PRomotion des Initiatives Sociales en Milieux Educatifs

La réflexion sur « une école plus juste pour tous les territoires » a été traversée par des questions théoriques (qu’est-ce qu’une école juste, que sont les difficultés d’apprentissages des élèves, qu’est-ce qu’un territoire, quel est le lien entre un individu élève, un lieu  d’enseignement, un territoire ?), par des questions pragmatiques (comment penser de  nouvelles conditions de fonctionnement de l’école sans ajouter au mille feuille des dispositifs existants, des labels, des instances de pilotage ?), par des questions professionnelles(comment un enseignant confronté à la difficulté scolaire, aux besoins spécifiques de certains élèves, à la difficulté scolaire et sociale réunie est-il préparé à son métier, dans quelles conditions le mener à bien ?).

L’ensemble des réflexions des six séances de débat est résumé en trois points : école et territoire, prise en compte des difficultés sur tous les territoires,  spécificité des difficultés scolaires dans les territoires prioritaires.

1-DIFFICULTES SCOLAIRES DANS L’ENSEMBLE DES TERRITOIRES

Constat

La difficulté scolaire existe sur tous les territoires. L’accès à l’enseignement n’est pas égal partout, dès lors que les élèves peuvent être isolés géographiquement, qu’ils ont des besoins spécifiques, que la carte des formations n’offre pas une variété suffisante de parcours de réussite.

La difficulté scolaire peut être générée par l’école elle-même, lorsqu’elle n’arrive pas à articuler les trois dimensions de l’enseignement : transmission de la culture, développement des habiletés cognitives, renforcement de l’estime de soi nécessaire à la poursuite des apprentissages. N’est-ce pas l’école qui a du mal avec certains élèves, qui ne répondent pas au
schéma français étroit de réussite scolaire ? Dans le monde du travail, (et encore plus demain  qu’aujourd’hui) on attend de l’autonomie (travail chez soi grâce au numérique) ; or l’école ne s’y intéresse pas vraiment.

Il faut repenser un socle commun de connaissances et de compétences, avec validation des acquis de l’école et hors de l’école, dans un collège qui termine les apprentissages du premier  degré au lieu de préfigurer le lycée.

La prise en charge des élèves à besoins spécifiques est inégale d’une académie à l’autre :  inégalité dans le nombre de structures intégrées, d’AVS, dans le matériel pédagogique, et même dans les aménagements lors des examens). Cette inégalité peut entraîner des ruptures de scolarité lors du passage d’un niveau d’enseignement à un autre.

Les territoires ruraux connaissent des difficultés particulières : éloignement des lieux de formation et des ressources culturelles, obstacle des transports, manque d’attractivité pour les personnels, absence de proximité entre les acteurs pour un travail en réseaux.

Les DOM-TOM souffrent particulièrement de la pauvreté des bâtiments scolaires, d’une formation insuffisante des enseignants, de règles scolaires désuètes (interdiction de toute langue maternelle à l’entrée à l’école).

Propositions

-Donner accès à l’ensemble des formations générales, technologiques, professionnelles en
utilisant les leviers de l’information des familles, des transports en commun, des internats.

-Prendre en compte le phénomène du décrochage là où il se fait à bas bruit (dès l’école primaire ou dans les territoires ruraux).
-Engager une politique de GRH pour attirer les personnels (dans les territoires difficiles ou ruraux).

– Donner un accès équitable au numérique et aux ressources culturelles.
-Donner un droit d’accès à l’ensemble des filières sélectives (CPGE, BTS, IUT …) à 6 % des meilleurs élèves de chaque lycée sur tout le territoire national en veillant aux conditions nécessaires à la poursuite d’étude (logement étudiant, transport).

NB Ne pas fixer le  pourcentage dans un texte législatif ; faire en sorte que tout élève sortant d’un collège et entrant dans un lycée sache que, de ce lycée, tel et tel élève sont entrés dans telle formation et créer ainsi une dynamique d’ensemble importante pour tout le territoire.
-Prendre en compte l’enseignement public et l’enseignement privé dans la carte des  formations.

Formation initiale des enseignants :

-Les informer pour les rendre attentifs et curieux face aux élèves à besoins spécifiques,  les mettre en capacité de s’adresser aux spécialistes qui existent sur le territoire.
-Leur faire comprendre les liens entre l’élève et l’enfant dans sa famille, dans sa culture, dans son territoire, dans son ethnie.

