PRomotion des Initiatives Sociales en Milieux Educatifs

In Localtis.info – le 11 mars 2014 :

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Trente-deux ans après avoir reçu la compétence de droit commun en matière de formation professionnelle, les régions deviennent les pilotes d’un service public régional qui va de l’orientation à la formation professionnelle tout au long de la vie, ce qu’elles réclamaient depuis des années. La loi du 5 mars dernier leur donne aussi la possibilité de recourir à des services d’intérêt économique général (Sieg) pour les publics en difficulté et de coordonner l’achat de formations collectives pour les demandeurs d’emploi. En matière d’apprentissage, elles sont satisfaites de la transparence imposée aux acteurs dans l’attribution de la nouvelle taxe.

La loi du 5 mars 2014 relative à la formation professionnelle, à l’emploi et à la démocratie sociale consacre la région comme pilote central en matière de formation professionnelle. D’ultimes transferts lui confèrent un bloc de compétence homogène. Ainsi, la région est désormais compétente pour l’ensemble des publics, y compris les détenus, les Français établis hors de France et les handicapés, qui restaient jusqu’à maintenant de la compétence de l’Etat. La région est également compétente vis-à-vis des personnes ayant quitté le système scolaire : elle organisera les actions de lutte contre l’illettrisme et les formations permettant l’acquisition des compétences clés, en complément de la politique conduite par l’Etat, sachant que, selon le ministère du Travail, 2,5 millions de personnes ne maîtrisent pas suffisamment la lecture, l’écriture ou le calcul.
Ainsi, se termine le chantier ouvert en 1982 ! L’ensemble de ces compétences s’exerce dans un nouveau cadre : les régions sont chargées d’organiser et de financer le service public régional de la formation professionnelle. Elles doivent organiser la coordination en matière d’emploi, de formation et d’orientation, de tous les acteurs concernés, comme Pôle emploi, Cap emploi, les missions locales (voir notre article du 11 mars 2014). "Il s’agit d’une nette avancée même si on aurait pu aller plus loin, commente à Localtis Jean-Paul Denanot, président de la région Limousin et président de la commission formation de l’Association des régions de France (ARF), nous ne demandions pas d’être chef de tout mais d’assurer la coordination, ce que la loi nous confie aujourd’hui." Et le président de la région Limousin de préciser que ce rôle se retrouve dans plusieurs lois, dont la loi du 8 juillet 2013 d’orientation et de programmation pour la refondation de l’école de la République. D’après cette loi, la région arrête ainsi la carte régionale des formations professionnelles initiales.

Décrochage scolaire

La loi du 5 mars 2014 instaure un nouveau service public régional d’orientation. Là encore, la région jouera le rôle de chef d’orchestre, ce qui n’était pas le cas jusqu’ici avec le service public de l’orientation. Elle organisera ainsi sur son territoire le réseau des centres et points d’information. Dans ce cadre, la région se voit aussi confier la responsabilité d’animer la lutte contre le décrochage scolaire, afin d’offrir un projet professionnel à chaque jeune dans cette situation. Par ailleurs, une nouvelle offre de service est créée dans le cadre du service public régional d’orientation : le conseil en évolution professionnelle, qui pourra être proposé par les cinq principaux réseaux de conseils en orientation et en insertion (Opacif / Fongecif, Pôle emploi, missions locales, Cap emploi, Apec). Ce conseil se traduira par un accompagnement renforcé pouvant déboucher le cas échéant sur un parcours de formation.
La loi remet à plat la gouvernance entre les quatre acteurs clés : l’Etat, qui reste l’autorité compétente en matière d’emploi, les régions, en tant que responsables de la formation professionnelle et de l’orientation, et les partenaires sociaux qui ont la responsabilité de la formation des salariés. L’idée sous-jacente est que, comme la formation continue se déroule tout au long de la vie, rien ne doit être fait isolément. Concrètement, la loi fusionne le Conseil national de la formation professionnelle tout au long de la vie (CNFPTLV) avec le Conseil national de l’emploi (CNE), réunis en un Conseil national de l’emploi, de la formation et de l’orientation professionnelles (Cnefop). Au niveau régional aussi, les instances sont simplifiées. Des comités régionaux de l’emploi, de la formation professionnelle et de l’orientation professionnelles (Crefop) sont créés, issus de la fusion des comités de coordination régionaux de l’emploi et de la formation professionnelle (CCREFP) avec les conseils régionaux de l’emploi. Ces comités réunissent l’Etat, la région et les partenaires sociaux régionaux qui sont les principaux financeurs de la formation professionnelle et de l’apprentissage.

