PRomotion des Initiatives Sociales en Milieux Educatifs

Article pour œLa psychologie de la motivation

Hubert MONTAGNER, docteur ès Sciences en psychophysiologie, Professeur des Universités en retraite, ancien Directeur de Recherche à
l’INSERM

On ne peut plus rechercher des explications à l’échec scolaire, plus généralement aux échecs et autres difficultés de l’enfant, en s’abritant
derrière les seuls déficits réels ou présumés de ses processus cognitifs et/ou ses supposés petits moyens intellectuels. En effet, les données
de la recherche fondamentale sur le développement individuel, les consultations et observations cliniques, ainsi que le vécu des éducateurs
attentifs se rejoignent pour révéler ou suggérer que les déficits, blocages, inhibitions, anomalies, «retards», dysfonctionnements,
déconstructions … ne peuvent être bien appréhendés que si les enfants sont considérés dans leur globalité et dans leurs différents lieux de
vie.

On peut alors examiner comment sont imbriquées à chaque âge les constructions corporelles, biologiques, psychologiques et
intellectuelles du petit de l’Homme en situation d’échec, et comment elles peuvent être remodelées, réorientées et/ou réorganisées d’un âge à
l’autre par les influences de l’environnement. Mais, une telle démarche n’a de sens que par comparaison avec les enfants qui ne sont pas en
échec, en particulier ceux qui sont installés dans une «spirale» de réussite. L’ensemble des comparaisons entre les enfants de tous âges, de toutes origines sociales et de tous milieux culturels et ethniques, conduisent à une nouvelle approche du développement et du devenir de
l’enfant, quelles que soient les particularités empêchantes (anomalie génétique, handicap, «troubles du développement», «troubles» du
comportement», «troubles du langage» …).

LA SECURITE AFFECTIVE, CLE ET PLATE-FORME DU DEVELOPPEMENT INDIVIDUEL

L’une des priorités majeures de la famille, de l’école et de la société devrait être de créer un éventail de conditions qui permettent à chaque
enfant de relativiser, dépasser ou «déminer» les peurs, blocages et inhibitions qui le paralysent et qui sont liés à son histoire personnelle (et à celle de sa famille). Surtout lorsqu’ils sont renforcés au quotidien par les empilements insécurisants du milieu familial (maladie, pauvreté,
conditions de vie stressantes, maltraitance, chômage, conflits récurrents …). Mais aussi, par leur vécu dans le groupe de pairs (enfants exclus,
humiliés, boucs émissaires ou souffre-douleur), en classe et à l’école (enfants qui ont le sentiment de ne pas être aimés par le(s) professeur(s)et/ou par l’école, voire d’être rejetés).

Une condition essentielle est que les enfants puissent s’installer dans la sécurité affective, clé et plate-forme du développement individuel,
c’est-à-dire qu’ils aient la possibilité de former et conforter le sentiment qu’ils ne sont pas abandonnés, délaissés, maltraités, ignorés ou en
danger. Ils ne manifestent pas alors de conduites de peur ou de détresse aigües, durables ou récurrentes au moment d’une séparation avec la ou les personnes d’attachement initial, à la suite d’un changement d’environnement ou à l’occasion d’un évènement anxiogène.

Dans ces situations et contextes, l’observation de leurs comportements et l’écoute de leurs propos ne permettent pas de déceler une anxiété ou des angoisses persistantes (ne pouvant développer ici les indicateurs de sécurité affective, je renvoie à «L’arbre enfant» que j’ai publié en 2006).
En d’autres termes, les enfants installés dans la sécurité affective
(on les dit sécures) apparaissent adaptés et adaptables à leurs différents environnements et partenaires.

La sécurité affective est la sève qui ouvre en grand les vannes des constructions majeures de la vie. En échappant alors à ses peurs, blocages et inhibitions, le petit de l’Homme peut développer la confiance en soi et la confiance dans autrui (il n’hésite pas à s’engager sans peur dans l’exploration de son environnement et de ses ressources, il initie et accepte les contacts avec ses différents partenaires : voir les publications de H. MONTAGNER, 1995-2006 et de H. MONTAGNER et al. 1993-2002). Il peut ainsi acquérir l’estime de soi. Tous les enfants peuvent alors libérer sans retenue toute la gamme de leurs émotions, découvrir, comprendre et partager celles de leurs partenaires, pénétrer dans l’univers psychique des personnages réels ou virtuels, notamment ceux dont on lui parle (personnes connus, personnages imaginés, animaux familiers ou autres…). Ils libèrent en même temps le mode d’expression, de communication et de pensée qui en fait des êtres unique dans le concert du vivant : le langage oral. La libération imbriquée des émotions et du langage oral permet à chacun d’initier et d’accepter des interactions accordées avec ses différents partenaires, c’est-à-dire les ajustements comportementaux, émotionnels, affectifs et rythmiques qui sont nécessaires pour nouer un ou plusieurs attachements sécures (interactions accordées ou accordages viennent de l’anglais «attunement», STERN, 1985).

