PRomotion des Initiatives Sociales en Milieux Educatifs

In Recherches en éducation n°16 – Juin 2013 :

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Edito : La Finlande au-delà des mythes ?

Ce numéro de Recherches en Éducation se propose d’examiner certains des mythes attachés à l’éducation finlandaise et pose l’hypothèse de la mythification de l’éducation finlandaise à travers les questions suivantes : l’image que l’on donne, rapporte ou crée du système éducatif finlandais est-elle bonifiée ? Quels mythes ont été générés autour de l’éducation finlandaise ? Quelles semblent être les inexactitudes, les inventions ou les manipulations ? Qui participe à la création de ces mythes ? Pourquoi ? Pour qui ? Certains acteurs en profitent-ils ? Ces mythes sont-ils remis en question ? Par qui et comment ?

AVEC LES ARTICLES DE :

JOHANN-GÜNTHER EGGINGERAux sources de l’Éden éducatif nordique. Images véhiculées en France de l’instruction primaire finlandaise au cours de la deuxième moitié du XIXe siècle (1851-1911)

Auréolé du prestige de ses résultats aux évaluations internationales PISA, le système éducatif finlandais est l’objet de nombreuses études françaises qui cherchent à déterminer les secrets d’une telle réussite, et qui tendent à idéaliser ce « miracle » finlandais. Cet article propose l’hypothèse d’une mythification du système finlandais qui remonterait à la période plus ancienne des expositions universelles de la fin du XIXe siècle. Le corpus étudié est celui des imprimés relatifs aux expositions et collections scolaires. Une première analyse montre un système éducatif performant, dès la fin du XIXe, en ce qui concerne la maîtrise de la lecture par l’immense majorité de la population finlandaise.

HANNU SIMOLA & RISTO RINNEEducation politics and contingency : Belief, status and trust behind the Finnish PISA miracle

De nombreux concepts non historiques et décontextualisés tels que efficacité, responsabilité et qualité sont en train d’envahir le monde éducatif sans être remis en question, du fait de leur utilisation généralisée à travers le monde. L’éducation comparative continue à souffrir de certains déficits méthodologiques et d’une sous-théorisation prononcée. Dans cet article, nous tentons d’enrichir cette recherche à partir des concepts prometteurs de contingence, coincidence et Spielraum. Ces concepts nous serviront à présenter le succès finlandais dans les études PISA en illustrant trois croyances largement ancrées dans les débats nationaux en Finlande. Ces croyances paraissent uniques si on les compare à d’autres nations, et elles proviennent certainement de l’histoire nationale finlandaise. La première concerne la confiance forte des Finlandais en l’éducation ; la deuxième veut que le métier d’enseignant soit un métier très respecté dans ce pays ; et la troisième que les parents, autorités et hommes politiques ont confiance en l’école compréhensive finlandaise. Ces trois « vérités » nationales sont largement acceptées même si l’on trouve peu de preuves empiriques pour les justifier. Elles peuvent constituer sans aucun doute des éléments clefs de l’auto-perception nationale en relation à l’éducation. Dans cette contribution, nous questionnons les explications traditionnelles de type fonctionnaliste ou rationaliste de la recherche comparative en éducation.

GUY PELLETIERFinlande-Québec au temps d’une décennie PISA : regards croisés de deux systèmes éducatifs

A plusieurs égards, la décennie des années 2000 en éducation fut celle de l’impact du Programme international pour le suivi des acquis des élèves (PISA) sur l’analyse, le bilan et l’évaluation des systèmes éducatifs nationaux des pays de l’Organisation de coopération et de développement économique (OCDE). Pourtant, les résultats aux épreuves PISA n’ont pas toujours eu le même accueil et n’ont pas été conçus dans ce dessein. Ce texte présente et analyse la situation entre la Finlande et le Québec sur le sujet. Il aborde un certain nombre d’exemples qui illustre la problématique et les mythes associés au recours aux résultats du PISA pour valoriser un système éducatif.

DAVID HOFFMAN, THOMAS BABILA SAMA, AHMAD EL-MASSRI, MIKA RAUNIO & MARJAANA KORHONENThe best science, the best science in Finnish – and English – or the best Finnish scientists ?

