positive territoriale . Ces mesures ponctuelles et sectorielles ont enregistré des résultats mitigées dans la lutte contre les discriminations, sans doute parce qu’elles ne se sont pas inscrites dans le cadre d’une réflexion approfondie et d’un projet cohérent sur les enjeux et les mécanismes des discriminations.
Le comité de pilotage a voulu souligner l’importance du « vécu » des discriminations par les personnes qui en sont victimes, notant qu’il n’y a pas de corrélation directe entre le niveau d’intégration des personnes et le niveau d’exposition aux discriminations.

Des études ont ainsi montré que le ressentiment éprouvé face à une discrimination est plus fort chez les personnes parfaitement intégrées qui ont le sentiment d’avoir joué le « jeu » de la méritocratie.

3) La pertinence d’une approche régionale

Qu’il s’agisse d’égalité entre les territoires, de solidarité entre les hommes ou de droit à une vraie qualité de vie, les préoccupations liées à l’égalité réelle des droits en Région Ile de France sont en phase avec les priorités du projet régional pour la mandature.

En 2004, le rapport de Bernard Stasi concernant la création d’une Haute Autorité de lutte contre les discriminations avait d’ailleurs mis l’accent sur la nécessité d’une déclinaison régionale de la politique nationale d’égalité réelle des droits, prévoyant pour ce faire au départ la création d’antennes régionales de la HALDE.

Cette volonté de déclinaison locale paraît aujourd’hui différée, sinon abandonnée. La pertinence d’une action anti-discriminatoire à l’échelon régional est d’autant plus forte que les dispositifs publics nationaux de lutte contre les discriminations ont produit des résultats limités.

Une action anti-discriminatoire trop étroitement fondée sur l’information et le recours juridique devant les tribunaux est vouée à l’échec si elle ne s’accompagne pas d’actions concrètes de prévention et de correction des inégalités de traitement dans le cadre de politiques publiques.

La Région Ile-de-France est concernée en premier chef par cette déclinaison régionale.

1. Les discriminations en Ile-de-France, un problème reconnu mais éclairé par des données insuffisantes. Des politiques régionales orientées vers la lutte contre les inégalités et l’exclusion.

1.1. Rareté des données sur les discriminations en Ile-de-France

Définir la « discrimination ». D’une manière générale, une discrimination désigne une différence de traitement à l’égard d’un individu ou d’un groupe de personnes par rapport à une autre personne ou un autre groupe, sans fondement légitime – l’inégalité de traitement -, s’appuyant sur une caractéristique particulière ou un motif prohibé par la loi (race, sexe, religion,…). C’est la notion d’ « illégitimité » du critère qui fonde la discrimination. Ainsi, note le sociologue éric FASSIN, « on parle de discrimination lorsque à situation égale, des acteurs sociaux subissent un traitement différent – pour autant que cette différence soit productrice d’inégalité (…). L’inégalité de traitement ne suffit pas à caractériser la discrimination : encore faut-il que le critère qui la fonde soit illégitime ».

C’est l’« illégitimité » du critère de jugement qui est retenue aussi par la juriste Danièle LOCHAK selon laquelle « il y a discrimination, non pas dès l’instant où est instaurée une différence de traitement, puisque le principe d’égalité n’impose pas de traiter tout le monde de façon identique, mais dès lors que cette différence de traitement n’est pas justifiée par une différence de situation » . Les critères jugés illégitimes aujourd’hui dans le droit français (Constitution de la Ve République) et communautaire (Traité d’Amsterdam) définissent les contours d’une doctrine des « distinctions interdites ». Il s’agit principalement des motifs suivants : race et origine ethnique, religion, orientation sexuelle, handicap.

Un diagnostic approximatif sur les discriminations en Ile-de-France, mais un problème reconnu. Les auditions du Comité de pilotage ont permis de constater que si l’existence sur le territoire régional de discriminations liées à l’origine ethnique ou au territoire est admise, les données statistiques pour éclairer ces phénomènes sont très rares, voire inexistantes, alors que l’on dispose de données permettant les différences de situations entre « Français » et « étrangers », « hommes » et « femmes ». Il est aujourd’hui quasi impossible de dresser un diagnostic statistique précis des mécanismes de « discrimination » et de leurs effets en Ile-de-France.

Par ailleurs, les données statistiques pouvant être éventuellement collectées par la MIPES ou l’IAURIF pour dresser un état des lieux des discriminations en Ile-de-France sont produites au niveau national (INSEE, CAF, ANPE) et n’intègrent pas toutes les catégories nécessaires.

Les « points aveugles » de l’appareil statistique public. L’imprécision du diagnostic sur les discriminations dans la société française en général et en Ile-de-France en particulier est principalement due au fait que les catégories de l’appareil statistique officiel ne permettent pas de repérer les individus et les groupes victimes de « discrimination ». Des réticences et des tabous sur l’introduction dans la statistique de catégories ethniques ou identitaires, conduisant à des formes d’autocensure allant bien au-delà des barrières fixées en 1978 par la CNIL, combinés à un manque de moyens statistiques autonomes au niveau régional, sont généralement invoqués pour rendre compte de l’inadaptation de l’outil statistique à la mesure des discriminations.

Certaines sources statistiques existantes relatives à l’Ile-de-France permettent toutefois d’accréditer la réalité des discriminations, mais les catégories sociodémographiques classiques ne permettent pas de faire apparaître les discriminations touchant des individus en raison de leur appartenance à des groupes repérables.

L’analyse des données de la MIPES (Mission d’information sur la pauvreté et l’exclusion) suggèrent que les disparités sociales très fortes constatées en Ile-de-France relèvent dans bien des cas de phénomènes discriminatoires. Le rapport 2003 de la MIPES montre ainsi, par exemple, que les actifs de nationalité étrangère sont plus de deux fois plus touchés par le chômage (15,8% en mars 2002) que les actifs de nationalité française (7,8%). Ces inégalités recouvrent aussi des disparités territoriales, puisque la Seine-Saint-Denis regroupe plus d’un quart du total régional des actifs étrangers et plus d’un chômeur sur trois y est étranger .

