PRomotion des Initiatives Sociales en Milieux Educatifs

In Centre Alain Savary – Education prioritaire – IFE – Juin 2014 :

Accéder au site source de notre article.


Cette première séance a permis de poser le cadre du séminaire, de porter un regard historique sur l’enchevêtrement des dispositifs éducatifs, et d’échanger sur les freins et leviers du partenariat éducatif sur les territoires prioritaires.

Sommaire
  1. Introduction, Patrick Picard
  2. Tour de table des participants
  3. Histoire des partenariats éducatifs
    1. Les années 80 : une lente montée d’un éducatif local par différents canaux
    2. Deuxième moment : l’affermissement du moment contractuel et la montée du Projet Educatif Local
    3. 3ème moment : la réussite éducative
    4. 4ème moment : l’éclatement et la recomposition 2013
    5. L’actualité : les PEDT
    6. Des questionnements…
    7. Débat avec les participants
  4. Une expérience de construction partenariale locale : construire progressivement une représentation partagée des problèmes éducatifs, Stéphane Kus
    1. Débat avec les participants

Introduction, Patrick Picard

couv-rapport-QVP-2014

Pour introduire le séminaire, Patrick Picard a rappelé comment le centre Alain-Savary concevait sa mission. Une attention particulière est mise au service des enfants socialement défavorisés en postulant que c’est du côté du travail réel des professionnels que les choses se passent. Les enquêtes PISA montrent bien que la France décroche du côté de la réussite de ses élèves et que le concept d’égalité vole en éclat : les enfants pauvres et/ou issus de l’immigration ont moins de chance de réussir que les autres. Cela oblige à changer de paradigme. Mais il ne suffit pas de prescrire le changement pour qu’il s’opère. Il faut tenter de reconsidérer le travail même des éducateurs, les différences de logique qui coexistent entre la logique du projet et les logiques de statut, les confrontations de normes que l’entrée par les enjeux de territoire amène. Différents niveaux d’analyse sont à distinguer alors. Au premier niveau, il s’agit de comprendre pourquoi des élèves ont du mal à entrer dans les apprentissages. Au second niveau, il s’agit de saisir com-ment les différents acteurs à l’échelle d’un territoire se confrontent à ce problème. Au troisième niveau, il s’agit d’aider les différents pilotes propres aux différentes institutions concernées à travailler ensemble pour tenter d’apporter des solutions à ce problème. Cela implique d’articuler chaque fois la dimension nationale de l’éducation, sa dimension académique et sa dimension locale.

Tour de table des participants

Puis le tour de table des participants a permis de pointer les attendus suivants :

  • Comment optimiser la démultiplication des partenariats ?
  • Comment accompagner les sites en politique de la ville qui vont sortir de la géographie prioritaire ?
  • Comment renforcer les liens entre les politiques d’accompagnement à la parentalité et les politiques éducatives ?
  • Comment dans le partenariat avec l’Education nationale sortir de la seule logique de prestataire ?
  • Comment faire vivre dans les partenariats un véritable débat sur le fond des politiques locales menées ?
  • Comment faire pour que les partenariats départementaux puissent irriguer les terrains ?
  • Comment construire en partenariat la prise en compte de la globalité de l’enfant ?
  • Comment décliner les volontés partenariales à tous les échelons institutionnels (du terrain au politique en passant par les cadres intermédiaires) ? 
  • Comment mieux piloter l’ensemble des politiques menées et surtout quel est le bon niveau de pilotage ?

Histoire des partenariats éducatifs

Jean-Marc Berthet a présenté un premier exposé relatif à l’histoire des partenariats éducatifs.  La lente montée en régime des politiques éducatives territoriales a connu de nombreuses circonvolutions dont la notion de PEL (Projet Educatif Local) témoigne dans la manière dont il a été mobilisé. On pourrait en faire une approche en 4 temps. 