-Les former aux questions d’apprentissage et d’hétérogénéité ainsi qu’aux acquis de la sociologie des trente dernières années (et les alerter sur les phénomènes communautaires.

Formation continue :

-Permettre un accès aisés à des formations à la prise en charge pédagogique de cesélèves.
-Approfondir la réflexion sur les modalités d’apprentissage, coeur du métier enseignant.

2-ECOLE ET TERRITOIRE(S)

Constat

Au moment où s’engage la phase 3 de la décentralisation, on assiste à la fin de l’école sanctuarisée : les collectivités territoriales, les associations, les parents d’élèves entendent participer à une « co éducation » et s’inscrire dans un partenariat de décision et d’action  autour de « l’enfant – élève ».

Dans le même temps, la responsabilité de l’Etat demeure de donner des orientations
politiques, c’est-à-dire de définir non seulement les modalités mais aussi les contenus de l’action éducative, de définir les curricula et ce qui doit être acquis par tous. L’Etat garantit que le cadrage national est respecté ; ce cadrage n’impose pas une uniformité de réalisation  sur l’ensemble des territoires.

Une fois affirmé le principe de l’éducabilité pour tous, on attend des objectifs nationaux  plutôt que programmes pléthoriques ou cadrage trop précis d’horaires, une souplesse sur  temps bref d’apprentissage comme sur temps long.

Propositions
Pour une articulation entre territoire national et territoire local :

-Etablir en inter ministériel un document décrivant le territoire national comme support de discussion entre l’Etat et la Région.
-Maintenir une politique de la Ville qui vise à diminuer les écarts de différenciation sociale.

-Etablir un devoir de solidarité nationale pour permettre une péréquation des moyens supplémentaires accordés par les collectivités territoriales en faveur des territoires défavorisés

Pour une articulation au sein des territoires :

-Une fois établie la cartographie nationale et délimités des territoires, laisser la main au local pour définir des lieux cohérents d’une action éducative, variable selon les niveaux  d’enseignement (quartier / ville / intercommunalité / département / région). Ménager de lasouplesse dans la délimitation de ces lieux en fonction des particularités locales.
-Etablir dans ces lieux de façon tripartite les projets entre rectorat, collectivité territoriale,  réseaux d’enseignement.
-Prendre en charge de façon coordonnées la difficulté scolaire, l’école, les professionnels de différents types agissant sur le territoire, les élus, les associations concourant en  complémentarité aux problèmes de maîtrise de la langue, d’égalité garçon – fille, d’image desoi, de décrochage, de violence.
-Organiser toutes les écoles et tous les collèges en réseau sur un même territoire.
-Intégrer les projets d’école, de réseaux, dans le Projet Educatif Local, l’ensemble étant piloté par un agent incarnant le principe de l’Etat : par exemple, identifier un « ingénieur local en  éducation » interlocuteur s de la collectivité territoriale en tant que de besoin (IEN, directeur  d’école) dans un rôle de coordonateur des partenaires du projet éducatif (inter action entre letemps d’enseignement, les activités de la pause méridienne, le temps éducatif après l’école).
-Travailler la question des formations dans le tissu local, faciliter la coopération des différents niveaux, pas seulement au niveau des pilotes comme au niveau des acteurs.

Formation des enseignants
-Découvrir dès les années de formation initiale professionnelle les partenaires de l’école : les  parents, les collectivités locales, les associations.
-Intégrer à la formation initiale le travail en équipe, la mise en cohérence des pratiques inter  degrés, l’esprit d’initiative.
-Former à identifier ce qui relève du champ spécifique de l’école (apprentissages scolaires),  et ce qui nécessite une politique de co-éducation, ce qui se tisse pour la formation d’un  « enfant – élève » entre le temps scolaire et le temps hors scolaire.
-Faire découler les besoins de formation du projet d’école, fondement du plan de formation.

3-L’EDUCATION PRIORITAIRE, COEUR DE CIBLE

Constat

S’il existe partout des élèves en difficulté scolaire, il existe aussi des lieux dans lesquels les difficultés sociales (travail, logement, santé, précarité familiale) rendent illusoire d’attendre des règles de fonctionnement, des moyens de droit commun et de l’école seule qu’elle permette aux élèves de réussir à égalité avec les élèves des autres territoires.

Certains territoires n’ont plus de mixité sociale et cumulent l’accueil de nombreux primo  arrivants avec un taux maximal de débutants de tous les servies publics. L’école y nécessiteun traitement spécifique au sein d’un dispositif fort d’éducation prioritaire.

