PRomotion des Initiatives Sociales en Milieux Educatifs

In Vous Nous Ils – le 19 septembre 2013 :

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Jean-Paul Delahaye, Directeur géné­ral de l’enseignement sco­laire, revient avec nous sur les grandes nou­veau­tés de cette ren­trée des classes 2013, et en tire un pre­mier bilan, deux semaines après.

Comment s’est pas­sée la ren­trée 2013 ?

La ren­trée s’est bien pas­sée grâce à la mobi­li­sa­tion de tous les per­son­nels, et grâce à une créa­tion de postes impor­tante, 7 500 en tout. Cela per­met de remé­dier à des dif­fi­cul­tés comme le rem­pla­ce­ment des ensei­gnants : 1 000 postes y sont dédiés, même si cela ne per­met pas encore de com­pen­ser les 5 000 postes sup­pri­més ces der­nières années. Cela per­met égale­ment de faire face à l’augmentation démo­gra­phique, puisque 60 000 élèves sup­plé­men­taires ont été accueillis en cette ren­trée, et enfin de mettre en œuvre cer­taines mesures de la loi de refon­da­tion de l’école, pro­mul­guée le 8 juillet. Par exemple, la sco­la­ri­sa­tion des enfants de moins de trois ans et le dis­po­si­tif "plus de maîtres que de classes". La pre­mière ren­trée de la refon­da­tion s’est donc bien passée.

Et la pre­mière ren­trée dans les Espé ?

Le pari a été tenu : en un temps très rapide, tous les textes régle­men­taires en appli­ca­tion de la loi du 8 juillet ont été pro­mul­gués entre juillet et août, toutes les Espé ont main­te­nant une exis­tence, un admi­nis­tra­teur pro­vi­soire, y com­pris les cinq écoles habi­li­tées pour un an seule­ment. Les équipes péda­go­giques qui asso­cient uni­ver­si­taires et pro­fes­sion­nels de ter­rain se mettent en place. Les aca­dé­mies ont par ailleurs accueilli les futurs pro­fes­seurs admis­sibles au deuxième concours, qui vont être sta­giaires à tiers temps et rému­né­rés à mi-temps. 6 000 emplois d’avenir pro­fes­seur vont par ailleurs être recru­tés dans les semaines qui viennent. Je rap­pelle que sur les 60 000 postes créés jusqu’en 2017, 27 000 seront consa­crés à la for­ma­tion des ensei­gnants. La qua­lité de l’enseignement est déter­mi­nante dans la réus­site des élèves, supé­rieure à l’impact des ori­gines sociales : d’où notre gros effort. La France renoue ainsi avec ce qui n’aurait jamais dû être aban­donné : la for­ma­tion des enseignants.

Quels sont les grands chiffres clés de cette rentrée ?

12 mil­lions d’élèves accueillis en tout. Parmi eux, 210 000 élèves en situa­tion de han­di­cap, sco­la­ri­sés en milieu ordi­naire. 840 000 per­son­nels du pre­mier et du second degrés et 7 500 postes d’enseignants créés dans l’enseignement public et privé, 3 350 postes d’enseignants créés pour le pre­mier degré et 10 000 contrats aidés pour une assis­tance admi­nis­tra­tive aux direc­teurs d’école. Dans le second degré, 4 200 postes créés ainsi que 10 000 contrats aidés pour l’encadrement des élèves dans les établis­se­ments plus en dif­fi­culté. Enfin, 130 postes de CPE créés, 350 postes d’auxiliaires de vie sco­laire pour accom­pa­gner les élèves en situa­tion de han­di­cap, 50 postes d’assistants sociaux, et 8000 contrats aidés pour ren­for­cer l’aide aux élèves en situa­tion de handicap.

Vincent Peillon a sou­haité mettre l’accent, dans la loi de refon­da­tion de l’école, sur le pri­maire. La réforme des rythmes sco­laires en est la mesure phare. Chaque enfant bénéficiera-t-il cette année d’activités péri­sco­laires, quelles peuvent-elles être et sont-elles vrai­ment en lien avec le temps scolaire ?

La réforme des rythmes sco­laires, c’est l’école qui orga­nise mieux son temps pour que les enfants soient mieux consi­dé­rés dans leur rythme d’apprentissage.

Il faut rap­pe­ler que nous sommes aujourd’hui une ano­ma­lie mon­diale : seule la France a osé concen­trer le temps sco­laire sur 144 jours dans une année. Comme si nous consi­dé­rions que le temps sco­laire est un far­deau dont il faut se débar­ras­ser en le concen­trant sur un nombre mini­mum de jours. Comment ima­gi­ner qu’un enfant de CP puisse encore se concen­trer, après 6 heures de cours, à 16 heures ? L’objectif de la réforme est d’améliorer les appren­tis­sages : d’où cette demi-journée sup­plé­men­taire, et tout le monde com­pren­dra qu’il est plus pro­fi­table à l’enfant de se concen­trer ou d’apprendre à lire le mer­credi matin qu’en fin de jour­née à 16 heures.