«Parallèlement», et là aussi de façon imbriquée, l’installation des enfants dans la sécurité affective, la confiance en soi et dans autrui, et
l’estime de soi, leur permet de libérer et structurer les compétences universelles qui sous-tendent les systèmes de communication, les
processus de socialisation, les habiletés motrices et les conquêtes spatiales : les compétences-socles (voir plus loin). La libération des
émotions, du langage oral et des compétences-socles permet à chacun de rendre lisibles et fonctionnels des processus cognitifs qui étaient
masqués ou enfouis et d’en acquérir d’autres avec l’entrée dans les apprentissages. Même quand il est porteur d’une anomalie génétique, d’un handicap, d’un «trouble» du développement ou du comportement.

LES RESSOURCES DES ENFANTS SECURES

Au cours des interactions avec les pairs ou les professionnels, les enfants sécures libèrent, selon le contexte et la situation, les indicateurs
comportementaux, vocaux et langagiers qui traduisent l’une ou l’autre des six émotions considérées comme innées et universelles (joie,
tristesse, colère, peur, surprise, dégoût) soit à leur initiative, soit en réponse.

En effet, selon ce qu’ils perçoivent chez le partenaire, ils
sourient, rient aux éclats ou jubilent, expriment des mimiques, attitudes, gestes et vocalisations de tristesse, de colère ou de peur, se
montrent surpris ou affichent des «mimiques vocales et langagières» de dégoût. Ils savent aussi faire comprendre leurs intentions par des
comportements, vocalisations et/ou paroles tout à fait explicites (gestes de désignation avec le doigt pointé, sollicitations manuelles,
posturales, vocales ou verbales, prise de la main du partenaire et conduite de celui-ci jusqu’à des objets ou lieux «convoités»). Attentifs, ils
cherchent en même temps à comprendre la signification et le sens des comportements, vocalisations et productions langagières de leur interlocuteur («Pourquoi ceci ?», «pourquoi cela ?» …). Autrement dit, les enfants sécures ont la compétence et l’envie d’exprimer ce
qu’ils ressentent et pensent au moyen de messages qui combinent les mimiques, attitudes, gestes, façons d’être, façons de faire,
vocalisations, paroles … et pas seulement par le langage oral, ou pas du tout.

Entre deux et quatre ans, l’enfant sécure est déjà un être déjà bien ancré dans les dimensions émotionnelle, affective, relationnelle et cognitive de la communication.

Invités par l’enseignant à écouter parmi les pairs une «histoire» qu’il lit, les enfants sécures apparaissent attentifs, réceptifs et disponibles. Ils
n’hésitent pas à interrompre le conteur par des comportements, vocalisations et/ou paroles qui traduisent de façon explicite leurs états
émotionnels et affectifs. C’est une occasion pour l’enseignant-conteur de dire et répéter les mêmes mots et phrases, mais aussi d’introduire
des mots nouveaux et de nouvelles phrases pour donner encore plus de signification et de sens à ce qu’il lit et dit, tout en expliquant
l’iconographie qui accompagne le texte par des combinaisons de langage oral et d’éléments non verbaux (mimiques, gestes, attitudes …).

C’est l’occasion «d’immerger» les enfants dans le vocabulaire, la syntaxe et la grammaire (et l’imaginaire) sans qu’il soit nécessaire de les
enfermer dans une situation d’apprentissage formel et explicite du langage oral … que certains n’acceptent pas ou dans laquelle ils ne
retiennent pas le sens des mots et constructions langagières. Plus généralement, lorsqu’un enfant sécure est engagé une situation qui stimule ses émotions (narration, chant, mime, danse, ronde, clownerie, activité ludique, jeu de rôle, interaction avec des animaux …), il peut découvrir que le langage oral et les éléments non verbaux qui l’accompagnent, mais aussi les signes écrits et l’iconographie quand c’est le cas, sont des ensembles liés qui «racontent» la même «chose ».

