PRomotion des Initiatives Sociales en Milieux Educatifs

In URSP – IREDU :

Accéder au site source de notre article.


L’organisation du temps à l’école primaire devrait prochainement connaître des modifications importantes. L’annonce récente du Ministre de l’Education nationale concernant l’allongement de la durée des congés de la Toussaint donne le ton sur la réforme à venir qui marquera la fin d’un long questionnement politique, éducatif et social, nourri par des arguments et des intérêts souvent contradictoires. Si la communauté scientifique témoigne d’un consensus sur la question, les parents d’élèves, les enseignants, les élus locaux, et plus largement les acteurs sociaux et économiques affichent des positions qui divergent souvent sur la répartition souhaitable du temps d’enseignement au cours de l’année, de la semaine ou de la journée. Jusqu’à présent, les responsables politiques ont fait preuve d’une grande prudence dans leur action et, à part quelques expérimentations menées au niveau local, il y a eu peu d’évolution au cours de ces dernières décennies. Il a fallu attendre la rentrée 2008 pour qu’un changement, pour le moins inattendu d’ailleurs, intervienne avec la suppression du samedi matin de la semaine scolaire. La situation actuelle est très loin des recommandations des spécialistes des rythmes de l’enfant (INSERM, 2001) et l’introduction des deux heures hebdomadaires d’aide personnalisée, mesure mise en place avec le passage à la semaine de quatre jours, rend les journées particulièrement longues pour les élèves qui accumulent de la fatigue et denses pour les enseignants qui voient leurs diverses activités concentrées sur une semaine à la durée réduite.
L’objectif de ce texte n’est pas de rappeler les enjeux de la future réforme, une réflexion a été menée récemment qui énonce clairement les principes d’une amélioration dans la répartition du temps scolaire1. Il ne s’agit pas non plus de rappeler ici les résultats des recherches concernant une organisation du temps optimale pour les élèves (Suchaut, 2009). L’objectif est plutôt d’adopter une perspective très concrète quant à la mise en oeuvre de modalités de répartition du temps qui respecteraient au mieux les conclusions des travaux sur la question (notamment en référence aux besoins des élèves) mais qui prendraient aussi en compte les contraintes sur le plan organisationnel. Ce texte vise donc, avec une approche très pragmatique, à s’interroger sur un schéma d’organisation du temps qui intègre les différents aspects liés à ce questionnement qui nous semblent indispensables et qui dépassent la seule dimension des rythmes de l’enfant pour cibler, de manière plus générale, l’amélioration du fonctionnement de l’école primaire. En fonction de la connaissance, sans doute partielle, que l’on peut avoir du phénomène étudié, les principes suivants nous apparaissent néanmoins essentiels à prendre en compte pour guider notre démarche.
Les principes généraux d’une nouvelle organisation du temps scolaire
Le premier principe repose sur un meilleur respect des rythmes des enfants. Les améliorations à apporter dans ce domaine sont à présent bien connues et concernent les aspects suivants : une alternance plus équilibrée des périodes de classe et de congé sur l’année scolaire, une réduction du temps scolaire sur la journée, une programmation des séquences d’apprentissage à des moments où la vigilance des élèves est la plus grande, une semaine scolaire étalée sur cinq jours et, en conséquence, une diminution de la durée des congés d’été.
Le second principe est d’améliorer l’usage du temps d’enseignement avec l’idée de préférer la qualité à la quantité. La nouvelle organisation doit permettre d’améliorer l’efficacité de l’enseignement en intégrant dans le temps scolaire, d’une part des périodes spécifiques consacrées à la prise en charge de la difficulté scolaire et, d’autre part, des périodes d’enseignement en petits groupes.
Le troisième principe vise l’amélioration des conditions de travail des enseignants. Les modifications apportées dans la répartition du temps des élèves doivent aussi permettre de reconsidérer le temps de travail des enseignants en donnant une place spécifique dans la nouvelle configuration de la semaine à des tâches autres que celles destinées à l’enseignement (concertation pédagogique, travail collaboratif, etc…).
Un quatrième principe est de mieux articuler les temps scolaire et périscolaire. Un des dangers potentiels d’une nouvelle organisation du temps est de laisser les élèves sans prise en charge trop tôt dans l’après-midi. Il est donc primordial de penser une articulation entre les différentes activités proposées aux élèves au cours de la journée en visant la complémentarité de manière à éviter cet écueil qui pourrait générer des inégalités.
Enfin, un dernier principe, lié au précédent, est de mieux coordonner les interventions auprès des élèves. Il s’agit de prendre en compte l’ensemble des adultes présents dans l’école (enseignants, intervenants rémunérés par la municipalité, E.V.S., etc…) en les considérant comme des ressources potentielles pour des activités complémentaires, mais de nature différente et toutes utiles à la scolarité des élèves.
Selon ces principes, dont le respect devrait permettre, à la fois une meilleure qualité de l’enseignement et une réduction des inégalités entre élèves, ce n’est donc pas uniquement une réforme des rythmes de l’enfant qu’il convient de mener mais, plus largement, une réforme globale du temps d’enseignement pouvant servir de levier pour améliorer la qualité de l’école primaire. Outre ces considérations introductives, on doit s’intéresser à l’aspect méthodologique et opérationnel de la démarche d’analyse envisagée dans ce texte. Si l’on souhaite tenir compte des principes précédents, une nouvelle répartition du temps scolaire ne peut se concevoir qu’à un niveau local. Il est clair que les différences de contextes font qu’il n’est pas envisageable de proposer un modèle unique au niveau national qui pourrait s’adapter, à la fois à une école isolée dans une zone rurale et à un groupe scolaire de quinze classes implanté dans une grande ville. S’il parait évidemment nécessaire d’avoir un cadrage national pour la durée du temps d’enseignement alloué aux élèves afin de respecter le principe d’égalité face à l’offre scolaire, la répartition précise doit tenir compte des contraintes locales (transports scolaires, offre périscolaire etc…) et permettre des déclinaisons dans sa mise en oeuvre. Nous avions donc potentiellement le choix entre plusieurs niveaux d’analyse pour proposer un schéma d’organisation du temps à une échelle locale. L’approche idéale aurait sans doute été de réaliser des simulations au niveau d’une ville ou d’une agglomération de communes mais, la difficulté de recueillir rapidement l’ensemble des données nécessaires à cet exercice, nous a amené à considérer un modèle d’organisation au niveau d’une seule école. Cela a pour intérêt majeur de pouvoir analyser presque l’ensemble des paramètres à prendre en compte pour une nouvelle organisation du temps. Nous avons porté notre choix sur une école comportant cinq classes2 mais des simulations pour des écoles de taille voisine sont facilement envisageables. Nous avons en effet surtout cherché à exposer un principe général d’organisation pouvant nourrir la réflexion des acteurs, plutôt qu’un modèle unique à reproduire. Avant de se focaliser sur les modalités concrètes d’organisation proposées, il est nécessaire d’examiner, en amont, les transformations souhaitables en termes de répartition du temps sur l’année, la semaine et la journée.

1 « Des rythmes plus équilibrés pour la réussite de tous ». Rapport d’orientation sur les rythmes scolaires. Conférence nationale sur les rythmes scolaires. Ministère de l’Education nationale. Juillet 2011.

2 L’école choisie comme exemple, ainsi que les données qui s’y rattachent, correspond à un cas réel de la région Bourgogne pour l’année scolaire 2011-2012.

Print Friendly

Répondre