Les années 80 : une lente montée d’un éducatif local par différents canaux

Les années 1980 sont le moment où se re-problématise la notion d’échec scolaire. Jusqu’à présent, celui-ci faisait peu sens. Finalement, l’école acceptait de laisser sur ses bords de nombreux élèves dont elle savait qu’ils trouveraient place dans la société via le travail. Dans les années 1980 cette situation devient inacceptable. Parallèlement, la première décentralisation ouvre un espace pour que les collectivités se saisissent des questions de scolarité, mais cet espace se construit forcément comme une critique de l’institution scolaire qui se demande bien pourquoi les collectivités seraient mieux à même qu’elle de résoudre une question qui est de son ressort. Là s’enclenche une difficulté structurelle dans les liens de l’école à son environnement… La volonté des collectivités locales de s’emparer de la question scolaire (volonté d’autant plus affirmée aujourd’hui que si la dépense éducative représente 7% du PIB, la part des collectivités est de 25% ce qui n’est pas rien…) est en effet très ancienne : historiquement, nombre d’entre elles se sont saisies de la question scolaire en insistant en particulier sur les rythmes scolaires des enfants et sur leur adéquation avec les activités extra-scolaires ou périscolaires. Hérouville-Saint-Clair, Saint-Fons dans les années 1970, Epinal dans les années 1980 ont été à la pointe sur ces sujets.

Dans les années 1980 toujours, la mise en place des ZEP a permis une ouverture de l’école vers son environnement extérieur avec des réussites diverses mais avec surtout une difficulté à capitaliser de manière institutionnelle la somme des expériences menées que ce soit du côté de l’Education Nationale mais aussi des collectivités locales. Pour le dire autrement, le dispositif a été faiblement repris par l’institution Education Nationale et la capitalisation a été laissée aux personnes qui avaient pu travailler en ZEP… Il faut revenir un peu sur les ZEP, c’est au sein de l’institution la plus extraterritoriale dans son fonctionnement que se met en place le premier dispositif de discrimination positive territoriale. S’ouvre à cette époque un espace à la périphérie de l’école autour de l’accompagnement à la scolarité : cela vaudra des batailles homériques entre le monde enseignant et les promoteurs de ces espaces après la classe qui restent souvent stériles… Mais les dispositifs continuent à se diffuser : AEPS sur la périphérie, tentatives d’aménagement des rythmes de vie de l’enfant (CATE, ARVEJ, contrats bleus[1]…).

Mais on peut dire que l’éducatif local d’emblée se trouve en contradiction dans les termes : l’éducation est nationale donc le local est illégitime à traiter les questions éducatives… Cette tendance, on la retrouve encore lorsque la réforme des rythmes est accusée d’engendrer des formes de privatisation de l’école, comme si la nouvelle place donnée aux communes et donc au local relevait du privatisme. Il y a là, la vieille trame républicaine qui a rejeté dans le privé et l’illégitimité tous les localismes…

Deuxième moment : l’affermissement du moment contractuel et la montée du Projet Educatif Local

Dans les années 1990, la mise en place quasi concomitante de nouvelles politiques contractuelles menées par l’Etat (Contrat Educatif Local) et par la CNAF (Contrat Temps Libres) a permis d’affermir la nécessité d’un projet territorial autour des questions éducatives qui ne soit pas strictement à visée des quartiers en difficultés mais qui concerne bien l’ensemble des populations jeunes d’une commune. La notion de PEL s’est alors largement développée dans la suite de ces politiques contractuelles en réduisant bien souvent le PEL à la somme de ces deux contrats sans que la notion de projet de territoire, ne soit toujours bien pensée dans ses aspects d’équité territoriale et sans que les questions éducatives ne soient vraiment abordées : la rhétorique contractuelle avait parfois pour effet de diluer tout débat relatif à l’acte éducatif.

3ème moment : la réussite éducative

L’arrivée de la réussite éducative en 2005 a sensiblement modifié la donne. Sa principale nouveauté résidait en effet dans la notion de parcours éducatif individualisé et de personnalisation du soutien apporté aux enfants, notions qui vont être reprises très rapidement d’ailleurs par l’Education Nationale avec la mise en place expérimentale dès la rentrée de septembre 2005 des programmes personnalisés de réussite éducative (PPRE). Cette accentuation de l’individualisation au détriment du territoire a sans doute permis une éclipse relative de la notion de PEL, celle-ci étant continuée par certaines collectivités qui en avaient fait un enjeu politique, mais souvent délaissée par d’autres, plus promptes à mener leur politique à l’aune des financements étatiques. La réussite éducative va entraîner en retour une grande transformation pour l’Education nationale : l’internalisation des accompagnements qu’elle avait toujours laissé à la périphérie ou au marché privé (Acadomia, etc.) Et cela va poser toute la difficulté d’articulation entre ce qui est fait en interne à l’école et ce qui est fait à l’externe, difficulté dont nous ne sommes toujours pas sortis… Il faut rappeler que les CLAS financés par les CAF ont été à deux doigts d’être supprimés dans la précédente COG[2] qui lie l’Etat et la CNAF traduisant un doute de la puissance publique sur leurs effets. Ils ont échappé à leur suppression au prétexte de l’emploi local dans les quartiers.

