PRomotion des Initiatives Sociales en Milieux Educatifs

In L’Observateur Plus – le 20 septembre 2013 :

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LE PLUS. La réforme des rythmes scolaires proposée par Vincent Peillon ne fait pas l’unanimité. Selon une enquête réalisée par la Peep, 68% des parents d’élèves ne seraient pas convaincus par ces mesures. Que faut-il en penser ? Francis Chouat, maire d’Evry (PS), a testé la nouvelle formule. Pour lui, il n’y a que du positif. 

Édité par Louise Auvitu 

L’avenir de nos enfants se joue à l’école primaire ! Christian Baudelot et Roger Establet [1] en faisaient la démonstration dans "L’école primaire divise". C’était il y a déjà 40 ans ! On sait depuis qu’un enfant qui redouble en élémentaire n’a quasiment aucune chance d’effectuer des études supérieures. Et pourtant un enfant sur cinq redouble encore en primaire ! 

Les sociologues établissaient parallèlement que l’influence grandissante du contexte social sur la réussite éducative des enfants ne pouvait s’infléchir qu’avec un accompagnement scolaire fondé sur la "sécurisation" des apprentissages plutôt que sur la sélection par le résultat et l’inflation des savoirs enseignés. 

Grosso modo, pour qu’un enfant issu d’un milieu populaire accède aux études supérieures, il faut une école primaire solide et qui garantisse des acquis plutôt qu’une école qui sélectionne. 

Enfin, le constat sociologique est sans appel : sans niveau suffisant sur les acquis de base, comme la lecture, l’écriture ou les mathématiques, l’accès au marché du travail [2] devient un parcours du combattant. 

Or, la dernière évaluation de l’OCDE, en 2009 [3], parmi les élèves français, de milieu social comparable à celui d’Evry, 20 % des élèves de 15 ans avait un niveau insuffisant de compréhension de l’écrit ; et c’était le cas de 22% d’entre eux en mathématiques. Un enfant sur cinq est donc laissé à l’abandon ! 

Un dispositif solide qui donne de bons résultats 

Conscient de ces constats, Evry a décidé de faire de l’accès à une éducation juste et dégagée du contexte social sa priorité : les 2/3 de ses écoles sont placées en Réseau de réussite scolaire, ce qui permet d’alléger les classes ; gratuité totale des fournitures scolaires pour tous les enfants ; accompagnement périscolaire assuré par des enseignants et des animateurs recrutés, encadrés et rétribués par la ville, et participation de la ville aux autres dispositifs d’accompagnement et de réussite, qui associent les collectivités territoriales et l’État. 

Cette mobilisation de tous permet aux enfants d’Evry de bénéficier d’un dispositif solide qui donne des résultats. Les enfants qui sortent des écoles d’Evry ont-ils de meilleurs résultats de sortie de CM2 que ceux attendus ? 81 % des enfants d’Evry réussissent leur brevet, là où 75 % étaient attendus de manière normative. 

Ce qui a été possible à Evry l’est partout, et, pour cela, oui, il était temps de mettre plus d’enseignants face à moins d’enfants. Oui, il était temps de former nos enseignants à leur métier. Oui, il était temps de se préoccuper de donner à chaque enfant un socle de base de connaissances qui lui ouvre les portes de la citoyenneté, comme le voulaient Claude Thélot et Christian Forestier. Oui, il est temps de se préoccuper durablement de reconstruire une Éducation nationale qui privilégie la massification des connaissances à la sélection en vue de former des élites ! 

Le Général De Gaulle aurait trouvé une explication que les sociologues confirment : "Tout porte à penser que l’élite est bonne, novatrice et abondante si la masse est bien formée et l’échec le plus rare possible". 

Croire à nouveau en l’école 

Aujourd’hui, avec environ 1/5 d’une génération en situation d’échec, à 15 ans, en compréhension de l’écrit, en mathématiques et en sciences, la France a un gros effort à fournir pour assurer la formation de base de tous les élèves. Tandis que la France met 25 % de ses enfants en échec scolaire, et ne forme qu’un peu plus de 10 % de très bons élèves, les Finlandais, qui ont réduit l’échec scolaire à 8 %, forment une élite de mathématiciens de 25 % ! 

Oui, enfin, il était temps de réformer les rythmes scolaires et laisser plus de place aux autres formes d’apprentissages et d’éveil aux enfants. Alors même que c’est la France qui consacre plus d’heures d’enseignement en Europe, c’est aussi le pays qui a les plus mauvais résultats lors des comparaisons internationales. Et il fallait que la réforme des rythmes scolaires rime avec amélioration des conditions d’apprentissage pour les enfants, éveil à la diversité du monde et gratuité républicaine. 

C’est cette politique, menée à Evry, qui, conduite partout dans les territoires, donnera aux familles l’envie de croire à nouveau en l’école de la République. 

[1] Christian Baudelot et Roger Establet, "L’école primaire divise", François Maspero, Paris, 1975.

[2] Bref CEREQ n° 303  décembre 2012, "S’insérer à la sortie de l’enseignement secondaire". Si en 2012, le taux de chômage des jeunes issus de l’enseignement secondaire s’établit au niveau inquiétant de 26 %, il varie de 41 % pour les non diplômés à 13 % pour les titulaires d’un diplôme de niveau baccalauréat. Cette relation entre diplôme et chômage fut établie dans les années 1990, dès les premières enquêtes d’insertion.

[3] PISA 2009

 

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