PRomotion des Initiatives Sociales en Milieux Educatifs

Enquête de victimisation et climat scolaire auprès des personnels de l’école maternelle et élémentaire :

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EXTRAIT

Propositions
Enfin, notre rapport se terminera sur quelques propositions principales, plutôt que d’en faire un catalogue interminable. Certaines ne sont pas coûteuses mais auraient pourtant une haute valeur symbolique et des effets de réel importants. Bien sûr et nous le répétons la lutte contre l’exclusion sociale est nécessaire. Cependant, au-delà de cette lutte difficile, plusieurs leviers de changement et d’amélioration existent.

A : Libérer du temps pour libérer la vie d’équipe et la communication avec les familles

1: Le choix affirmé de promouvoir l’autonomie des établissements va très bien dans le sens du nécessaire pilotage local de la prévention de la violence, comme d’ailleurs de l’amélioration des apprentissages (CAS, 2012). Mais notre Éducation nationale n’a pas, en affirmant ce choix, effectué un véritable aggiornamento : les demandes et propositions d’indicateurs (sous prétexte d’aide au pilotage) qui se transforment en fastidieuses et répétitives enquêtes sont un facteur de démobilisation qui a été dénoncé avec virulence. L’autonomie peut-elle pyramidale ? Notre première proposition est donc un moratoire sur ces enquêtes multiples, une évaluation du temps passé à les renseigner et une hiérarchisation de leur importance.

2 : Dans la même veine la réflexion doit être entamée avec les collectivités locales pour mettre à disposition des directeurs un véritable secrétariat. Le statut des directeurs et leurs responsabilités hiérarchiques vis-à-vis des personnels de tout type (fonction publique territoriale et collègues) doit faire l’objet d’un débat ouvert. Il est anormal qu’à effectif parfois égal les directeurs du premier degré ne bénéficient pas des aides dont bénéficient leurs collègues du second degré, chefs d’établissements.

3 : Repenser globalement l’utilité et le timing des évaluations nationales des élèves et leur exploitation culpabilisante dans un classement « informel » local des écoles et des enseignants.

4 : Suppression pure et simple de la dite « aide personnalisée » inefficace et stressante avec la conclusion du débat sur le temps des élèves comme variable importante (fatigue, ruptures de rythme…).

5 : Allégement et étalement dans la longue durée des programmes surchargés du premier degré. Le débat sur les rythmes ne doit pas masquer le débat sur l’encyclopédisme suranné des connaissances imposées.

B : Former les personnels à leur métier
1 : L’enseignement est peut-être une mission, c’est aussi un métier et un métier auquel on se forme. La peau de chagrin de la formation continue, la mastérisation de la formation initiale sans pensée pédagogique ont été des stupidités. Le taux de victimation chez les jeunes enseignants prenant leur poste est fortement corrélé aux lacunes de la formation aux situations difficiles et à la violence à l’école. Il en est de même pour leurs élèves. Deux des plus grands facteurs prédisposant à la victimation sont « une formation lacunaire en gestion de classe » et « une méconnaissance de la réalité scolaire ». La formation des professionnels ne commence pas APRES la formation disciplinaire. Elle est nécessaire dès la Licence. Elle est suffisamment longue et elle est continue.

2 : Au-delà de la formation disciplinaire, nécessaire, les besoins sont criants en ce qui concerne la gestion des conflits et la communication avec les parents, en équipe entre enseignants, comme avec les élèves. Il faut souligner que la formation initiale doit préparer les futurs intervenants scolaires à développer des aptitudes au travail d’équipe puisque les pratiques collaboratives constituent des éléments essentiels à considérer pour renforcer la cohésion au sein d’un même établissement et aider à la création de liens positifs avec le quartier et les familles. Nous manquons cependant de formateurs : le Plan National de Formation et les Plans académiques doivent considérer cela comme une priorité.