4ème moment : l’éclatement et la recomposition 2013

Dans la suite de l’Appel de Bobigny de 2010[3], la notion de PEL ou de PET (Territorial) ou de PEG (Global) est revenue en force dans les débats relatifs à la territorialisation des politiques éducatives. Ce retour est aussi largement lié aux tentatives locales de redonner un sens fort aux questions éducatives dans un paysage pour le moins composite d’éclatement de ces questions à travers différents dispositifs (CUCS, PRE, CLAS, CLSPD, REAPP, ASV, etc.). Sur les terrains professionnels, les contradictions sont toujours aussi vives entre, d’un côté, une forme d’extension de la forme scolaire aux acteurs sociétaux (par l’importance toujours accrue de la réussite scolaire comme condition d’une « bonne » insertion sociale) et donc une dérive éducative vers le scolaro-centrisme et, de l’autre côté, une dilution continue du social vers les acteurs du scolaire (qui estiment avoir moins de temps pour enseigner dans la mesure où la gestion même de la classe les sollicitent grandement) qui ne savent comment aborder cette question sociale au sein des établissements scolaires… Si, historiquement, les conditions de rencontre de l’ensemble des acteurs d’une communauté éducative locale avaient toujours été difficiles, force est de reconnaître que la réussite éducative, là où elle s’est mise en place a permis de fructueuses rencontres entre des acteurs qui se parlaient peu, et en particulier a permis d’associer dans ce dispositif de nombreux professionnels des conseils généraux qui n’étaient jusqu’à présent pas toujours associés aux scènes éducatives locales.

L’actualité : les PEDT

On arrive à l’actualité avec la mise en place des PEDT, qui minore l’ambition préalable des PEL puisque ils se centrent sur l’articulation du scolaire et du périscolaire, et que l’extrascolaire est plus ou moins évacué… et qui, de surcroit, ne dit rien de l’articulation des PEDT avec la réussite éducative ou les REP ou encore la politique de la ville dont les géographies sont toutes en pleine révision, ce qui n’est pas sans inquiéter d’ailleurs les terrains… On se retrouve devant ce paradoxe que la réforme des rythmes a été mise en place pour lutter contre les inégalités scolaires mais que la question de la gestion des inégalités territoriales a été reportée… Néanmoins, tout cela n’est pas fini, et nous verrons sans doute après les élections de mars 2014 ce qu’il en adviendra. 

Des questionnements…

Pour finir et introduire au débat, on peut pointer quelques questions :

  • Bien souvent, on recherche un niveau optimal de la régulation de l’éducatif local qui serait au choix le quartier, la commune ou l’intercommunalité. Est-ce possible ou est-ce un faux problème ?
  • Dans ces politiques éducatives locales et partenariales, parle-t-on vraiment d’éducatif ?
  • Pourquoi est-ce aussi lent ? Pourquoi après trente ans de tentatives de politiques éducatives et partenariales les animateurs du périscolaire sont-ils encore accusés de « ne pas savoir tenir leur classe » ?

Débat avec les participants

Les premiers échanges ont alors porté sur l’articulation de la réussite éducative et des PEDT qui est une urgence aujourd’hui et qui ne risque de dépendre que de la manière dont localement les acteurs s’en saisiront. Le risque des politiques éducatives locales est toujours que les logiques financières prennent le pas sur la réflexion : c’était déjà le cas en 1998 lorsque le CTL était beaucoup plus intéressant que le CEL. Du coup, les partenariats patinent car les partenaires, n’ayant pas les mêmes intérêts, peinent à construire un langage commun. Souvent, les partenariats se réduisent alors à des chambres d’enregistrement, ou à la réponse à un problème que l’Education Nationale tend à sous-traiter et à vouloir régler sous la forme de la commande, ou encore à une déconnection des questions du terrain d’avec les offres institutionnelles.

Le PEDT apparaît alors pour certains participants comme une manière de sortir du seul contractuel et de la pêche aux subventions pour redonner sens et cohérence à l’existant local. Cela implique d’accepter de partager avec ses partenaires autre chose que la seule préoccupation financière. Cela montre aussi que les partenariats vont varier fortement suivant les territoires en fonction de cette capacité à partager. Du côté de l’Education nationale, l’une de ses difficultés, sans doute est de penser que la solution à ces problèmes ne viendra que d’elle, alors même que c’est en commençant par partager ses problèmes avec d’autres, que les solutions pourront se trouver.