Cet article traite d’une « vérité inconfortable » (un mythe), à propos de la mise en place d’une politique ainsi que des pratiques équitables en matière de gestion du personnel, dans le système éducatif supérieur d’un pays admiré pour l’égalité sociale qui le caractérise. L’étude présente une enquête participative des auteurs, qui se fonde sur leurs expériences collectives et leurs perceptions de l’intérieur d’un système qui est en train de changer rapidement. Les auteurs révèlent un certain nombre d’affirmations et de mécanismes qui ont mené à un abandon du débat sur l’égalité dans les discussions portant sur politiques éducatives. L’ironie de cette situation est que le « miracle finlandais » se fonde sur des valeurs nordiques pour lesquelles l’égalité est centrale. Pour finir, les conséquences de ces dynamiques sont expliquées à partir des efforts constants d’internationalisation du supérieur dans ce contexte et de phénomènes produits par l’immigration qui sont d’une toute autre nature.

GUNILLA HOLM & JAN-ERIK MANSIKKA Multicultural education as policy and praxis in Finland : Heading in a problematic direction ?

Dans cet article, nous nous penchons sur la mise en place d’une éducation multiculturelle sur le terrain et dans les textes officiels, en Finlande. Bien que l’immigration augmente chaque année, elle demeure bien moindre en comparaison à d’autres pays européens. Mais on parle beaucoup du multiculturalisme dans la société finlandaise comme dans les médias. Les programmes éducatifs officiels l’intègrent également et ce de manière quasi systématique. Toutefois de nombreux chercheurs affirment que les enseignants ne sont pas toujours bien préparés pour faire face à la diversité dans la classe. Dans notre contribution, nous confrontons les lois et les textes officiels en relation avec le multiculturalisme en pratiques dans l’éducation finlandaise, à partir notamment d’expériences d’enseignants stagiaires et des points de vue d’enseignants à propos du multiculturalisme. Nous suggérons à la fin de l’article que l’éducation finlandaise devrait pouvoir proposer davantage d’espaces de négociations et de rencontres pour promouvoir le dialogue interculturel.

FRED DERVIN – Entretien avec Maarit KorhonenQu’est-ce qui ne va pas avec nos écoles ?

LUC LEGUERINELUn point de vue critique : Finlande, vers un modèle néolibéral ?

La Finlande ne cesse de faire parler d’elle depuis de nombreuses années en raison de son système éducatif. Mais ce système est-il réellement aussi bon qu’il le prétend, ou n’est-ce au contraire qu’un mythe des temps modernes ? C’est à cette question que nous essaierons de répondre dans cet article. Pour ce faire, nous commencerons par analyser les raisons pour lesquelles le système éducatif finlandais se prête beaucoup mieux que le système éducatif français aux études PISA. Nous présenterons également, à travers une analyse succincte du système éducatif finlandais, les limites des résultats de sa politique éducative notamment lors du passage du collège au lycée ou encore avec le système modulaire au lycée qui contredisent souvent les discours officiels. Enfin, nous tenterons de démontrer en quoi ce système éducatif pragmatique, dont la véritable ambition a été de remplacer le savoir par des compétences de type utilitaire, n’est que l’antichambre de ce qui se met en place au sein même des universités, pour répondre aux exigences de l’économie libérale des marchés dominée par le science et le développement économique.

VARIA

SANDOSS BEN ABID-ZARROUK & MARC WEISSEREfficacité du tutorat et étude des profils « efficaces » des tutorés

Le tutorat méthodologique est un dispositif visant, généralement, à améliorer les taux de passage de première en deuxième année de Licence, principalement pour les publics primo-entrants. Le but de cette contribution est de montrer l’efficacité de ce dispositif. C’est à partir d’une enquête effectuée en deux temps auprès des tutorés de l’université de Haute-Alsace (UHA) que nous avons pu mettre en évidence dans un premier temps que les étudiants qui suivaient le tutorat étaient proportionnellement plus nombreux à passer de la première à la seconde année de Licence et dans un second temps que les étudiants qui font le choix du tutorat dans une optique de réussite sont proportionnellement plus nombreux à obtenir leur L1 par rapport à ceux qui viennent y chercher un apport méthodologique.

MURIEL BRIANÇON, JEANNE MALLET & CHANTAL EYMARDL’Altérité, une notion vraiment sans histoire ? Éclairage philosophique sur une notion devenue incontournable en éducation

Cet article théorique utilise l’histoire des idées philosophiques pour définir l’altérité, notion essentielle pour comprendre le processus d’apprentissage dans le champ de l’éducation et de la formation mais dont l’usage semble aujourd’hui inflationniste et réducteur. Privée d’unité et de sens, cette notion est surtout privée d’histoire. Son étymologie grecque renvoie pourtant à la découverte accidentelle par Platon de l’altérité comme différence (to heteron) pour résoudre une controverse célèbre l’opposant aux Sophistes. Mais l’apparition puis l’expansion de ce terme ne peuvent se comprendre qu’au regard de l’histoire parallèle et contrariée du concept de non-être (mé éon). Victorieuse face au Non-Etre absolu, l’altérité pourrait alors être comprise comme une notion usurpatrice qui aurait oublié jusqu’à son identité. Pour l’utiliser de manière pertinente et précise, les Sciences de l’Education gagneraient à reconnaître ses origines historiques et philosophiques, sa tridimensionnalité et ses implications didactiques, son caractère transgressif et émancipateur ainsi que sa capacité enseignante.