Les « Chiffres clés pour la Région Ile-de-France (2005) » donnent aussi des indications pour apprécier les inégalités de traitement entre hommes et femmes, notamment en matière de salaires, inférieurs de 25% en moyenne en 2001 pour les salaires des femmes par rapport à ceux des hommes .

Diverses études menées par des organismes publics et privées révèlent l’importance des discriminations en Ile-de-France et les relient aux spécificités sociales, économiques et politiques de la Région.

Les Vice-présidents auditionnés admettent unanimement l’existence de phénomènes discriminatoires dans leurs secteurs respectifs, tout en constatant que les connaissances sur les discriminations relèvent encore de données éparses et d’intuitions.

1.2. D’importants dispositifs régionaux orientés par un objectif de solidarité et de lutte contre la pauvreté et l’exclusion

L’inventaire des dispositifs régionaux entrant dans le cadre de la lutte contre les inégalités a révélé une forte présence régionale sur les questions d’inégalités et d’exclusion. Les politiques en matière de solidarité, de développement économique, de formation et d’emploi, de logement, de politique de la ville, de transports, de d’éducation et de culture attestent une présence forte de la région dans des territoires et auprès des populations en situation de fragilité.

L’examen de ces politiques régionales a aussi montré une certaine absence de transversalité dans la mise en œuvre des dispositifs de nature à nuire à la lisibilité du projet régional et à la compréhension des citoyens

• En matière de logement, la Région s’est fixée des objectifs ambitieux en allouant des moyens importants à la création de nouveaux logements sociaux ou intermédiaires (47 millions d’euros en 2004 et 240 000 nouveaux logements sociaux créés ou réhabilités d’ici 2010).

La Région ambitionne aujourd’hui de devenir un interlocuteur central pour les communes, les associations, les organismes HLM et les constructeurs, afin de faciliter l’accès à des logements décents, garantir un développement équilibré de l’offre dans les différences départements, d’améliorer l’état des logements et d’aider les jeunes à se loger (68,6 millions d’euros affectés au logement étudiant pour 2000-2006).

Le droit au logement pour tous, estime Jean-Luc LAURENT, vice-président chargé du Logement et de l’Action foncière, n’est cependant pas assez assuré. Des inégalités existent dans l’accès au logement que les différences de ressources entre les personnes ne suffisent pas à expliquer. Des inégalités de traitement liées, par exemple, à l’origine ethnique ou au handicap des candidats sont repérables dans l’accès au logement locatif.

Ces discriminations contribuent à l’entretien de processus de ségrégation et de ghettoïsation, aggravés par un fort déséquilibre dans la répartition du logement social en Ile-de-France où aujourd’hui 50% du logement social est concentré dans 10% seulement des communes de la Région.

• Dans le secteur de la solidarité, la Région a développé des dispositifs d’action contre les inégalités sociales et les situations d’exclusion. Ces actions visent à renforcer la solidarité entre les générations, à améliorer l’accompagnement social du handicap et l’accès aux droits fondamentaux. Des moyens importants ont été engagés dans le budget 2005 pour :

– l’aide au maintien à domicile des personnes âgées,
– l’accès à l’autonomie des personnes handicapées,
– favoriser l’intégration des personnes exclues via les centres d’accueil médico-social et médico-éducatif,
– l’hébergement des sans abris grâce aux centres d’accueil et soins hospitaliers (CASH) et centres d’hébergement et de réinsertion sociale,
– le soutien aux personnes en difficultés via des dispositifs d’accueil, d’écoute et de réinsertion pour les personnes en grande difficulté.

• En matière de développement économique, de formation et d’emploi, les cas de discrimination ethnique à l’embauche constituent selon Daniel BRUNEL, vice-président chargé de la Formation professionnelle, du développement économique et de l’Emploi, un problème réel. Plusieurs études récentes confirment l’existence de discriminations à l’embauche. L’enquête publiée en avril 2005 et réalisée par l’Observatoire des discriminations (Université Paris I), en collaboration avec l’entreprise de travail temporaire ADIA, est venue rappeler que l’âge, l’origine ethnique et le physique constituent des facteurs de discrimination importante sur le marché de l’emploi.

La Région a mis en place depuis 1998 de multiples dispositifs visant à favoriser la formation, l’orientation et l’insertion professionnelle des jeunes et des populations les plus vulnérables. Ces dispositifs socioéconomiques contribuent indirectement à la lutte contre les discriminations. On peut citer :

– Les Emplois-tremplins (10 000 prévus d’ici 2010) ouverts aux jeunes de moins de 26 ans, aux demandeurs d’emploi de plus de 45 ans et aux personnes handicapées ;
– Les Espaces dynamiques d’insertion s’adressant aux jeunes sans diplôme scolaire de 16 à 25 ans ;
– Les Plans locaux d’insertion par l’économie ;
– Les Chantiers-écoles et les Chantiers-d’insertion ;
– Les écoles de la seconde chance.

Selon Daniel BRUNEL, si la Région veut demain mieux lutter contre les discriminations en matière de formation et d’emploi il est nécessaire de s’orienter vers plus de cohérence des dispositifs et une approche plus « qualitative » dans les relations entre la Région et ses partenaires.

• En matière d’éducation et d’enseignement, les politiques de la Région affichent un objectif clair d’égalité d’accès de tous à la formation et aux études. De ce point de vue, un certain nombre de dispositifs participent d’une politique de promotion de l’égalité réelle :

– Le programme « Réussite pour tous » qui lutte contre le décrochage scolaire,
– L’Action pour la formation à des métiers reconnus,
– Les Lycées des métiers qui visent à renforcer les passerelles entre les filières technologiques et professionnelles
– Le Programme régional de financement d’études supérieures pour des lycéens boursiers sur critères sociaux, étudiant en Ile-de-France et obtenant la mention Très Bien au baccalauréat.

