PRomotion des Initiatives Sociales en Milieux Educatifs

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"Quels sont les arguments de chacun des "camps" ?

Claire
Leconte : "La semaine de 4 jours dérégule complètement
l’horloge du rythme veille-sommeil chez la plupart des
enfants"
C. L. : Il faut d’abord définir les « camps ». Celui des politiques d’abord, qui selon le choix de société qui est le leur, n’ont pas forcément la même perception de ce que doit faire l’école pour aller mieux et servir équitablement tous les enfants. Ainsi par exemple, Xavier Darcos avait déclaré à la rentrée 2008, que l’école « est un service aux familles », ce qui lui confère une allure de garderie, sans plus. Luc Ferry quant à lui, peu après, déclarait que grâce aux deux heures récupérées pour l’aide personnalisée et renvoyée aux enseignants tout venant, 8000 postes d’enseignants spécialisés pourraient ainsi être économisés ! Alors que dans son programme, François Hollande déclare que sa priorité ira aux écoles maternelles et primaires pour l’affectation des nouveaux personnels, car c’est là selon lui que les premières difficultés se manifestent et que l’échec scolaire se forme ainsi qu’aux zones en difficulté. « Dans l’intérêt de nos enfants, je reverrai les rythmes scolaires qui n’ont aucun équivalent en Europe. ».

Le « camp » des parents, maintenant. Ceux qui travaillent tous les deux tous les jours s’inquiètent d’abord et avant tout de ce qu’il sera fait de leurs enfants s’ils finissent plus tôt l’école. Ceux qui ont pris des RTT pour être à la maison le mercredi n’aiment pas avoir à penser devoir modifier ces RTT, alors qu’on pourrait leur proposer de finir plus tôt leur propre journée de travail pour reprendre aussi plus tôt leurs enfants. Ceux qui ne travaillent pas le week end (pas tous, loin de là, cela aussi on l’oublie trop souvent), se refusent catégoriquement de reprendre le chemin de l’école avec leur enfant le samedi, alors qu’on pourrait leur démontrer à quel point cela peut devenir un bon moment pour tout le monde.

Du côté des enseignants, les arguments sont plus souvent schizophrènes : ils nous disent très souvent qu’en tant qu’enseignant, ils admettent que les 4 jours les contraignent énormément dans le déroulement du programme, qu’ils ont finalement supprimé plusieurs parties du programme, comme l’EPS par exemple, qui devient un peu une variable d’ajustement sur le temps (si on a le temps, on en fera). Mais en tant que parent, ils apprécient d’avoir leur enfant le mercredi et le samedi. Mais le plus souvent ils reconnaissent quand même que l’organisation actuelle n’a rien de confortable pour les élèves.

Le « camp » des élus, lui, fait forcément ses comptes. Combien devra mettre la collectivité s’il faut prendre en charge les enfants pendant plus de temps qu’actuellement ? Mais on peut leur expliquer qu’un autre fonctionnement est possible, en mutualisant les moyens mis à disposition des associations par exemple, pour que les activités mises en œuvre par ces associations puissent servir à tous les enfants, et non pas uniquement aux quelques inscrits. On peut aussi expliquer qu’une bonne organisation des temps éducatifs dont font partie les temps scolaires, permettrait de professionnaliser les animateurs qui s’occupent des enfants sur les temps périscolaires, ce qui pourrait être une réponse au chômage des jeunes et ce qui permettrait également de leur demander la formation nécessaire pour que les activités périéducatives ainsi mises en place aient toutes les qualités attendues.
Souvent aussi ces collectivités s’inquiètent des différences qui pourraient apparaître par le fait que les moyens ne sont pas les mêmes d’une collectivité à l’autre. On peut aussi les rassurer en leur affirmant qu’il faut surtout faire preuve d’inventivité et de créativité quant aux activités à proposer aux enfants, plutôt que de penser qu’il faut forcément des infrastructures coûteuses pour ce faire. Du théâtre, du mime, de la magie, des fresques dans la cour de l’école, du basket, de la découverte de la nature, du journalisme, de la vidéo, etc, nombreuses sont les activités possibles à mettre en œuvre juste avec un animateur motivé et compétent.

Le camp des associations, clubs sportifs, ou autres, qui interviennent auprès des enfants sur les temps extra-scolaires, croit souvent perdre du public si on fait aller les enfants une journée supplémentaire. En fait c’est qu’ils ne voient pas qu’au contraire, cela permettrait de les avoir à des moments plus favorables que tard le soir, ou tous regroupés sur une même journée, mais aussi qu’un bon partenariat avec l’éducation nationale devrait permettre de faire découvrir aux enfants des activités qui pourraient ensuite les amener à vouloir les poursuivre au sein de ces mêmes organisations.

Le camp des enfants quant à lui a du mal à répondre à une question qui leur demanderait s’ils veulent ou non aller à l’école cinq jours plutôt que quatre, mais on peut leur montrer que ceux qui bénéficient déjà d’organisations en cinq jours et ont donc la chance de faire de nombreuses activités nouvelles, ou peuvent, pour certains d’entre eux, rentrer plus tôt chez eux, sont heureux de fonctionner ainsi.

Quant aux chronobiologistes, dont je suis, nous défendons depuis très longtemps l’idée qu’il faut organiser une semaine de classe respectant le plus possible les rythmes des enfants. Ainsi la semaine de 4 jours dérégule complètement l’horloge du rythme veille-sommeil chez la plupart des enfants, car ceux-ci prennent la mauvaise habitude de se coucher tard la veille d’un jour où ils n’ont pas classe, ce qui de fait se reproduit au moins trois fois par semaine. Les parents ne savent pas assez que la soit-disant grasse matinée que font leurs enfants les lendemains de couchers tardifs ne permet nullement de récupérer la fatigue accumulée, car celle-ci l’est justement sur le sommeil de début de nuit qui disparaît dès qu’on retarde son heure de coucher. De même le retard de lever, et donc de l’horloge de l’éveil spontané, dérègle l’ensemble des autres horloges ce qui explique les mauvaises sensations que l’on a quand on se lève plus tard que d’habitude. Distribuer sur la semaine le plus de matinées possibles de classes permet de réguler ce rythme, fondamental au bien-être des enfants."

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Categories: 4.2 Société

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