Pour rendre compte des difficultés partenariales, la question de la bureaucratisation a été évoquée : comment pouvoir aborder des questions de fond entre partenaires si par ailleurs, les acteurs de terrain passent leur temps à remplir des dossiers CERFA en réponses aux injonctions étatiques ? Cela pose d’emblée la question du politique et la manière dont les élus locaux souhaitent impulser ou pas une véritable dynamique partenariale.

Pour élargir la réflexion et sortir du seul PEDT qui, centré sur le premier degré, tend à oublier les autres tranches d’âge et en particulier le niveau du collège et ensuite des 16/25 ans, il a été rap-pelé à quel point dès que l’on montait dans ces tranches d’âges, les partenariats étaient rendus encore plus ardus. Il en est ainsi du dispositif Réussite éducative 16/18 ans. Il a fallu parfois une construction de deux ans de travail pour qu’il devienne opérationnel sur certains terrains, pour dépasser les logiques institutionnelles qui veulent « garder leurs publics ». Pour la Région Rhône-Alpes qui est engagée dans une politique de déconcentration, la difficulté est d’arriver à faire remonter au niveau régional, le maillage éducatif qui est soutenu localement à travers 36 CUCS et 15 PRE 16/18 ans, car il prend chaque fois des configurations différentes qui sont elles-mêmes liées à des portages institutionnels différents. Ainsi, les Préfets doivent faire remonter des schémas de soutien à la parentalité qui doivent s’accorder avec les schémas éducatifs des conseils généraux ou ceux des CAF, qui doivent eux-mêmes s’accorder avec les volontés poli-tiques des communes, le tout pris dans un cadre régional ! Bref, la complexité est de mise dès que l’on tente d’aborder les questions de partenariats éducatifs locaux.

Une expérience de construction partenariale locale : construire progressivement une représentation partagée des problèmes éducatifs, Stéphane Kus

Stéphane Kus a ensuite présenté, à partir de son expérience, la manière dont il a travaillé avec les autres coordonnateurs d’une commune à la construction des partenariats locaux.

Quinze ans d’expérience professionnelle comme enseignant puis comme coordonnateur en Education Prioritaire dans une commune de 40 000 habitants de la banlieue Est de Lyon amène à poser un certain nombre de questions sur la structuration du champ éducatif sur un territoire, ques-tions qui à chaque fois se jouent dans les rapports entre institutions à la fois dans le « droit commun » et dans les dispositifs spécifiques.

La première de ces questions est celle de la ségrégation, à la fois sociale mais aussi ethno-raciale. On a tendance à dire que la ségrégation dans le champ éducatif est simplement l’effet de la ségrégation dans l’habitat. C’est oublier que la sectorisation scolaire (compétence du maire) peut ou non la renforcer. D’autres politiques publiques peuvent elles-aussi avoir un impact sur le mélange des publics : pratiques tarifaires des cantines (tarif unique ou quotient familial) relevant de la municipalité pour le 1er degré, du Conseil Général pour le second ; choix de la manière de constituer les classes (classes de niveaux plus ou moins déguisées par le jeu des options, ou classes hétérogènes ?). La ségrégation qui touche les publics de l’école est avant tout le résultat de différents choix (ou non-choix…) politiques qui concernent les responsables de chaque institution qui gère un bout de la « chose scolaire ». Mais quel lieu, quelle instance partagée entre les pilotes permettrait de questionner cette gestion ordinaire du point de vue de l’égalité qui devrait être en théorie la norme centrale de l’action publique ?

Trop souvent la question partenariale ne se pose que dans des dispositifs spécifiques (CEL, CLAS, CEJ, volet éducatif du CUCS, RRS, PRE, CLSPD, ASV, etc.), souvent portés chacun par un service différent, sans toujours beaucoup de transversalité, et que les « partenaires » inves-tissent à la mesure des financements qu’ils permettent d’obtenir sur tel ou tel action. Pour pallier ce cloisonnement, cette logique de « guichet », pour construire une réflexion transversale qui éclaircisse les problèmes publics sur lesquels devrait agir une politique publique, les coordonna-teurs des différents dispositifs de la commune où je travaillais ont fait le choix de réfléchir ensemble dans une « coordination des coordonnateurs », instance plus ou moins reconnue par les responsables hiérarchiques. Au-delà du partage d’information sur les objectifs et fonctionnement de chacun des dispositifs, cela nous a amené à bâtir un diagnostic des problématiques qui se posent localement dans le champs éducatif en réfléchissant à la fois aux différentes tranches d’âge, aux difficultés des enfants mais aussi des parents et des professionnels. 

