PRomotion des Initiatives Sociales en Milieux Educatifs

In Sciences Humaines – le 7 mars 2013 :

Accéder au site source de notre article.


Installé dans trois villes françaises, ?le Centre de recherche sur l’interaction et la souffrance scolaire (Criss) s’adresse aux élèves mais aussi aux parents et aux enseignants.

Apaiser la souffrance des élèves, de leurs parents et des enseignants grâce à une thérapie courte, basée sur la résolution stratégique des problèmes, telle est l’ambition du Centre de recherche sur l’interaction et la souffrance scolaire (Criss). Centre de thérapie avant tout, il est également un lieu d’études et de sensibilisation sur la « thérapie brève » appliquée à l’éducation. « Depuis que je consulte, je remarque que la moitié des situations concernent des enfants et des adolescents », explique la psychoclinicienne Emmanuelle Piquet, cofondatrice du Criss en 2012. « Je suis également frappée par la recrudescence des souf­fran­ces liées à la scolarité. » Diplômée de l’institut Grégory-Bateson en psychothérapie brève et stratégique, elle applique depuis cette méthode en France.??

Une résolution stratégique des problèmes?

Faites vous-même votre malheur, tel était le titre que le psychologue et philosophe Paul Watzlawick avait donné à l’un de ses ouvrages, paru en 1983, convaincu que nous mettions nous-mêmes en place des réflexes et réactions nous maintenir dans nos problèmes, alors même que nous pensions tout faire pour nous en extirper. C’est devant ce paradoxe qu’est née la « thérapie brève », élaborée depuis les années 1950 par un groupe de chercheurs, parmi lesquels Don Jackson et l’anthropologue et biologiste américain Gregory Bateson, dans le cadre du Mental Research Institute de Palo Alto en Californie. Elle est fondée sur l’étude approfondie des mécanismes psychologiques de la souffrance. Intégrant les avancées récentes des sciences de la communication, et notamment le fonctionnement des interactions, elle place au premier plan l’étude des relations (avec soi-même et avec l’entourage) et rejette les diagnostics susceptibles de culpabiliser les patients et leurs proches.

?Méconnue par nombre de psychothérapeutes français, la thérapie brève est pourtant pratiquée dans de nombreux pays, tels les États-Unis, l’Allemagne ou encore l’Italie. À contre-courant de l’épistémologie freudienne qui repose sur l’investigation du passé dans une longue et douloureuse analyse, elle est, comme l’indique son nom, de courte durée et se consacre à la résolution pragmatique des problèmes du présent. Menée sur le mode du dialogue, elle convient particulièrement aux enfants. « Dans le cas des souffrances relationnelles, comme les moqueries, le harcèlement ou encore la solitude, nous aidons l’enfant ou l’adolescent à sortir de la postu­re de victime en puisant dans ses ressources, et à désarçonner celui ou ceux qui le maltraitent. C’est à chaque fois un travail sur mesure. » Une thérapie dans laquelle le patient prend une part active, en suivant des prescriptions comportementales adaptées à sa situation et à ses possibilités personnelles. « Le but est de modifier ses interactions avec les autres et de lui permettre de sortir des cercles vicieux de la souffrance, tout en acquérant une réelle autonomie face à ses difficultés », précise E. Piquet.??

Responsabiliser l’élève, apaiser les parents?

Autonomie d’autant plus cruciale qu’il semblerait que la souffrance soit intimement liée à l’intervention, souvent démesurée, des parents. «  Les apprentissages, qu’ils soient relationnels ou intellectuels, sont souvent entravés par une intervention maladroite des parents sur le terrain scolaire. Ils peuvent tomber dans deux écueils : une prise en charge excessive d’une part, qui démobilise l’élève, et une forme de désintérêt presque abandonnique d’autre part. Avec le même résultat : l’échec scolaire. » C’est la raison pour laquelle le Criss travaille généralement, de manière indirecte, avec les parents. «  Ils répondent aux injonctions des enseignants qui les responsabilisent excessivement et leur renvoient alors souvent la balle en les désignant comme incompétents. Dans ce cercle vicieux, seul l’élève n’est jamais réellement responsabilisé. » Écueil que tentent de contourner les psycho­cliniciennes en amenant les parents à lâcher prise et à laisser le jeune se mobiliser davantage dans la création de son parcours.

?E. Piquet va plus loin : le système d’orientation mériterait également d’être revu. «  Nous déplorons cette vision étriquée de la réussite qui survalorise certaines disciplines scolaires, les scientifiques notamment, au détriment d’autres, artistiques ou sportives par exemple, qui pourraient pourtant permettre à bien des élèves de trouver leur voie plus rapidement. » Avec Marie Quartier, qui a enseigné dans des zones difficiles, elles ont réalisé qu’outre la souffrance des élèves, le métier d’enseignant générait de plus en plus de souffrances, face auxquelles peu de réponses pragmatiques et efficaces existaient. C’est la raison pour laquelle elles les reçoivent également en thérapie et dispensent des formations aux professionnels de l’éducation comme à ceux de l’enfance.

 

Criss (Centre de recherche sur l’interaction et la souffrance scolaire) : http://souffrance-scolaire.fr

Print Friendly
Categories: 4.2 Société

Répondre