LES COMPETENCES-SOCLES ET LES SYSTEMES DE COMMUNICATION

Toutes bien structurées chez les enfants sécures, cinq compétences-socles ont été proposées, définies et formalisées dans plusieurs publications et livres (MONTAGNER, 1995-2006).

L’attention visuelle soutenue

Cette compétence définit la capacité des enfants de tous âges à poser un regard soutenu sur une «cible», c’est-à-dire de façon non fugitive,
non limitée à des balayages visuels, et non interrompue par les évènements extérieurs. Elle sous-tend le développement de plusieurs
phénomènes et conduites complexes :

-elle structure et organise la communication multi-canaux. En effet, l’attention visuelle soutenue est un ancrage sensoriel et relationnel qui
permet à l’enfant de combiner, d’agréger, d’associer et d’intégrer aux informations transmises par le regard, les mains, le visage, le corps …
celles qui sont recueillies par le canal auditif (notamment les informations véhiculées par le langage oral), mais aussi, les informations
somesthésiques, proprioceptives, olfactives et autres. Grâce à cette capacité, l’enfant peut au fil du développement donner toute leur
signification et tout leur sens aux messages pluri-sensoriels qui lui sont «adressés». L’attention visuelle soutenue lui permet non seulement de donner du sensaux émotions, affects et intentions de ses partenaires, mais aussi d’apprendre la complexité, les nuances et la variabilité de son
environnement, en combinant à tout moment les informations visuelles et celles qu’il reçoit par ses autres canaux sensoriels.

-elle permet de bien discriminer, connaître et reconnaître les formes, configurations, couleurs … des objets, ainsi que leurs propriétés,
fonctions et potentialités. C’est le fondement à tous les âges de la reconstitution des puzzles pièce par pièce, et donc de l’alliance des
processus d’observation, d’analyse détaillée et de perception globale. L’attention visuelle soutenue donne aux enfants la capacité de
découvrir, discriminer, connaître et reconnaître les éléments de base des représentations graphiques et de la géométrie, c’est-à-dire les
lignes droites, brisées, courbes, circulaires, en escargot … les surfaces (parallélépipèdes, cercles …) et les volumes (cubes, pyramides …). Mais
aussi, les structures élémentaires de la langue écrite (lettres, syllabes, mots, chiffres). Elle est indispensable pour que le langage oral de
l’éducateur ou de l’enseignant remplisse vraiment ses fonctions de description et d’explication.

-elle organise à tous les âges le traitement des informations dans les situations de communication et d’apprentissage, par exemple lorsque le
maître désigne, commente et explique à ses élèves la phrase, la figure, l’iconographie … qu’il affiche au tableau, en soulignant ses propos par
des mimiques, gestes, attitudes et comportements divers. Les enfants qui ont une attention visuelle soutenue ont une plus forte probabilité
que les autres de comprendre et d’apprendre plus vite et complètement le message du maître. En effet, les «signes» écrits restent en
permanence dans leur champ visuel et constituent ainsi un noyau stable d’informations auquel peuvent s’agréger la composante orale et
«volatile» de «l’acte pédagogique» (le discours) et sa composante comportementale, également «volatile». C’est le développement au fil de
l’âge de la capacité de l’enfant-élève à combiner ces trois composantes qui leur donne une compétence sans cesse accrue à comprendre et
apprendre la signification et le sens de messages de plus en plus complexes.

L’élan à l’interaction

On rassemble sous ce terme toute manifestation de l’enfant qui entraîne une réduction de la distance interpersonnelle et ainsi une proximité
corporelle avec un ou plusieurs partenaires, puis des contacts apaisés et apaisants, rassurants et sécurisants (MONTAGNER, 1995-2006).
Combiné à l’attention visuelle soutenue, l’élan à l’interaction joue un rôle essentiel dans le développement des interactions accordées et dans
le renforcement d’un attachement «sécure» entre l’enfant et ses partenaires familiaux, mais aussi avec les autres personnes (éducateurs,
enseignants, pairs …). Il facilite les processus de communication rapprochée qui impliquent le regard, les mimiques, les mots murmurés, les contacts manuels et corporels.