• En matière de transports, la question des inégalités de traitement est ponctuellement intégrée dans les projets dans la mesure où la Région prend conscience des phénomènes d’inégalité de traitement touchant en particulier les handicapés, les personnes âgées ou les parents accompagnés d’enfants en bas âge. La Région intervient ainsi pour des mises aux normes d’équipements :

– Bus subventionnés équipés de planchers surbaissés et d’espaces réservés aux personnes en fauteuil roulant,
– Extension du réseau PAM – Ile-de-France pour le transport des personnes handicapées, en coordination avec les départements (75, 94, 93)
– Aide forfaitaire pour l’achat de véhicules adaptés
– Installation dans les gares d’ascenseurs et de rampes surélevées, portes élargies, abaissement des guichets SNCF, information sonore et visuelle.

• En matière de culture, les acteurs de la politique régionale reconnaissent l’existence de mécanismes de discrimination limitant l’égalité d’accès de tous à la culture. Selon Francis PARNY, vice-président chargé de la Culture, des Nouvelles Technologies de l’Information et de la Communication, les discriminations sociales recoupent d’ailleurs souvent des discriminations culturelles ou identitaires. La Région finance aujourd’hui diverses actions visant à favoriser l’égalité d’accès à la culture et aux nouvelles technologies pour lutter contre la « fracture numérique » :

– Chèque culture, destiné à tous les lycéens et apprentis sans conditions de ressources,
– Soutien à la création à travers l’agence ARCADI (Action régionale pour la création artistique et la diffusion en ÃŽle-de-France)
– établissements publics numériques pour favoriser l’accès aux NTIC.

Une approche plus « qualitative » de la politique culturelle régionale, estime Francis PARNY, semblerait souhaitable aujourd’hui pour favoriser réellement l’accès de tous les publics. Cette approche qualitative devrait s’étendre aux mécanismes de subventionnement de la Région.

1.3. Des politiques régionales qui ne sont pas structurées par un objectif de lutte contre les discriminations

a) La lutte contre les discriminations n’est pas un objectif affiché des politiques régionales

La Région déploie d’importants moyens en faveur de la solidarité et de la lutte contre les inégalités sociales et l’exclusion. Mais un certain manque de lisibilité et de transversalité des politiques sectorielles tend sérieusement à limiter la portée de ces actions et ne permet pas à la politique régionale d’agir sur toutes les discriminations.

Les politiques régionales reposent sur une conception socioéconomique classique du traitement des inégalités sociales. Si des facteurs comme le handicap et le genre sont ponctuellement pris en compte, la question des discriminations ethniques ou raciales touchant des « minorités visibles » n’est en revanche pas aujourd’hui retenue dans la formulation des politiques régionales.

En pratique, un grand nombre de dispositifs orientés vers la réduction des inégalités sociales contribuent indirectement à corriger plus ou moins certaines discriminations. Il reste que ce n’est pas le principe sur lequel elles reposent.

La lutte contre les discriminations et pour la promotion de la diversité n’est donc pas aujourd’hui identifiée comme une priorité de l’action régionale et un axe structurant de ses politiques publiques.

b) … ni de la gestion des ressources humaines.

Comme dans la plupart des structures publiques où la très grande majorité des recrutements s’effectue sur concours, la prise en compte de la diversité ne va pas de soi à la Région Ile de France.

Il n’existe ainsi pas d’orientations visant à assurer un principe de diversité dans la gestion des personnels de la Région. On ne dispose d’ailleurs aujourd’hui d’aucune « photographie » sur la composition sociale, ethnique et culturelle des personnels de la Région.

Deux éléments pourrait ouvrir la possibilité d’une prise compte de cette diversité : d’une part, le transfert des TOS (8000 personnes) qui, en augmentant de manière très forte le vivier du personnel géré par la Région peut offrir de nouvelles opportunités, d’autre part, le renouvellement des postes laissés vacants par la vague de départs à la retraite en 2006.

Il n’existe pas non plus aujourd’hui de règles et de procédures formalisées pour assurer une parité hommes-femmes au sein de l’administration. Les femmes sont nettement sous-représentées aux échelons hiérarchiques supérieurs de l’administration. Elles le sont également aux postes de responsabilités (postes d’administrateurs et catégories A). Si la parité est respectée au niveau de l’exécutif, c’est en vertu d’une volonté politique du Président et non d’engagements publics auprès des citoyens. En revanche, on ne compte que deux femmes à des postes de directeur d’administration. Quant au quota de 6% de travailleurs handicapés il n’est pas respecté.

La lutte contre les discriminations et la promotion de l’égalité réelle ne sont pas placées actuellement en tête des priorités des syndicats du personnel de la Région Ile de France. Néanmoins ceux-ci sont pleinement conscients que l’intégration des TOS et les départs en retraite offrent l’opportunité de mise en place d’une politique plus volontariste concernant l’accès de groupes sous-représentés aux postes de responsabilité ou dans le cadre des nouveaux recrutements. La question de l’accès des femmes aux postes de responsabilité a été particulièrement soulignée par les syndicats dans les entretiens.

De manière générale les syndicats sont réceptifs à l’idée d’une exemplarité des pratiques régionales en ce domaine mais soulignent la nécessité de respecter les règles d’accès à la fonction publique et donc l’étroitesse de la marge de manœuvre, ce qui rejoint les préoccupations des gestionnaires.

En interne, le comité de pilotage a estimé que la mise en place d’une politique exemplaire et efficace de lutte contre les inégalités de traitement devrait être inspirée par un objectif de diversité, tant pour la composition générale des personnels que pour les procédures de nomination aux postes de responsabilité. Il faudrait ouvrir la fonction publique à l’idée de diversité, mais le comité de pilotage ne préconise pas l’instauration d’une politique de « quotas », les principes de compétence et de statut devant demeurer les critères principaux des décisions de recrutement et de promotion.