Comme les jour­nées de cours sont plus courtes, il y a néces­sité de bien arti­cu­ler ce temps sco­laire avec un temps péri-éducatif. Des acti­vi­tés de qua­lité, en lien avec le temps sco­laire, sont donc pro­po­sées aux enfants, en par­te­na­riat avec les col­lec­ti­vi­tés, les asso­cia­tions, la CAF, les autres minis­tères. Cela repré­sente bien évidem­ment des dif­fi­cul­tés d’organisation, un coût, dont une par­tie est prise pour la pre­mière fois en charge par notre fonds d’amorçage. Avec la semaine de quatre jours, les enfants étaient dans la nature toute une jour­née le mer­credi : or seuls 20% d’entre eux avaient les moyens de béné­fi­cier d’activités. Avec la réforme, ce sont 80% des enfants qui vont en béné­fi­cier : c’est avant tout une mesure de justice.

En cette ren­trée, 1,3 mil­lion d’élèves vont béné­fi­cier de ces nou­veaux rythmes sco­laires, et parmi les acti­vi­tés péri­sco­laires le plus sou­vent pro­po­sées, on peut citer la musique, la danse, les arts visuels, le théâtre, mais aussi l’éveil scien­ti­fique, le sport, des ate­liers numé­riques, et ins­crites dans le temps de ser­vice des ensei­gnants, des acti­vi­tés péda­go­giques com­plé­men­taires qui per­met­tront aux élèves de béné­fi­cier d’aide per­son­na­li­sée, de soutien…

Une des autres mesures phare de la loi de refon­da­tion est le dis­po­si­tif "Plus de maîtres que de classes". Pouvez-vous nous le présenter ?

Il s’agit d’un dis­po­si­tif ambi­tieux dont le but est de faire évoluer les pra­tiques péda­go­giques pour mieux enca­drer les élèves dans les zones les plus fra­giles. Avec un maître de plus dans l’école, nous ne créons pas une classe sup­plé­men­taire : une école de trois classes par exemple comp­tera bien quatre maîtres en tout. Nous recru­tons des maîtres expé­ri­men­tés, ayant choisi de tra­vailler dans ce dis­po­si­tif, ins­crit dans le pro­jet d’école. En cette ren­trée, nous consa­crons donc 1000 postes à ce dis­po­si­tif, dans les zones les plus en dif­fi­culté. Ce dis­po­si­tif, suivi de près par les ins­pec­tions géné­rales et la direc­tion de l’évaluation du minis­tère, va faire l’objet d’évaluations, pour le déve­lop­per et le péren­ni­ser en fonc­tion des obser­va­tions faites.

La loi com­prend égale­ment des mesures sur l’art et les langues vivantes à l’école, en par­ti­cu­lier au CP. Vont-elles entrer en vigueur dès cette rentrée ?

Ces mesures concer­nant les par­cours d’éducation artis­tique et les langues vivantes à l’école entre­ront en vigueur pro­gres­si­ve­ment. Elles sont en lien direct avec les pro­grammes : l’enseignement d’une langue vivante dès le CP sera effec­tive à la ren­trée 2015. Auparavant, nous allons ins­tal­ler le Conseil Supérieur des Programmes d’ici quelques semaines. Son rôle sera de réécrire le socle com­mun de connais­sances, de com­pé­tences et de culture, et les pro­grammes, soi­gneu­se­ment arti­cu­lés avec ce socle. Pour ce qui est des par­cours d’éducation artis­tique et cultu­relle, nous pré­pa­rons un guide pour aider les équipes ensei­gnantes à les conce­voir, en lien avec le minis­tère de la Culture.

Le lien école-collège est égale­ment très impor­tant dans la loi : où en est-on de sa mise en œuvre, et les conseils école-collège fonctionnent-ils déjà ?

Nous ne par­tons pas de rien : dans les zones en dif­fi­culté et dans l’éducation prio­ri­taire, les écoles et les col­lèges tra­vaillent déjà ensemble. Nous vou­lons prendre appui sur ces expé­riences réus­sies pour les géné­ra­li­ser. Dans le sys­tème éduca­tif, l’articulation école-collège CM2-6e, est capi­tale. Le conseil école-collège va se mettre en place cette année, mais jouera plei­ne­ment son rôle l’an pro­chain dans le cadre de la créa­tion d’un cycle nou­veau : un décret publié cet été réor­ga­nise les cycles sco­laires pour la ren­trée 2014, et crée un cycle CM1-CM2-6e. Le conseil école-collège – qui ne sera pas une nou­velle ins­tance admi­nis­tra­tive– aura une mis­sion essen­tiel­le­ment péda­go­gique et fera vivre ce cycle. Les conseils d’école et les conseils d’administration des col­lèges conti­nue­ront à exis­ter plei­ne­ment, et le conseil école-collège sera le point de liai­son péda­go­gique entre les établissements.