MARIE-RENEE GUILLORETUne expérience pédagogique musicale en Grande Section Maternelle et Cours Préparatoire

Au cours d’une expérience pédagogique menée en Grande Section Maternelle et en Cours Préparatoire, les élèves ont composé leurs propres musiques. Mon interrogation porte sur la nature des processus mobilisés. Je me réfère à la conception vygotskienne selon laquelle la culture serait le foyer de zones proximales de développement, permettant à un apprenant d’agir avec un autre plus expert. Ce qui me guide vers l’identification de processus de recours aux ressources. Je repère alors comment les élèves font appel aux musiciens, à leurs pairs, et plus largement aux ressources du dispositif. Puis je prends en compte le décalage entre intention, ressources et production finalisée, jusqu’à formaliser la mise en œuvre de processus d’ajustement. Ces processus sont présentés comme les indicateurs d’une dynamique créative, opérant dans un dispositif qui favorise la mutualisation des ressources et leur appropriation mutuelle.

BERENGERE KOLLYLa mère, la directrice, la pédagogue et la lectrice : de l’utilisation du sexe comme variable pédagogique chez Pauline Kergomard

L’éducation maternelle dans l’école témoigne d’une proposition pédagogique nouvelle entendant puiser au sein de la famille, auprès des gestes maternels et des habitudes domestiques, des principes nouveaux pour l’école des tout-petits. Pauline Kergomard prend ainsi acte d’une circulation nécessaire entre famille et école, tout en établissant différenciation entre modèle réel et modèle philosophique : c’est en distance avec la mère réelle, mais ancrée dans le « génie maternel » que la directrice construit un type d’école nouveau. Cette distorsion entre réel et imaginaire révèle une particularité dans l’utilisation du sexe féminin, ici comme variable pédagogique. L’appartenance au sexe féminin de la mère, de la directrice, de la pédagogue elle-même et de ses lectrices, parce que comprise comme une variable historique et non biologique, peut ainsi devenir un levier d’innovation et de création, dans les conceptions et les pratiques pédagogiques.

CHRISTOPHE MICHAUTLes nouveaux outils de la tricherie scolaire au lycée

Avec l’arrivée des téléphones portables dans les classes et l’utilisation courante d’Internet dans les activités scolaires, les élèves ont davantage d’opportunités de plagier des documents ou de frauder lors des épreuves sur table. Les outils numériques se substituent-ils aux formes traditionnelles de tricherie ? Les élèves qui les utilisent présentent-il des caractéristiques particulières ? Nous émettrons l’hypothèse que ces nouveaux outils sont plus fréquemment utilisés par les élèves à faible capital scolaire et peu engagés dans les tâches scolaires. Les résultats de l’enquête réalisée auprès de 1909 lycéens révèlent que près de 20% d’entre eux ont déjà utilisé, au cours de leur scolarité, un téléphone portable pour tricher. Cependant, la tricherie avec l’aide d’une antisèche ou d’une calculatrice reste la plus fréquente. Les analyses multivariées montrent que certaines caractéristiques sont communes aux différents outils, d’autres plus spécifiques : les élèves préparant un baccalauréat général auront, toutes choses égales par ailleurs, plus souvent recours à une calculatrice alors que les élèves ayant rencontré des difficultés au cours de leur scolarité et s’investissant peu dans leurs études vont davantage utiliser un téléphone.

ALAIN PATRICK OLIVIERLa fonction de l’esthétique dans l’éducation : la théorie et l’action de Victor Cousin

Cet article montre comment la fondation théorique et les structures d’enseignement de l’esthétique en France telle que nous la pratiquons trouvent leur origine dans la théorie et l’action du philosophe Victor Cousin. Cette pénétration de l’esthétique dans le système éducatif fut en même temps limitée : plusieurs obstacles épistémologiques d’ordres idéologiques ou intrascientifiques expliquent pourquoi l’esthétique et l’enseignement philosophique lui-même occupent jusqu’à aujourd’hui une place spécifique à la fois marginale et centrale dans le système universitaire et dans le système d’enseignement général.

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