Les causes identifiées pour rendre compte des difficultés à intégrer la lutte contre les discriminations dans les politiques régionales

Le comité de pilotage a recensé à travers les auditions plusieurs facteurs permettant d’expliquer pourquoi la lutte contre les discriminations semble aujourd’hui se heurter à des difficultés pour s’imposer réellement comme priorité de la politique régionale:

– des difficultés de principe : refus de la « fragmentation » de la société, de l’ « ethnicisation » de la question sociale et d’une approche ciblée contre les inégalités à partir de catégories. La sensibilité politique de ces questions a pu jouer contre l’ouverture de débats opérationnels ;
– des compétences limitées ou inadaptées à la lutte contre les discriminations : la Région collectivité de gestion ne saurait s’impliquer sur un domaine national pour la symbolique et relevant d’actions de terrain plus locales ;
– une politique régionale dont l’identité et le projet ne sont pas assez visibles ;
– un manque de transversalité entre les secteurs de la politique régionale
– des actions régionales qui n’intègrent pas assez des critères « qualitatifs » quant aux caractéristiques des populations et des territoires à soutenir en priorité.

Il est apparu au travers des auditions que pour nombre des personnes interrogées c’est la segmentation de l’action publique crée de la discrimination. Les politiques régionales (ville, formation, solidarités) se déploient trop souvent en parallèle. Or, comme le déclare un vice-président auditionné sur ce point précis « des petits bouts de politiques ne font pas une politique régionale » et encore moins une politique efficace contre les discriminations.

2. Faire progresser les analyses sur les conditions d’une égalité réelle pour orienter les politiques régionales vers une approche plus ciblée et plus « qualitative »

2.1. Faire de la lutte contre les discriminations et pour l’égalité des droits un axe de la politique régionale

L’ensemble des personnes auditionnées considèrent que la mise en place d’une action régionale doit être soutenue par l’affirmation d’une volonté politique claire du Président de la région, de l’ensemble de l’exécutif et de l’Assemblée régionale de faire de la lutte contre les discriminations un axe identifiant de sa politique.

Cette volonté politique a été réaffirmée par Jean-Paul HUCHON lors de la première réunion du comité de pilotage le 10 février 2005. Mais l’investissement en ce domaine devra être confirmé, particulièrement au moment de la mise en place du Conseil régional de l’égalité dont la création devrait s’appuyer sur un programme politique précis pour la mandature en privilégiant en ou deux axes clé.

Il s’agit en effet d’une question très sensible et d’un sujet sur lequel les associations et plus largement les personnes concernées redoutent des engagements sans lendemain. Dans cette perspective la possibilité d’afficher un engagement de long terme est essentielle au-delà des annonces médiatiques.

Cette volonté politique doit exprimer la détermination de rapprocher au niveau régional les discours et les actes et de répondre à des attentes sociales qui s’expriment de plus en plus ouvertement. Elle doit faire la preuve de la pertinence de l’échelon régional pour agir dans la lutte contre les discriminations.

Construire un discours cohérent et volontaire sur les discriminations. C’est une première étape indispensable. La Région doit expliquer dans quelle mesure une politique de lutte contre les discriminations orientées vers les populations vulnérables et fragilisées s’inscrit logiquement dans une politique de lutte contre les inégalités vise réellement à l’intérêt général – solidarité entre les populations et équilibre des territoires – et non pas à servir des « clientèles ».

Il existe un lien étroit entre l’idée d’égalité et l’idée de justice, bien que celui-ci ne soit pas toujours aisé à établir. Or, la lutte contre les discriminations et pour une égalité réelle peut permettre d’opérer une synthèse entre la revendication d’égalité et le respect d’un principe de justice.

La lutte contre les discriminations, la promotion de la diversité et l’accès aux droits sont liés. Il convient de ce point de vue d’imaginer une articulation entre droit à la différence et égalité des droits pour renouveler la manière de penser « l’égalité des chances ». Dans ses actions, la région doit tendre généralement vers un élargissement de l’offre et de la demande pour faire justice à la diversité démographique et territoriale de l’Ile-de-France.

Une politique de lutte contre les discriminations et pour la promotion de la diversité doit être portée par un discours républicain marquant le refus de toute approche communautariste. Il faut asseoir l’idée que la lutte contre les discriminations vise à défendre des droits individuels sociaux, politiques ou culturels, et non des droits communautaires. Il faut refuser l’attribution de droits collectifs et adopter clairement une position « républicaine ».

Lutter contre les discriminations, c’est restaurer l’égalité de traitement dans une approche compatible avec l’universalisme républicain. Il faut être clair dans l’usage des catégories identitaires en convainquant que repérer des groupes victimes de discrimination ce n’est pas « ethniciser » la question sociale, ni « compartimenter » la société française. Cette pédagogie contribuera à désamorcer les fortes méfiances à l’égard des politiques dites d’ « équité » qui n’entrent pas fondamentalement en contradiction le principe d’égalité devant la loi, comme le rappelait dans son argumentation le Conseil d’état en 1996 (Sur le principe d’égalité).

La lutte contre les inégalités sociales et celle contre les discriminations sont complémentaires. Il n’y a pas de contradiction entre la conception républicaine de l’égalité, la lutte contre l’exclusion et pour l’égalité des droits et la lutte contre les discriminations. Ces différents éléments participent d’une même approche pour donner à l’égalité une portée réelle.

2.2. Promouvoir des politiques publiques ciblées et affirmer l’exemplarité de la Région

a) Développer l’exemplarité de la Région

La Région doit faire preuve d’exemplarité dans ses relations avec ses partenaires. Il lui faut développer des critères transparents et clairs dans l’attribution des subventions et des conventions qui traduiront la volonté de la Région d’agir de manière équitable avec ses partenaires et incarneront l’identité de la politique régionale. L’hypothèse de l’élaboration d’une charte de non-discrimination, fixant des principes généraux et s’appliquant aux demandes de subventions soumises à la Région a été plusieurs fois suggérées.