Une autre arti­cu­la­tion sur laquelle nous allons tra­vailler est l’articulation 3e-2nde. Nous allons faire cette année sco­laire 2013–2014 le bilan de la réforme du lycée de 2010, et en fonc­tion des diag­nos­tics faits, le Ministre fera des propositions.

Autre élément fon­da­men­tal de la loi : le numé­rique. En cette ren­trée 2013, que proposez-vous aux enseignants ? 

Le minis­tère a défini une véri­table stra­té­gie numé­rique pour le sys­tème éduca­tif. En cette ren­trée 2013, plu­sieurs nou­veaux ser­vices en ligne sont pro­po­sés aux ensei­gnants. Par exemple, "English for schools", déve­loppé par le CNED, uti­li­sable par les ensei­gnants pour les cours en classe, mais égale­ment pour les élèves chez eux. Autre res­source mise en place par le CNED pour les pro­fes­seurs des écoles : "Les Fondamentaux" pour les aider à tra­vailler sur les fon­da­men­taux que sont le fran­çais et les mathé­ma­tiques. Le por­tail "Eduthèque", des­tiné aux ensei­gnants du pre­mier et second degrés, va pro­po­ser des images, des vidéos, des fichiers son, des extraits de texte, pour la construc­tion de séquences péda­go­giques et de tra­vaux en classe.

Du côté des élèves, des res­sources d’accompagnement vont être pro­po­sées, telles "Prép’exam" et  "Ma Seconde Chance", mise en ligne par l’Onisep pour les décro­cheurs. Par ailleurs, 30 000 élèves de 6e de l’éducation prio­ri­taire auront une aide au tra­vail per­son­nel en ligne grâce à "D’col".

Enfin, les ensei­gnants du pre­mier degré pour­ront béné­fi­cier de modules de for­ma­tion conti­nue dis­pen­sés par les ins­pec­teurs péda­go­giques, par le biais de la pla­te­forme M@gistère .

Des res­sources numé­riques seront-elles égale­ment pro­po­sées aux ensei­gnants pour les aider dans la mise en pra­tique de la Charte de la laïcité ?

Pour accom­pa­gner les ensei­gnants, le site "Eduscol" va très pro­chai­ne­ment mettre en ligne un cer­tain nombre de res­sources péda­go­giques per­met­tant de don­ner aux ensei­gnants des outils pour faire par­ta­ger cette valeur essentielle.

Quels sont vos pro­chains gros chantiers ? 

La refon­da­tion est avant tout péda­go­gique. Nous allons tout d’abord refon­der l’éducation prio­ri­taire, et au préa­lable, en faire un diag­nos­tic, car elle a été conçue il y a plus de trente ans.
Le second gros chan­tier est celui du col­lège : le col­lège unique date de 1975. Le main­tien d’un tronc com­mun pour tous les élèves est pour nous essen­tiel, mais col­lège unique ne veut pas dire col­lège uni­forme. Il y a donc un gros tra­vail à effec­tuer pour repen­ser le collège.

Un troi­sième chan­tier donne sens à tout cela : c’est celui de pro­grammes. D’où la créa­tion du Conseil Supérieur des pro­grammes, que le ministre va ins­tal­ler dans les pro­chaines semaines. Le Conseil va d’abord revoir les textes de l’école mater­nelle : les nou­velles orien­ta­tions entre­ront en vigueur dès sep­tembre pro­chain. Le socle com­mun de connais­sances, de com­pé­tences et de culture, ainsi que les nou­veaux pro­grammes de l’école et du col­lège, seront eux opé­ra­tion­nels pour la ren­trée 2015.

Suite au bilan sur la réforme du lycée, nous tra­vaille­rons plus tard sur les pro­grammes du lycée.

Tous les per­son­nels seront asso­ciés : la refon­da­tion, c’est du contenu, mais c’est égale­ment une méthode, celle de la concer­ta­tion. C’est ainsi que dans quelques jours, nous allons invi­ter les pro­fes­seurs des écoles à faire le bilan des pro­grammes de 2008.

Enfin, un qua­trième gros chan­tier, c’est la réflexion sur les dif­fé­rents métiers qui sont à l’œuvre dans le sys­tème éduca­tif : ensei­gnant des Rased, direc­teur d’école, CPE…

Cette réflexion a déjà démarré, car nous ne pou­vions pas ouvrir les Espé sans un réfé­ren­tiel de com­pé­tences atten­dues de tous les métiers du pro­fes­so­rat et de l’éducation. Nous avons tra­vaillé durant six mois à ce réfé­ren­tiel, un arrêté le pré­sen­tant a été publié cet été, et chose rare, il a été voté à la quasi-unanimité par le Conseil Supérieur de l’Education.

Sandra Ktourza

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