3 : Une formation à l’éducation et au partenariat :
A l’heure où les « nouveaux publics » exigent un véritable travail partenarial, il s’agit de penser l’éducation dans sa globalité : l’enfant lui-même n’est pas à découper entre des métiers différents, mais à considérer dans tous les aspects de son développement psychologique social et cognitif. C’est un gâchis financier et une source d’inefficacité de ne pas mutualiser un certain nombre de formations. La loi relative aux libertés et responsabilités des universités ne doit pas avoir pour conséquence une augmentation de la fragmentation des formations en éducation. Il est contre-productif que les compétences et  connaissances de base ne soient pas construites par tous les professionnels passant par l’université. C’est pour ces raisons qu’outre les spécialités disciplinaires, professionnelles et de recherche un fort développement de modules communs est nécessaire. De même une connaissance des futurs professionnels et des métiers divers dans la formation initiale doit viser à une collaboration ultérieure plus efficace, et plus respectueuse. Des troncs communs constitutifs du diplôme universitaire entre le monde de l’enseignement, du travail social, de l’animation, de l’aide à la personne sont à construire, non pour substituer un métier à un autre mais pour une meilleure interconnaissance au service des enfants, des jeunes et des familles. Les futures « Écoles du professorat et de l’éducation » ne doivent pas former que des enseignants…


C : Rôle et formation des personnels spécialisés

1 : Évolution des RASED : Le maintien des personnels d’aide à l’école élémentaire est un consensus de terrain, que nous partageons. Cependant leur évolution et l’augmentation de leur efficacité en sont une condition : la formation de tous les personnels vise à augmenter les actions de prévention universelle à l’égard de la majorité des enfants, la formation de ce type de personnel vise à augmenter l’efficacité de la prévention secondaire à l’intérieur des écoles elles-mêmes et non en milieu spécialisé. Si parfois la prise en charge individuelle est nécessaire il nous apparaît, en accord avec la littérature sur les programmes efficaces, que ce sont les actions menées en groupe qui sont les plus probantes. La connaissance des programmes de remédiation (et en particulier des programmes de développement de l’empathie, de communication non-violente, de développement des compétences sociales) devrait être l’objet d’une formation renouvelée d’une profession qui pourrait se rapprocher utilement de la psychoéducation sans pour autant s’y assimiler.

2 : Enseignants surnuméraires et personnels d’aide (AVS) : La présence d’un personnel surnuméraire pouvant aider les enseignants et les élèves dans les classes et mettre en place des projets différents et des dédoublements serait un facteur facilitant (cf. les support teachers par exemple). Mais là encore les expériences internationales, particulièrement en Europe du Nord ou au Québec montrent que la formation de ces personnels est une condition d’efficacité. Il est quand même simple d’imaginer que confier les problèmes les plus complexes à des personnes sans aucune formation réelle ne peut guère avoir d’efficacité, même s’il existe des exceptions. Plus qu’un abaissement global et impossible du nombre d’élèves par classe c’est bien la présence dans les écoles de ces aides qui sera efficace.

D : Un autre modèle pour les relations humaines
Le modèle pyramidal a vécu. Il est même considéré par les personnels des écoles comme une « violence institutionnelle ». La réflexion doit donc progresser – mais avec ces personnels – sur l’équilibre entre une autonomie réelle et un pilotage raisonnable et non bureaucratique de cette autonomie dans un cadre national. Le statut des directeurs, et leur mode de nomination, le rôle de coordination des IEN, la remise à plat des pratiques et des finalités de l’inspection pédagogique, l’importance de la recherche et de l’innovation pédagogiques dans les pratiques de classes sont des débats à mener sans a priori. La mise en place d’une vraie médecine du travail et de la prévention, d’un accompagnement et d’une écoute non hiérarchique des personnels doivent aller de pair avec un développement du travail en équipe. Il est à craindre que toute « concertation » qui oublierait cette dimension se heurte à un scepticisme généralisé."

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Categories: 4.2 Société

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