PRomotion des Initiatives Sociales en Milieux Educatifs

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Entre 120 000 et 180 000 jeunes, selon les sources, quittent chaque année le sys­tème sco­laire sans qua­li­fi­ca­tion. Pour lut­ter, deux ensei­gnants pro­posent des pistes pédagogiques.

La lutte contre le décro­chage sco­laire est la prio­rité de chaque ministre de l’Education natio­nale. Vincent Peillon ne déroge pas à la règle en décla­rant , en sep­tembre 2012, son inten­tion de « divi­ser par deux » le nombre de décro­cheurs. Pour y par­ve­nir, deux axes forts : concen­trer les efforts sur l’école pri­maire et l’insertion professionnelle.

Philippe Goémé, co-auteur de l’ouvrage « Le décro­chage sco­laire, des pistes péda­go­giques pour agir » et ensei­gnant au Pôle Innovant Lycéen de Paris, estime qu’il faut aller plus loin, au vu des mul­tiples causes de l’échec sco­laire. « L’orientation subie, dénon­cée par Vincent Peillon, est une des causes mais pas la seule. A un moment donné, des élèves ne trouvent plus leur place à l’école, soit parce qu’elle n’a plus de sens pour eux, soit parce que leur situa­tion per­son­nelle est com­plexe, ou encore parce qu’ils accu­mulent les dif­fi­cul­tés sco­laires. » Problème : com­ment déce­ler les pre­miers symp­tômes du décro­chage scolaire ?

« Le sys­tème coince aux jointures »

Selon une enquête  de l’AFEV réa­li­sée en 2012, les classes de 3e et de 2nde repré­sentent une période char­nière, pro­pice au décro­chage. « Le sys­tème coince aux join­tures, lors du pas­sage en 6e et plus encore de l’entrée au lycée », confirme Philippe Goémé qui pointe du doigt « un lent déli­te­ment » dans la rela­tion qu’entretient l’élève avec l’école : « l’absentéisme peut être un signe, de la même manière qu’un élève qui ne va plus tra­vailler que dans cer­taines matières ou qui va rompre les liens avec les ensei­gnants et ses cama­rades. Cela peut aussi prendre la forme d’un iso­le­ment dans le tra­vail ou, au contraire, de crises et de troubles du comportement. »

Pour Philippe Goémé, la lutte contre le décro­chage sco­laire ne peut pas faire l’économie d’une réflexion sur le fonc­tion­ne­ment de l’école : « le décro­chage est aussi un échec de l’école dans son ensemble. Il faut tra­vailler sur l’école pri­maire mais aussi réflé­chir à de nou­velles struc­tures ou à des sys­tèmes de tuto­rat par exemple. Les micro-lycées et les écoles de la seconde chance fonc­tionnent mais ce sont des solu­tions pal­lia­tives qui doivent essai­mer car elles ne concernent aujourd’hui qu’une mino­rité de décro­cheurs. » Selon ce spé­cia­liste, il convient aussi de revoir le rôle des ensei­gnants, en décloi­son­nant les dis­ci­plines : « est-il rai­son­nable d’avoir une dizaine de profs dif­fé­rents en 6e ? Pourquoi ne pas ima­gi­ner une logique de pôles réunis­sant plu­sieurs matières ? »

Un retour au sens du savoir

Parmi les solu­tions pro­po­sées pour lut­ter contre l’échec sco­laire, Philippe Goémé insiste pour un retour au sens du savoir : « et non à son uti­lité ! En clair, il faut mon­trer aux élèves com­ment les matières s’articulent entre elles et avoir recours à l’épistémologie, remettre les savoirs en pers­pec­tive dans un cadre plus global. »

Plus concrè­te­ment, quelques « ruses » pro­fes­so­rales peuvent être faci­le­ment mises en œuvre : « il s’agit, par exemple, de tou­jours com­men­cer un cours en pré­sen­tant les objec­tifs de celui-ci. » L’enseignant conseille égale­ment de faire régu­liè­re­ment réfé­rence aux autres matières, quitte à inter­ve­nir en binôme : « dans mon lycée, on réunit par­fois dans des modules spé­ci­fiques sport et écono­mie ou sciences et société. » L’enseignant pré­co­nise aussi une remise à plat du sys­tème de nota­tion, pour valo­ri­ser davan­tage les pro­gres­sions : « la note ne doit pas sanc­tion­ner et il faut ban­nir les classements. »

Ainsi, dans son établis­se­ment, le conseil de pro­grès a rem­placé le tra­di­tion­nel conseil de classe. Quant au redou­ble­ment, Philippe Goémé est caté­go­rique : si c’est pour refaire le même pro­gramme, il n’y croit pas : « Mieux vaut reve­nir à des classes pas­se­relles, en par­tant du prin­cipe que tous les élèves ne pro­gressent pas au même rythme. »

Charles Centofanti

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