La lutte contre les discriminations et pour la promotion de la diversité devrait être une priorité de la Région dans la gestion interne de ses personnels. De ce point de vue, la Région pourrait être un laboratoire pour l’ensemble des collectivités locales. Elle pourrait s’orienter vers la mise en place de dispositifs particuliers pour traduire dans les faits la notion de non-discrimination. La question des « résultats » en matière de promotion de la diversité ne doit pas être un impératif de l’action. Il s’agit d’abord de mener une politique visible de non-discrimination qui ne s’appréciera pas dans ses résultats à court terme, mais à long terme par un changement des pratiques. L’objectif est de faire progresser la prise de conscience et la mobilisation des acteurs et des partenaires de la Région sur ces questions.

En matière de gestion des ressources humaines, la Région devrait encourager un débat sur les « discriminations légales » et les procédures recrutements des personnels territoriaux. De ce point de vue, la Région pourrait élaborer une charte de qualité de non-discrimination propre à la Région. En interne, la Région pourrait envisager des mesures pragmatiques de révision des procédures d’embauche pour parvenir à des procédures non-discriminantes et définir des protocoles pour les entreprises candidates aux marchés publics de la Région.

b) Faire progresser les connaissances sur les pratiques discriminatoires

Pour développer une politique de lutte contre les discriminations et d’égalité d’accès aux droits communs, il est impératif de faire progresser la connaissance des phénomènes impliqués. Des études statistiques et qualitatives sont nécessaires pour cerner l’ampleur et la nature des discriminations. Des données statistiques sont jugées nécessaires pour :

– Objectiver les discriminations et la « plainte sociale ou communautaire » ;
– Construire des dispositifs anti-discriminatoires adaptés ;
– évaluer leur efficacité.

La production de statistiques ne peut être un objectif à court terme de la Région qui ne dispose aujourd’hui ni des moyens, ni des compétences pour développer son propre appareil statistique. En revanche, celle-ci devrait pouvoir user de son poids pour avancer des propositions visant à faire évoluer l’appareil statistique au niveau national. La Région pourrait assumer un rôle pilote et de laboratoire sur la question des statistiques en engageant des discussions avec les organismes publics et sociaux qui produisent des statistiques (CAF, INSEE).

Le système de production statistique reste en France très étatique et centralisé. Les collectivités locales n’ont pas aujourd’hui les moyens de produire des données pourtant nécessaires. Certaines enquêtes récentes de l’INSEE mettent l’accent sur les questions d’origine. La région pourrait marquer sa disponibilité à encourager ce mouvement qui répond à des attentes réelles du milieu de la recherche.

Il n’en demeure pas moins aujourd’hui une autocensure sur la question des catégories identitaires qui reste taboue. Or, on peut produire des données statistiques sans enfreindre la réglementation de la CNIL. Ces évolutions statistiques doivent s’accompagner d’efforts de pédagogie et de sensibilisation des différents acteurs sur l’utilité et la finalité des catégories.

La Région doit disposer de ses propres chiffres pour repérer les discriminations, élaborer des politiques anti-discriminatoires et en évaluer l’efficacité. Le comité de pilotage insiste sur la nécessité de disposer de statistiques notamment pour remédier aux discriminations « indirectes » ou « systémique », c’est-à-dire aux « discriminations générées par des procédures en apparence neutres, qui ne révèlent leur caractère discriminatoire que par les effets inégalitaires et « significatifs » (c’est-à-dire qu’ils ne peuvent pas être imputé au hasard) qu’elles produisent sur un groupe en référence à un autre » (Patrick SIMON, rapport MEDIS, 2004).
Des études qualitatives devraient enfin permettre de saisir le vécu subjectif des acteurs dans les discriminations.

c) Développer des politiques publiques ciblées ou d’« équité », centrées sur les besoins des personnes et des territoires

Développer des politiques régionales « qualitatives ». La lutte contre les discriminations transforme la manière de concevoir les politiques publiques. L’objectif d’une politique anti-discriminatoire doit être irrigué par un principe d’ « équité » : « donner plus à ceux qui ont moins ». Cela implique d’admettre des politiques plus qualitatives et plus ciblées vers des populations et des territoires. Centrer les politiques régionales sur les besoins des personnes et les territoires, c’est développer des politiques spécifiques prenant en compte la vulnérabilité plus forte de populations et de territoires particuliers.

Principe d’« équité ». L’équité reste une notion controversée dans le débat public, car souvent opposée à la conception républicaine de l’égalité et assimilée à la « discrimination positive ». L’analyse du Conseil d’état en 1996 a permis d’éclairer en partie le débat en rappelant que la France a pratiqué depuis le début des années 80 des politiques dites d’« équité » (ZEP). Le principe d’ « équité » n’est pas un substitut ou une alternative à l’idée d’égalité devant la loi de tous les citoyens. Entre un égalitarisme républicain pouvant se montrer aveugle aux différences de situations et de statuts et un communautarisme menant tout droit vers une « démocratie des ghettos », l’équité propose une voie médiane par un principe de proportionnalité des actions et d’allocation différenciée des moyens. Une vision plus équitable de l’égalité ouvrirait la voie à une rénovation du républicanisme et de l’action politique, au service d’un universalisme concret et d’un idéal d’égalité réelle.

En pratique, l’équité peut viser plusieurs objectifs :
– Assurer la neutralité des procédures (impartialité).
– Promouvoir des groupes sous-représentés par des mécanismes incitatifs agissant sur la sous-représentation des groupes désignés (« outreach »).
– Compenser un handicap historique par des mesures préférentielles contournant le système de concurrence libre et non faussée.

