PRomotion des Initiatives Sociales en Milieux Educatifs

Le 6 octobre 2004

La seconde phase de la décentralisation, actuellement en cours, préoccupe les acteurs du champ éducatif que nous sommes, réunis dans cette salle, notamment autour des risques de renforcement des inégalités sociales et territoriales et des discriminations.
L’expression « L’Etat au local », contenue dans le titre de ces journées, traduit, à tout le moins, nos interrogations, si ce n’est nos inquiétudes, quant au rôle régulateur de l’Etat non seulement à maintenir, mais à renforcer.
Mais ces interrogations, ces inquiétudes ne constituent en aucun cas un a priori de défiance vis-à-vis des collectivités territoriales concernant leur rôle d’acteurs du champ éducatif et de l’Ecole que nous reconnaissons pleinement.
Dans une situation qui est loin d’être idéale aujourd’hui, elles sont interrogations, inquiétudes sur la façon dont, demain, vont être combattues, prévenues inégalités territoriales et discriminations.
Dans ce cadre, « Education et territoires : l’Etat au local », titre complet de nos journées, résume les enjeux fondamentaux de la période : quelle place pour l’Etat ? Quelle place pour ses services déconcentrés ? Quelle place pour les collectivités locales ? Quelle place pour les associations ? Quelle place pour les établissements scolaires, dans la perspective de la prochaine Loi d’Orientation sur l’Ecole ?
Le paysage éducatif français, en effet, vit un bouleversement. Parmi d’autres exemples, je citerai l’article 86 de la « Loi relative aux libertés et responsabilités locales » du 13 août dernier qui permet de créer des « établissements publics d’enseignement primaire » dont le conseil d’administration comprendra des représentants des collectivités territoriales, des parents et des enseignants…
La tentation peut-être forte, dans de tels moments de mutations, de se crisper sur des frontières, de se replier sur son terrain, de conforter les chasses gardées pour se rassurer, tant du côté de l’Etat et entre services de l’Etat que du côté des collectivités territoriales. Ce qui ne peut que rigidifier les verticalités inhérentes aux fonctions institutionnelles et aux procédures de gestion au lieu d’encourager des politiques de l’enfance et de la jeunesse globales et transversales, concernant les enfants et les adolescents dans tous leurs temps et lieux de vie sociaux.
Face à cela, nos interrogations, nos inquiétudes, portent aussi sur l’espace laissé aux associations, en l’occurrence, ici, les mouvements d’éducation populaire et, tout particulièrement, ceux agréés par l’Education nationale comme « associations éducatives complémentaires de l’enseignement public » représentées, dans cette salle, par votre serviteur et des responsables de diverses organisations.
Ce terme de « complémentaire » donne d’ailleurs une image réductrice, au pire de cinquième roue du carrosse et, au mieux, de prestataires de services, de ce que sont nos organisations. Elles sont, en fait, des actrices à part entière du système éducatif.
A cet égard, je parlerai de celle que je connais le mieux, la mienne, mais d’autres responsables s’exprimeront aujourd’hui et demain au cours, notamment, des tables rondes. Mais je pense que ce que je vais dire là n’est pas éloigné de ce qu’ils vous diront.

Nous militons pour une République démocratique, laïque et sociale par l’éducation, la culture, la solidarité et l’engagement civique. La laïcité, valeur de civilisation et principe de droit figurant dans notre Constitution, implique une lutte constante contre les injustices et pour la dignité de chaque individu.
Ethique de la diversité, du débat et de la responsabilité, elle doit vivre dans les pratiques éducatives et pédagogiques et dans ses dimensions sociales, économiques, civiques et culturelles.
Nous nous mobilisons contre les inégalités et les discriminations et pour la transformation et la démocratisation de l’Ecole pour qu’elle soit bien « l’Ecole de tous », objectif poursuivi par la Loi d’orientation sur l’éducation de juillet 1989, mais pas forcément par celle qui s’annonce.
Une Ecole pour de futurs adultes qui auront à se former tout au long de leur vie et à décider et à agir en citoyens d’Europe pour un monde solidaire.
L’Ecole ne pouvant se transformer uniquement par ses propres forces pour être effectivement celle que nous voulons, celle de tous, nous construisons, accompagnons par nos associations locales, nos fédérations départementales, nos Unions régionales, la nécessaire évolution du système éducatif.
Dans ce but, nous apportons notre concours aux projets des établissements scolaires, à ceux des collectivités locales et participons à la mise en place et à la vie des projets éducatifs territoriaux.
Ces projets éducatifs territoriaux ne peuvent être dans une ignorance réciproque des projets des établissements scolaires. Car le projet éducatif territorial est un espace d’action et d’interaction, où chacun des acteurs que sont les élus et fonctionnaires des collectivités territoriales, les bénévoles et professionnels des associations, les personnels de l’Education nationale, les parents d’élèves, les familles, les services de l’Etat, les Caisses d’Allocations familiales, le Fonds d’action et de soutien pour l’intégration et la lutte contre les discriminations (FASILD, où chacun de ces acteurs, donc, apporte de l’eau au fleuve commun au travers de ses compétences, de ses savoir-faire, de ses apports financiers – eh ! oui, mais sans que cela se limite à cela…-
Tout cela au service d’un projet partagé, élaboré à partir d’un diagnostic également partagé et prévoyant ses modalités d’évaluation et de régulation.
Tout cela encore pour répondre aux besoins des enfants et des jeunes du territoire considéré pour faire entrer dans le réel le même droit pour tous à faire leur l’éducation, la culture, le sport et les loisirs et ce, dans tous les territoires de notre pays.
C’est-à-dire dans les zones rurales menacées de désertification comme dans les quartiers exposés aux difficultés. Et ce, en prenant appui sur les dispositifs publics que sont les Contrats éducatifs locaux, les Contrats temps libres, les Zones et Réseaux d’éducation prioritaire, les volets « éducation » des Contrats de ville et des Grands Projets de Ville, les Contrats locaux d’accompagnement à la scolarité, les Réseaux d’écoute, d’appui et d’accompagnement des parents, etc.
J’ai dit prendre appui sur les dispositifs publics… J’insisterai en disant : s’y investir, aider à leur dynamisation, tout faire pour que la parole des habitants, des jeunes, des citoyens y soit entendue si nous ne voulons pas que ces démarches, ces efforts, ne se perdent dans les sables.
Faire entrer dans le réel partout ce droit à l’éducation, à la culture, au sport et aux loisirs, nous le savons – et les interrogations et les inquiétudes exprimées tout à l’heure en sont le témoignage -, ce n’est pas un long fleuve tranquille !
Le projet éducatif territorial est constamment soumis aux interpellations de la réalité : c’est sa fragilité, mais aussi sans doute une garantie de recherche constante d’amélioration.
S’efforcer de contribuer à élaborer des outils pour faciliter cette amélioration, c’est ce que cherchent ces Rencontres, Rencontres qui bénéficient d’un éclairage européen.
Ecouter, débattre, proposer pour agir, c’est l’ambition des organisateurs au travers des conférences, des ateliers et tables rondes.
Est-elle démesurée ? C’est vous qui le direz autour de « National et local : tensions, contradictions, articulations ? », « Projet et contrat : des moyens pour agir. A quelles conditions ? » et « Réduction des inégalités en éducation : une mission partagée ? »

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