Sieg : "un combat assez long"

Aurtre avancée : la région coordonne l’achat public de formations pour son compte, et, concernant les formations collectives, pour le compte de Pôle emploi (ainsi Pôle emploi ne pourra procéder à l’achat de formations collectives qu’en passant une convention avec la région). La loi offre aussi aux départements qui le souhaitent la possibilité d’effectuer l’achat public de formation.
"Les régions avaient souhaité être les seules à passer les commandes, mais pour cela, il aurait fallu s’assurer que les budgets de Pôle emploi soient sanctuarisés. Finalement, nous avons trouvé un bon équilibre, avec la coordination des achats publics avec Pôle emploi", explique Jean-Paul Denanot. Des regroupements de commandes avaient d’ailleurs déjà lieu dans certaines régions, avec Pôle emploi. "Cela a fait jurisprudence", souligne le président du Limousin.
La loi instaure aussi la possibilité pour les régions de recourir à des services d’intérêt économique général (Sieg) pour la formation des publics en difficulté. La région va ainsi pouvoir habiliter des organismes pour la mise en œuvre d’actions de formation en direction de ces personnes (jeunes et adultes rencontrant des difficultés particulières d’insertion professionnelle ou d’apprentissage). En clair, les régions pourront se soustraire aux procédures d’appels d’offres tout en se protégeant juridiquement. Le gouvernement a cherché à se rapprocher du "Paquet Almunia" du 20 décembre 2011 qui a assoupli les règles dans ce domaine en étendant la notion de Sieg à "l’accès et à la réinsertion sur le marché du travail". "C’était un combat assez long, nous sommes satisfaits d’avoir été entendus, se réjouit Jean-Paul Denanot. Nous allons enfin pouvoir travailler sereinement sur la commande publique." De nombreuses régions avaient déjà pris les devants…
Les régions qui le voudront pourront par ailleurs se voir céder par l’Etat, à titre gratuit, les locaux utilisés par l’Afpa. La précédente réforme de 2009 comportait déjà des dispositions en ce sens, mais elles avaient été annulées par le Conseil constitutionnel au motif que les conditions de ce transfert ne permettaient pas de garantir que les biens demeureraient affectés au "service public". Cette fois-ci, le législateur a pris ses précautions en précisant que "les immeubles transférés demeurent affectés aux missions de service publics assurées par l’Afpa". Toutefois, la loi a prévu une dérogation, si les deux parties s’accordent "par voie conventionnelle" sur l’utilisation d’un autre immeuble, dans des conditions "au moins équivalentes".

Transparence dans l’attribution de la taxe d’apprentissage

Enfin, dernier point et non des moindres : la réforme de l’apprentissage. La loi sur la formation instaure une remise à plat du financement de l’apprentissage, avec la fusion de la taxe d’apprentissage et de la contribution au développement de l’apprentissage (CDA) en un prélèvement unique sur les entreprises de 0,68% de leur masse salariale. Elle revoit aussi la répartition de cette taxe entre les régions, les centres de formation d’apprentis (CFA) et les écoles délivrant des formations professionnelles. Mais la répartition exacte a été renvoyée à la loi de finances pour 2015 ; les régions espérant 55% de son produit. "L’opération sera relativement neutre, explique Jean-Paul Denanot, en écho aux propos du président de l’ARF à Localtis le 7 mars (voir notre article du 10 mars ci-contre), en revanche nous considérons comme une avancée la transparence dans l’attribution de la taxe, que nous réclamions à cor et à cri." Le bureau du Crefop est ainsi "le lieu de la concertation sur la répartition des fonds de la taxe d’apprentissage non affectés par les entreprises", dispose la loi. Il se charge aussi de déterminer les listes des formations éligibles au nouveau compte personnel de formation (CPF), ce que souhaitaient aussi les régions. Celles-ci accueillent enfin avec satisfaction la disparition des contrats d’objectifs et de moyens (COM) conclus avec l’Etat en matière d’apprentissage, qui va leur permettre d’affecter librement le produit de la nouvelle taxe d’apprentissage. Même si cette suppression risque de rendre plus difficile encore l’objectif du gouvernement d’arriver à 500.000 apprentis d’ici à 2017. Enfin, la loi donne la possibilité de décentraliser dans des conditions sécurisées les derniers CFA nationaux.

E.Z. et M.T.

Apprentissage : la baisse continue !
D’après les chiffres de la Dares, publiés le 11 mars 2014, le nombre de contrats d’apprentissage a encore baissé de 20% en Métropole en janvier 2014 par rapport à janvier 2013, soit 14.178 contrats contre 17.855 un an plus tôt. Les contrats d’apprentissage ont déjà enregistré une baisse de 8% sur l’année 2013. Du côté des contrats de professionnalisation, la chute est encore plus nette. Leur nombre passe de 11.148 en janvier 2013 à 7.522 en janvier 2014, ce qui représente à une chute de 32,5%, après une baisse de 5,7% l’an dernier.
E.Z.
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