Pour la Région, viser un principe d’équité pourrait concrètement consister à regarder si les dispositifs existants qui fonctionnent de manière différenciés selon des critères de socioéconomiques (revenus) ne génèrent pas des mécanismes de discrimination. Il faut se demander si la conception du droit social a des effets discriminants et pourquoi, par exemple, certaines personnes ne recourent pas au droit. Quels sont les critères et problématiques non explicites dans les procédures et les circuits officiels qui génèrent un sentiment d’inégalité de traitement ? Il s’agirait alors pour la Région de passer au crible l’ensemble de ses actions en se demandant si elles permettent l’accès de tous au droit commun. Il apparaîtra sans doute alors qu’il faudrait prendre en compte des problématiques et des besoins spécifiques dans les politiques régionales pour qu’elles fassent droit à la diversité des situations.

Logique des politiques anti-discriminatoires. La lutte contre les discriminations nécessite un renouvellement profond de la manière de concevoir les politiques publiques et sociales de réparation. Les politiques anti-discriminatoires sont centrées sur les individus et requièrent pour leur élaboration et leur mise en œuvre une coopération constante entre les pouvoirs publics et la société civile. Si le politique assume seul la mise en œuvre opérationnelle, c’est l’échec assuré.

Promouvoir le principe du « mieux-disant social ». Un grand nombre des personnes auditionnées se déclarent disposées à soutenir la promotion de politiques ciblées fondées sur des critères qualitatifs.
De telles politiques, remarque Daniel BRUNEL, pourrait impliquer une réforme du code des marchés publics qui privilégie aujourd’hui systématiquement le « mieux-disant économique » sur le « mieux-disant social ». La Région pourrait promouvoir des politiques d’ « équité » sans avoir à craindre de porter atteinte à l’égalité républicaine (voir avis du Conseil d’état, 1996). Des politiques publiques fondées sur un principe d’équité viseraient justement à rétablir des conditions réelles d’égalité aujourd’hui mises à mal.

Agir sur les discriminations par une action transversale. La lutte contre les discriminations et pour une égalité réelle requiert une plus grande transversalité dans les politiques publiques de la Région pour une action globale contre les discriminations. Cette transversalité ferait de la lutte contre les discriminations un axe structurant de la politique régionale.

Lutte contre les discriminations et relations entre politique et administration. La lutte contre les discriminations suppose aussi une meilleure association entre le politique chargé de fixer des objectifs et les services qui doivent les mettre en œuvre. La lutte contre les discriminations requiert donc de concevoir dans le cadre de la réorganisation des services des meilleures méthodes de travail pour mieux associer l’administration à l’élaboration des politiques régionales.

Favoriser l’accès aux droits communs. Le but doit être de faire de l’accès aux droits communs une priorité des politiques régionales. Les politiques de lutte contre les discriminations doivent favoriser l’accès de toutes les personnes aux droits communs. Favoriser une approche universelle des discriminations tout en trouvant les moyens de concilier approches sectorielle/transversale, spécifique/globale. Ce serait là, d’une certaine manière, s’orienter résolument vers un universalisme en actes.

Lutte contre les discriminations et promotion de la diversité. Le comité de pilotage insiste sur le fait que la lutte contre les discriminations ne peut être séparée d’une politique de promotion de la diversité. La politique régionale doit montrer sa capacité à prendre en compte les questions de l’altérité et de la diversité dans la construction des politiques publiques.

Mutualiser savoirs et pratiques et coordonner l’action contre les discriminations au niveau régional. Un objectif pratique de la Région et une des missions du Conseil régional de l’égalité devrait consister à développer des partenariats et des conventions sur la base d’objectifs « qualitatifs » précis. Associer les autres collectivités territoriales, les syndicats, les associations à la mise en œuvre d’une politique de lutte contre les discriminations. La Région doit s’appuyer sur les collectivités locales et les associations à travers des partenariats. Favoriser la mise en réseau des acteurs, coordonner les actions et mutualiser les bonnes pratiques.

Passer d’un rôle de bailleur à celui d’initiateur. Plusieurs vice-présidents ont souligné la nécessité pour la Région de se doter d’instruments d’incitation et de rétorsion, notamment en matière de logement. On pourrait ainsi introduire des critères qualitatifs dans les procédures de conventionnement pour promouvoir une réelle « mixité social », la diversification de l’habitat. En matière d’emploi et de formation, la Région pourrait favoriser une meilleure adéquation entre la formation et les besoins des entreprises. D’une manière générale, la Région ne doit plus se cantonner dans un simple rôle de « tiroir-caisse ».

3. Le Conseil régional de l’égalité comme instrument d’une politique régionale globale de lutte contre les discriminations et d’accès aux droits communs

3.1. Quelle place pour une instance régionale de lutte contre les discriminations ?

Le comité de pilotage est convaincu que le CRE doit avoir pour objectif de travailler en bonne intelligence avec la HALDE. Il ne devra ni se placer en concurrent ni se cantonner dans un rôle d’antenne régionale de la HALDE, mais agir en complémentarité, sur des terrains où la HALDE n’interviendra pas. À la HALDE serait ainsi laissés la médiation, l’instruction et le traitement des plaintes pour discrimination, au CRE reviendrait le rôle de proposer des actions concrètes de correction et de réparation avec l’avantage de pouvoir s’appuyer sur les moyens de la Région comme lieu de conception et d’application.

De l’avis général, il y a place pour une instance régionale de lutte contre les discriminations qui s’engagerait dans des actions concrètes de correction des discriminations. Des représentations régionales de la HALDE ont été prévues par le législateur, mais pour l’instant il n’y a pas de décisions précises ni de projets d’implantation définis. Il n’est pas sûr en outre que l’ÃŽle-de-France serait in fine retenue.