Les comportements affiliatifs

On regroupe sous ce terme les comportements que les partenaires interprètent comme une adhésion à leurs actes, gestes, comportements,
paroles, discours, idées, projets … et qui ont ainsi une forte probabilité d’entraîner des interactions ajustées, accordées et durables. Ils
fondent les processus dits de socialisation qui régulent les interactions au sein des groupes, notamment de pairs. Ils permettent à chacun de
se situer par rapport aux autres, de prendre en compte leurs émotions et intentions, de contribuer à des activités et projets communs. Parmi les
comportements affiliatifs, les conduites de coopération se développent déjà entre treize et vingt mois, mais aussi les trocs, les «transports»
coordonnés d’objets, les «collaborations» au cours des constructions manuelles, les anticipations du comportement des partenaires, et les
conduites d’entraide. A tous les âges, les comportements affiliatifs régulent les interactions au cours des conflits, des activités symboliques et des jeux de rôle (MONTAGNER, 1993-2006; MONTAGNER et al., 1984-1994), en même temps que le langage oral se développe dans toutes ses dimensions linguistiques, symboliques et intellectuelles. C’est pourquoi, les psychodrames, activités symboliques et jeux de rôle qui sont nourris de comportements affiliatifs, peuvent constituer des champs privilégiés de la pédagogie, surtout pour les enfants qui ont des déficits,
retards, «absences» ou «troubles» du langage oral, et plus largement de la communication (aphasie, dyslexie, bégaiement, mutisme …).

La capacité de reproduire et d’imiter

Par imitation, on entend la capacité de l’enfant à reproduire plus ou moins complètement les manifestations de ses partenaires, et à leur
donner le même sens. On peut souligner que, dans les activités symboliques et les jeux de rôle, les enfants se montrent particulièrement
compétents pour reproduire le langage oral de l’interlocuteur dans ses dimensions émotionnelle, affective, relationnelle et linguistique, ainsi
que dans ses combinaisons avec les comportements et vocalisations, et de lui donner le même sens.

L’organisation structurée et ciblée du geste

Il s’agit de la capacité de l’enfant à structurer et organiser ses gestes en direction des objets qui retiennent son attention visuelle, puis dans
leur préhension et leur manipulation (BOWER, 1974, 1979). L’enchaînement «reaching-grasping» (atteindre-attraper/saisir) est le socle des habiletés motrices qui permettent aux enfants d’assembler les objets dès la première année en les encastrant, emboîtant, articulant … et ainsi de mettre en place des mécanismes et processus majeurs du développement cognitif.

LES FONDEMENTS DE LA SECURITE AFFECTIVE

L’installation ou la restauration de la sécurité affective repose sur un trépied sue l’ on retrouve dans toutes les cultures :

Les interactions avec au moins une figure d’attachement rassurante

L’établissement et le renforcement des interactions accordées avec au moins une figure d’attachement rassurante (le plus souvent la mère, le
père ou les deux parents, parfois une personne de la fratrie ou un grand-parent). Je renvoie ici aux mécanismes et processus détaillés dans
«L’arbre enfant» (on pourra y trouver une bibliographie des principales études sur le bébé et le jeune enfant). En l’absence d’une famille ou en
cas d’empilements des facteurs d’insécurité au sein et en dehors du milieu familial, les enfants peuvent nouer à tout âge des liens d’attachement sécure avec un ou plusieurs partenaires dans les structures qui les accueillent, en particulier dans une école primaire. Mais, celle-ci doit être délibérément conçue pour prendre en compte chaque enfant dans ses différences et en faire des atouts, quelles que soient ses particularités (enfant autocentré, dans l’évitement ou le rejet, en fuite, «hyperactif», agresseur, anxieux, angoissé …).

Le respect des rythmes biopsychologiques

Il est nécessaire que les rythmes majeurs des enfants soient préservés au quotidien dans le milieu familial, à l’école et ailleurs. Il faut en
premier lieu que leur rythme veille-sommeil s’inscrive régulièrement dans l’alternance du jour et de la nuit, et que les particularités
individuelles soient respectées (enfant court ou long dormeur, rituel d’endormissement, heures d’endormissement et d’éveil spontanés …).

On favorise ainsi l’ancrage de chacun dans la régularité rassurante des repères stables et récurrents par rapport aux partenaires familiaux et à la «niche de sommeil» après les incertitudes, désordres et stress de la «phase éclairée». On optimise ses capacités de récupération biologique,
psychologique et intellectuel. Chaque enfant peut alors rechercher ses batteries physiologiques, émotionnelles, affectives, relationnelles,
imaginaires, mentales (voir la «soupape mentale» constituée par le sommeil paradoxal). Il faut également que les enfants puissent vivre les
autres rythmes biopsychologiques qui régulent ses capacités d’adaptation à l’environnement (alimentation, rythme cardiaque, rythmes de sécrétion des hormones, vigilance …).