Il a ensuite été proposé au comité de pilotage du PRE (lieu où la dynamique partenariale était la plus opérationnelle) de constituer 3 groupes de réflexion autour de thématiques qui nous semblaient prioritaire (accompagnement à la scolarité, parentalité, prévention du décrochage) afin de construire progressivement une représentation partagée par les responsables et les techniciens, en amont des dispositifs, des questions vives auxquelles était confronté le territoire du point de vue de l’éducation. Si le chantier de la parentalité n’a pu être ouvert que plusieurs années plus tard, les 2 autres groupes ont vu le jour. Celui sur le décrochage s’est très vite centré sur un objet opérationnel : concevoir un dispositif d’accueil des collégiens exclus temporairement, ce qui a pu générer un certain nombre de tensions et de conflits, faute d’avoir mis sur la table les représentations sur ce que devait être un tel lieu et surtout sur les processus qui amenaient les collèges à exclure les élèves. Quant à celui sur l’accompagnement à la scolarité, il a pu bénéficier de l’engagement des responsables de l’Education Nationale (IEN et principaux des trois collèges de la ville) qui ont tout de suite mis sur la table le problème d’une pratique scolaire discriminante, les devoirs à la maison, qui externalise la question du travail personnel et instrumentalise les dispositifs d’accompagnement à la scolarité pour une pure « aide aux devoirs ». Le travail de ce groupe a permis à la fois de mettre en place un programme de formation pluriannuel à destination des enseignants des 1er et second degrés autour de « l’apprentissage du travail personnel », mais aussi de concevoir un projet local d’accompagnement à la scolarité qui se fixe des objectifs de transformation des pratiques professionnelles à la fois dans l’école et hors l’école pour œuvrer à une meilleure réussite de tous les enfants.

Pour conclure, la réussite de ce groupe de réflexion tient en grande partie au fait qu’il a centré son objet de travail sur un problème et qu’il a pu, peu à peu, faire sortir chacun des préjugés et constats de sens commun, en s’outillant par les travaux de recherche qui analysent l’interaction entre les enfants et les familles des milieux populaires et les pratiques scolaires[4].

Débat avec les participants

La notion de coordination informelle a fait réagir. Si elle est une chance à un moment donné et dans un contexte donné, elle n’est pas non plus satisfaisante. Elle montre bien néanmoins comment la logique de réseau de partenaires imbrique à la fois du formel et de l’informel. Mais à trop rester dans l’informel, ne passe-t-on pas justement à côté de la nécessaire transformation des logiques institutionnelles ? Ainsi, lorsqu’on étudie la fuite de certains élèves de certains établissements, elle ne peut être traitée que dans un cadre institutionnel et en même temps, on voit bien qu’elle est trop rarement abordée. Certains ont rappelé que le réseau ne pouvait fonctionner que sur la confiance et que c’est d’abord celle-ci qu’il s’agit de construire. D’autres ont évoqué les logiques financières qui peuvent rigidifier les cadres de travail par la logique de l’appel à projet qui, de facto, sélectionne des porteurs de projets en capacité de répondre à ces appels, sans qu’ils ne soient forcément les mieux placés pour répondre aux besoins locaux. Les transformations même des modes de financement qui sont passés de la subvention globale aux appels à projets puis qui glissent de plus en plus vers les marchés publics posent une question redoutable : comment coopérer entre acteurs locaux en situation de concurrence financière ?


[1] Voir la liste des sigles des dispositifs avec leurs dates de début et de fin

[2] COG : Convention d’Objectifs et de Gestion

[3] L’appel de Bobigny peut être consulté sur le site du Réseau Français des Villes Educatrices

[4] On peut citer notamment : Rayou P.(dir.), Faire ses devoirs, enjeux cognitifs et sociaux d’une pratique ordinaire, PUR, 2009 ; Kakpo S., Les devoirs à la maison, mobilisation et désorientation des familles popu-laires, PUF, 2012 ; Kakpo S. et Netter J., L’aide aux devoirs. Dispositif de lutte contre l’échec scolaire ou caisse de résonance des difficultés non résolues au sein de la classe ?, Revue française de pédagogie, n°182, 2013

Print Friendly

Répondre