Dans ses propositions pour l’organisation et le fonctionnement du Conseil régional de l’égalité, le comité de pilotage a prêté une attention particulière aux critiques émises par les associations à l’égard la HALDE. Regroupées au sein d’un Collectif pour une autorité indépendante et universelle de lutte contre les discriminations, elles déplorent leur mise à l’écart pendant l’élaboration du projet, l’absence de représentation de la société civile au sein de la HALDE et un manque de moyens Les associations regrettent que la HALDE se soit positionnée comme une structure de médiation, au lieu de privilégier le renforcement des sanctions et les menaces de sanction. La légitimité et l’efficacité du Conseil régional de l’égalité commandent qu’il travaille avec les associations et tiennent compte des critiques émises par les associations, notamment en ce qui concerne :

– Les doutes sur la volonté réelle des pouvoirs publics de faire de la HALDE un outil efficace et permanent dans la lutte contre les discriminations ;
– La faiblesse des pouvoirs du comité consultatif composé de représentants associatifs et d’experts au nombre limité (18) et sans autonomie ;
– L’incertitude quant à l’existence de délégations régionales qui constitueraient un relais local indispensable pour aider les victimes de discriminations dans leurs démarches et coordonner les acteurs locaux ;
– L’absence d’intégration de la « HALDE » dans une politique globale de lutte contre les discriminations

Les associations ont exprimé de fortes attentes à l’égard d’une Autorité de lutte contre les discriminations, mais elles souhaitent une autorité inscrite dans un dispositif global de lutte contre les discriminations (législateur, juge, gouvernement, acteurs locaux) ; unique ; universelle ; dotée de pouvoirs réels ; indépendante ; dotée de réels moyens « humains et financiers à la hauteur de ses ambitions pour ses services centraux et les représentations indispensables dont elle doit disposer au niveau local ».

3.2. Statut et missions du CRE

L’autorité régionale doit fixer au CRE un objectif d’efficacité. Il devra s’agir de traduire rapidement le principe d’égalité réelle dans les politiques régionales, car il n’y aurait rien de pire que de se limiter à des mesures d’affichage non suivies d’action concrètes.

Il faut que le CRE soit une instance doté de moyens suffisants. D’une manière générale, il devrait être en mesure d’anticiper sur les limites de l’action de l’Etat et inciter la région à y suppléer.

Le CRE agira sur saisine du Conseil régional pour réfléchir et formuler des propositions d’actions sur des problèmes précis touchant aux discriminations et à l’égalité de traitement des personnes. Le CRE bénéficiera aussi d’un droit d’autosaisine lui permettant d’interpeller le Conseil régional sur des thèmes de travail qui lui sembleront présenter une urgence particulière. Le CRE s’organisera en groupes de travail en fonction de thèmes d’études et de recherches définis par ses membres et les élus de la Région dans le cadre d’un programme annuel, mais pourra être ponctuellement saisi de questions particulières.

Le CRE doit assurer en son sein une expression satisfaisante de la société civile : associations, syndicats, entrepreneurs, acteurs intervenants dans les secteurs du logement, de l’emploi, de la formation, des transports,… L’organisation d’un Conseil régional de l’égalité devra concilier la volonté des associations d’être consultée et le refus de la plupart d’entre elles d’être instrumentalisées par les pouvoirs publics.

Les responsables d’association auditionnées ne font pas de leur appartenance permanente au Conseil régional de l’égalité une exigence impérative, mais souhaitent être associés de près au travail du Conseil régional de l’égalité : en amont, dans le cadre des groupes de travail et des auditions, en aval, dans la mise en œuvre sur le terrain des politiques anti-discriminatoires de la Région. Les associations auront ainsi un statut de partenaires privilégiés. La nomination au Conseil régional de l’égalité de représentants associations généralistes, partageant avec l’institution régionale une approche universelle et transversale des discriminations, pourra éventuellement être envisagée.

Entre l’instruction et la médiation, missions assignées à la HALDE, le Conseil régional de l’égalité devrait promouvoir des actions de prévention et de réparation des discriminations, dans une approche globale des inégalités de traitement évitant une approche éclatée et au coup par coup.

La principale mission du CRE sera de faire valoir l’objectif de lutte contre les discriminations et d’égalité d’accès aux droits dans le cadre de la politique régionale. Il doit s’ériger en instance de propositions opérationnelles à l’égard de l’exécutif et d’incitation pour des actions de terrain. Ses principales missions seront :

– Aide à la réflexion pour les élus
– Sensibilisation et animation du débat public
– Formation
– Mutualiser les bonnes pratiques
– Interpeller les politiques et proposer des orientations
– Impulser des actions dans le cadre des politiques régionales

Concrètement, le CRE devra produire des recommandations opérationnelles pour les politiques régionales, en matière de politique du logement ; d’utilisation des emplois tremplins pour lutter contre les discriminations à l’embauche ; initier la réflexion sur une Charte de la diversité adaptée aux collectivités locales ; élaboration d’une charte de bonne conduite entre la Région, les entreprises et les collectivités locales ; élaboration de critères anti-discriminatoires pour les procédures de subvention de la Région ; de politique de la Région comme employeur et règles de discipline interne anti-discriminatoire.

3.3. Organisations et compétences
Le comité de pilotage préconise une structure légère et simple, composée de 15 à 20 personnes réunies en Conseil d’administration et d’orientation.

Les nominations au Conseil régional de l’égalité seront décidées par le Président de la Région, en concertation avec la Vice-présidente en charge de la démocratie régionale, de la Présidente de la Commission démocratie régionale et jeunesse et de la Déléguée à l’égalité réelle.

Pour la production de données statistiques et qualitatives, sera créée une « Unité régionale d’études et recherches sur les discriminations » éventuellement à partir d’un élargissement des missions et d’un renforcement des moyens de la MIPES et de l’IAURIF et de partenariats avec CAF, INSEE, DREES.

Les compétences du CRE :
– en amont : veille, avis et recommandations ; développement des connaissances sur les discriminations en Ile-de-France
– pendant : suivi des politiques régionales de lutte contre les discriminations ; assistance aux élus et aux services de la Région
– en aval : évaluation des résultats des politiques régionales dans leur capacité à réduire les discriminations.

