PRomotion des Initiatives Sociales en Milieux Educatifs







 Konrad Lorenz a montré l’impact considérable qu’ont les émotions et les troubles ressentis dès les premiers temps de la vie sur toute une existence; J. Bowlby, père de la « théorie de l’attachement» réciproque de la mère à l’enfant, indique combien la carence de soins maternels peut avoir des conséquences difficiles sur le plan social; D. Stern, qui a créé le concept de « l’accordage affectif», témoigne du fait que ce qui ne fait pas l’objet d’un bon accordage affectif ou d’un partage des sentiments va entraîner des frustrations, lesquelles auront un retentissement sur le développement social de l’enfant; L. Kreisler a démontré combien les carences affectives chroniques peuvent être causes de troubles somatiques et d’inorganisation de la personnalité;

S. Lebovici, avec sa théorie des « interactions précoces», a montré combien toute infirmité de la relation dans l’enfance engendre une infirmité de la communication, de la confiance en soi, de son épanouissement et de son rapport à l’autre; R. Spitz a lui aussi expliqué combien, pour se développer l’enfant a besoin de relations affectives stables tout autant que de nourriture;

D. Winnicott, avec son concept « d’environnement intérieur» montre que si l’entourage de l’enfant fait défaut, il en résultera une carence de l’amour primitif. « C’est l’environnement qui doit alors donner une occasion nouvelle à la relation au moi, afin de l’aider à réparer cette faille narcissique et à résoudre des conflits identitaires».

De ce point de vue, la façon dont notre société entoure, soutient et « enveloppe» l’enfant et les parents avant, pendant et après la naissance est tout à fait essentielle. D’une bonne politique de la naissance et de l’accueil de l’enfant dépendra en quelque sorte l’avenir de l’enfant.

 Notre image de l’enfance est une image contradictoire que l’on peut résumer en quatre formules: l’enfant est innocent et méchant; l’enfant est imparfait et parfait; l’enfant est dépendant et indépendant; l’enfant est l’héritier et novateur:

« L’enfant a la chance d’échapper au réseau contraignant des multiples relations sociales; mais, simultanément, il dépend totalement de la société … Héritier social et culturel de générations précédentes, il est également créateur, et, en tant que tel, toujours quelque peu négateur …

Dans son comportement, dans son être, dans ses rapports à l’adulte et à la société, l’enfant présente donc deux faces. L’enfant est double, et nous attribuons cette dualité à la nature enfantine elle-même … Aussi imputons-nous à la nature de l’enfant toutes les contradictions que l’on trouve dans l’idée d’enfance", B. Charlot, 1980.

 Pour la psychanalyse de l’enfant, les sept concepts majeurs sont: l’image inconsciente du corps; la vie foetale; l’écoute du bébé; le stade du miroir; l’Oedipe; la sexualité infantile; l’objet transitionnel.

 Les enfants, dès la naissance, ont une vie subjective et un sens du soi bien avant l’apparition du langage et de la conscience réflexive. Ils s’engagent dans des interactions sociales qui vont construire un sens d’expériences partagées, émotionnellement chargées. C’est ainsi que se développe l’intersubjectivité, Decety, 2001.

 F. Dolto a insisté sur le fait que pour dépasser l’état de recherche d’une satisfaction immédiate de ses pulsions ou de ses besoins, le jeune enfant doit être confronté à une « parole symbolisante", médiatrice, qui ouvrira un espace, créera la distance nécessaire avec les émotions et les peurs paralysantes.

 Selon J. Piaget, le développement (génétique) de l’enfant se fait à partir de l’interaction entre l’individu et son milieu ambiant. C’est dans l’action que naissent les schèmes opératoires de la pensée. Les bébés et les très jeunes enfants sont de loin plus compétents qu’il n’y paraît. Ils possèdent de nombreuses capacités leur permettant d’apprendre rapidement.

Le développement de l’intelligence reflète des changements dans la structure et le fonctionnement cérébral aussi bien que dans le déploiement de plus en plus efficace des ressources cognitives. La pensée des enfants se développe dans un contexte social. Les parents, les pairs, les enseignants et la société influencent les objets de pensée des enfants, ainsi que la façon et la raison pour lesquelles les enfants pensent d’une certaine manière, R.S. Siegler, 2001.

 La nécessité pour le jeune enfant de s’adapter, de savoir gérer les informations, faire ses propres expériences et se frayer un chemin autonome ne sont pas des impératifs d’ordre économique, social ou politique mais des évidences pointées par l’observation scientifique de la vie sociale des enfants.

 L’enfance a une fonction particulière et irremplaçable dans le développement de l’humain. Il n’y a pas d’autre choix que de considérer l’enfant comme un être à part entière, un homme en devenir et non un homme en miniature. E. Claparède donne pour illustrer cela une image forte: l’enfant est à l’homme ce qu’est le têtard à la grenouille, de la même essence et pourtant entièrement différent. Nous ne POUVOnl pas agir sur la transformation du têtard en grenouille en le sortant de l’eau: il en meurt. De même on ne prépare pas un enfant à être adulte en lui faisant vivre la vie d’un adulte.

 L’économiste américain, S. Levitt, 2005, s’est rendu célèbre, en soulignant la corrélation entre la baisse de la criminalité aux États-Unis au début des années quatre-vingt-dix et la législation de l’avortement, suite à l’arrêt de la Cour suprême en 1973. L’hypothèse considérée est de dire qu’un enfant naissant dans un environnement familial défavorable avait plus de risques qu’un autre de devenir criminel: « Les enfants non désirés sont davantage susceptibles que d’autres de devenir criminels. L’avortement légal diminue le nombre d’enfants non désirés. Donc, l’avortement entraîne une baisse de la criminalité".

On retrouve dans ce propos « économiquement incorrect », des relents d’eugénisme qui n’ont jamais quitté certains tenants d’une orientation professionnelle rationnelle et scientifiquement établie. En France, le mouvement d’opinion qui s’est exprimé par la pétition « Pas de zéro de conduite pour l’enfant de trois ans" à propos du dépistage précoce des « troubles de conduites chez l’enfant", INSERM, 2006, participe de la même inquiétude. Non! « Tout ne se joue (pas) avant six ans" comme le prétendait un best-seller mondial de l’éducation, Dr. F. Dodson, 1972.

 La nécessité d’un véritable service public de la petite enfance se justifie par le fait que les jeunes enfants développent en crèche des compétences intra et interpersonnelles primordiales dans une société de la connaissance.

 

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