Les alliances entre le corps et la pensée dans toutes les dimensions de l’espace

Il est également nécessaire que le milieu familial, l’école et l’ensemble des lieux «colonisés» par les enfants soient conçus pour que chacun
puisse construire l’alliance de la sécurité affective, du langage, des émotions, des coordinations motrices, de la sensorialité, des systèmes de communication, des processus cognitifs et des constructions intellectuelles dans toutes les dimensions de l’espace. Y compris lorsqu’il est porteur d’un handicap ou d’une anomalie génétique, enfermé dans des «troubles du comportement», psychotique, étrange …

La conquête d’espaces «sécurisés» (ils sont conçus pour ne pas causer de dommage à l’intégrité physique et mentale des enfants) et à trois dimensions (ils autorisent la conquête de la hauteur et de la profondeur), de mobiliers et dispositifs également «sécurisés», joue «naturellement» un rôle important dans la construction du schéma corporel, la maîtrise de l’équilibre du corps et le développement des coordinations motrices et sensori-motrices. Mais, elle facilite aussi l’installation des enfants dans la sécurité affective et, en conséquence, la libération du langage oral et des émotions, ainsi que la lisibilité et la fonctionnalité des compétences-socles. Il en résulte une augmentation de la fréquence des interactions affiliatives, une diminution de la fréquence des comportements autocentrés, de l’instabilité dite «hyperactivité», des conflits et des agressions, un développement des conduites symboliques et des jeux de rôle. En outre, avec le corps en mouvement et en déséquilibre dans la troisième dimension de l’espace, les enfants intègrent de facto des concepts fondamentaux qui permettent aux êtres humains de «coloniser» tous les environnements (devant, derrière, au- dessus, au-dessous, en haut, en contrebas, à côté, à gauche, à droite, en relief …)
(MONTAGNER, 1995-2006).

CONCLUSION

Pour que les enfants puissent libérer leurs processus cognitifs et mobiliser leurs ressources intellectuelles tout en s’appropriant des savoirs nouveaux et de nouvelles connaissances, il faut au préalable qu’ils puissent s’installer et se conforter dans la sécurité affective, terreau de la confiance en soi, de la confiance dans autrui et de l’estime de soi.

C’est alors que le langage oral et les émotions peuvent être pleinement
libérés. C’est alors que l’enfant peut rendre lisibles et fonctionnelles les compétences-socles indispensables au développement des systèmes
de communication, à la socialisation, à la libération des processus cognitifs et à l’épanouissement des ressources cérébrales (penser,
comprendre, apprendre), ferments de la réussite personnelle, scolaire et sociale.

L’école devrait être conçue pour que ces imbrications fonctionnelles soient possibles. Elle doit impérativement s’organiser pour que les
enfants les plus fragiles, démunis, vulnérables, en souffrance qui constituent la majeure partie des élèves non sécures ou insécures, puissent s’installer dans une sécurité affective minimale, ou la restaurer si elle a été altérée ou détruite, tout en permettant aux enfants sécures de prolonger et conforter la sécurité affective que le milieu familial a générée et confortée. Un accueil rassurant, des interactions accordées et des possibilités d’attachement sécure avec au moins une personne sont des leviers majeurs pour qu’un enfant non sécure ou insécure puisse «s’imprégner» d’une sécurité affective qu’ils ne trouvent pas dans le milieu familial, développer une confiance minimale en soi et dans autrui, et nourrir peu ou prou une estime de soi (MONTAGNER, 2006).

En outre, il est nécessaire que l’école s’organise pour proposer aux différents enfants des stratégies, aménagements du temps, espaces,
activités et situations qui leur permettent de libérer de façon interactive, et sans retenue, leur capacité potentielle à s’exprimer par le langage
oral, en combinaison avec la libération de leurs émotions et de leurs compétences-socles.

Tout en respectant leurs rythmes biopsychologique (et aussi leurs rythmes d’apprentissage que je n’ai pas évoqués dans le présent article). La narration, la possibilité de s’identifier à un personnage, les activités ludiques, les activités symboliques, les jeux de rôle, la conquête de l’espace dans toutes ses dimensions et tout un éventail de contextes, situations et interactions (H. MONTAGNER, 1995-2006 ; MONTAGNER et al., 1993-2002) s’avèrent particulièrement efficients dans la libération imbriquée de ces phénomènes, et ainsi des composantes émotionnelle, affective, cognitive et linguistique du langage oral. Mais, en même temps, dans le développement de leurs systèmes de communication, des plus communs aux plus sophistiqués.

C’est alors que les enfants peuvent pleinement parler, penser et comprendre, et qu’ils peuvent entrer sans retenue dans les apprentissages.

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