Propositions

• Carte
-Partir de la cartographie nationale des difficultés scolaires pour cibler non pas des  établissements mais des zones et faire varier à l’intérieur de ces zones les modalités d’aides  supplémentaires.

Anne Armand – Groupe 3 – Territoires – Synthèse

-S’engager sur le principe de la périodicité de cette carte, prenant en compte milieu urbain et ruralité.
-Se fonder sur des critères concertés, rendus publics, validés par plusieurs sources, prenant en  compte les ressources et les moyens des établissements, en particulier la faiblesse de niveau  dans les apprentissages scolaires.

– Affronter la question de la fermeture des 5 % d’établissement très en difficulté.
-Mettre en cohérence la carte scolaire et la carte de la Politique de la Ville pour parler  « d’éducation dans les territoires prioritaires ».
-Les différents labels autour d’une « école prioritaire » sont à la fois occasion d’évitement et focalisation d’un militantisme pédagogique dont tout le système scolaire bénéficie.

Renoncer  aux labels maladroits (« préfets des études ») mais continuer à avancer dans la création de fonctions intermédiaires susceptibles de favoriser le travail en équipe dans les établissements.
• Conditions de travail dans les territoires prioritaires :
-Les primes et les indemnités sont facteurs de rigidité, les acteurs ont besoin d’abord de temps : temps pour travailler ensemble autour de la difficulté des élèves, pour travailler avec les partenaires, pour se former dans la rencontre avec des enseignants du même territoire,  pour participer tous, et non par délégation, au conseil du réseau.
-La création des coordonateurs de réseau, des professeurs référents puis des préfets des études a ouvert la voie à une nouvelle professionnalité. On doit y former et lui donner un  cadre de reconnaissance.
-L’effectif des classes est moins important que la présence d’enseignants supplémentaires permettant de sortir d’une définition individuelle du métier. Ces personnels sont une nécessité et leur mise en place doit être assortie d’un accompagnement précis et exigeant.

Priorité accordée au premier degré

-Relancer la politique de scolarisation des enfants de moins de 3 ans.

-Prendre en compte les exigences particulières en matière d’aménagement de l’espaceet du temps de l’enfant de 2 ans et restaurer le métier d’enseignant en maternelle.
-Dans ce secteur particulier de l’enseignement, limiter les effectifs pour que chaque

élève ait un accès effectif au langage par échange avec le maître.
-Personnaliser l’enseignement en classe et limiter la multiplication des intervenants auprès de l’élève jeune.

-Différencier nettement les premières années de maternelle en lien avec les structures de la petite enfance et les classes suivantes, en lien avec le CP, sans « primariser » la grande section de maternelle.

Formation des enseignants
-Découvrir dès les années de formation initiale professionnelle les notions  d’hétérogénéité, de personnalisation des parcours, de connivence culturelle et scolaire, de maîtrise de la langue.
-L’enseignement en éducation prioritaire ne relève pas de la formation initiale ; celle-ci  doit construire chez les nouveaux enseignants deux postures : devenir un  professionnel des apprentissages (identifier les obstacles aux apprentissages, prendre conscience de l’implicite scolaire) et passer de la posture individuelle (de l’étudiant qui a passé des examens) à une posture d’équipe. Ces postures seront à décliner  ensuite suivant les contextes d’affectation, en formation continue.
-Grâce à la formation au travail en équipe (le modèle « un maître, une classe, une discipline, est dépassé) afin de passer d’un contexte d’injonction à un contexte de prise d’initiatives. Il s’agit de « libérer la capacité d’initiative », de former au souci de diversifier les pratiques.

-Reconnaître la nécessite d’une formation spécifique au moment de la prise de poste,  avec un accompagnement fort des collègues et de l’institution

-Au delà de la question des structures et des dispositifs, accepter de s’interroger sur  l’action pédagogique (toutes les pédagogies ne se valent pas) et accepter de chercher  la source des difficultés scolaires dans les objets d’apprentissage eux-mêmes. Pour  cela, renforcer l’articulation entre recherche et formation.

-Prévoir l’existence d’école d’application en éducation prioritaire, de conseillers  pédagogiques en surnombre.

-Promouvoir des stages inter degrés, favoriser l’intervention des enseignants dans l’un  et l’autre degré, pour augmenter le lien entre premier et second degré.

 

Print Friendly

Répondre