Le CRE travaillera à partir d’axes de travail concrets pour être vite opérationnel et éviter un suivi des discriminations favorisant des catégories séparées. Il devra débattre et arrêter chaque année un programme de travail fixant des axes prioritaires donnant lieu à la formation de groupes de projet thématiques. Rapidement, il pourra organiser des états généraux de la discrimination pour faire apparaître les points communs, les évolutions, la nature des actions à mener.

Le CRE prêtera une attention particulière aux champs correspondant aux compétencesde la Région (logement, formation, emploi, territoires et villes, travail et entreprise, lycées,…) mais il se montrera avant tout sensible des « pratiques discriminatoires », afin de surveiller si le principe d’égalité est respectée et, dans le cadre contraire, de proposer des solutions pour remédier à cette rupture concrète d’égalité.

Le CRE travaillera en concertation avec les autres instances régionales de démocratie représentatives, sur la base d’échanges d’information et de collaboration conjointe à des groupes de travail :
– Conseil associé des résidents étrangers
– Conseil consultatif des citoyens handicapés
– Conseil régional de la jeunesse
– Observatoire francilien des engagements

Annexe 1
Bibliographie sélective

>> « Plate-forme du Collectif pour une autorité indépendante et universelle de lutte contre les discriminations ».
>> « Charte de la diversité », Institut Montaigne.
>> Conseil d’état, Sur le principe d’égalité, 1996
>> Projet de délibération CRE novembre 2004
>> « Chiffres clés pour la région Ile-de-France », IAURIF – INSEE Ile-de-France, 2005
>> « Pauvreté et précarité en Ile-de-France en 2003 – Dossier de travail », MIPES, février 2005
>> « Recueil statistique relatif à la pauvreté et à la précarité en Ile-de-France (2003) », MIPES, 2005.
>> Rapport « Projet MEDIS – Mesure des discriminations, UE, 2004
>> « Qu’est-ce que la discrimination positive », Conseil d’analyse de la société, avril 2005

Annexe 2
Composition du comité de pilotage
8 personnes dont :
– deux chercheurs (Patrick Simon et Philippe Bataille) ayant participé à la mise en place de différents dispositifs publics de lutte contre les discriminations (Groupe d’études et de lutte contre les discriminations : GELD, Haute Autorité de lutte contre les discriminations : HALDE).

– Leurs travaux ont porté sur les questions de logement et de l’entreprise (Simon), l’emploi et la santé (Bataille). Ils sont par ailleurs reconnus au niveau européen et international. De sensibilité de gauche ils sont de plus en plus ouvertement sollicités par la droite (colloque de l’UMP le 9 juin) ;

– trois représentants d’associations (collectif des femmes, SOS homophobie, réseau Prismes sur l’éducation) : Jean Roucou, (PRISME) Chris Calvet, Maria Candéa

– Une spécialiste des questions de l’entreprise et de l’emploi (Mina Djaad)

– Deux personnes travaillant de manière opérationnelle sur la question des territoires : Maria Cunha (actuellement au Fasild, créatrice dans les années 90 de la démarche Banlieuscopies) et Laurence Méhaignerie chargée de mission à l’ANRU co-auteur du rapport sur Les oubliés de l’égalité des chances.

Annexe 3
Liste des auditions réalisées par le comité de pilotage
du Conseil régional de l’égalité

1) Personnalités qualifiées
• Philippe BATAILLE, sociologue, CADIS – Centre d’Analyse et d’Intervention Sociologiques (21 avril 2005)

• Maria CUNHA, Chargée mission au FASILD

• Michel CASTELLAN et Annie MENDEZ, Mission d’Information sur la pauvreté et l’exclusion sociale en Ile-de-France (11 avril 2005)

• Laurence MéHAIGNERIE, Agence nationale pour la rénovation urbaine et Institut Montaigne (19 avril 2005)

• Patrick SIMON, chercheur à l’INED (13 mai 2005)

2) Vice-présidents et responsables des services
• Francine BAVAY, vice-présidente en charge des solidarités

• Daniel BRUNEL, Vice-président chargé de la Formation professionnelle, du développement économique et de l’Emploi (20 avril 2005)

Elisabeth GOUREVITCH Vice présidente en charge chargée des lycées et des politiques éducatives

• Francis PARNY, Vice-président chargé de la Culture, des Nouvelles Technologies de l’Information et de la Communication (12 avril 2005)

• Jean-Luc LAURENT, vice-président chargé du Logement et de l’Action foncière (5 avril 2005)

• Marc LIPINSKI, vice-président en charge de l’enseignement supérieur et de la recherche

• Marie RICHARD, vice-présidente en charge des sports

• Michèle SABBAN, Vice-présidente chargée de l’Administration générale, du Personnel et des marchés publics (11 avril 2005)

• Claire VILLIERS, vice-présidente en charge de la démocratie régionale et de la jeunesse

• Sophie MOUGARD, directrice générale des services (15 avril 2005)

• Delphine BATHO et Malik LOUNES, chargés de mission auprès du vice-président en charge de la politique de la ville et de la sécurité

3) Auditions réalisées dans le cadre de la Commission Démocratie régionale et jeunesse
• Maria CANDéA, représentante du CNDF – Collectif national du droit des femmes (1er décembre 2004)

• Daniel SABBAGH, chargé de recherche, CERI – Centre d’études et de Recherches Internationales (8 décembre 2004)

• Michel TUBIANA, Président de la Ligue des Droits de l’Homme (8 décembre 2004)

• éric FASSIN, Chercheur spécialiste des questions discriminations

4) Syndicats auditionnés
• CFDT : Fathia AMROUCHE, secrétaire de la section CFDT, élue en Commission administrative paritaire (CAP), Vincent MOUTARDE, secrétaire adjoint

• CGT : Anne-Marie LASPOUGEAS, secrétaire de la section CGT, Isabelle REVERDY, suppléante

• UNSA : Vincent RAPHANAUD, Président de la section UNSA, Guy-Jack PERRIN, vice-président

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