PRomotion des Initiatives Sociales en Milieux Educatifs

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Du côté de la droite on indique une déconstruction du collège unique, un développement de l’apprentissage dès 14 ans, et certains ont même évoqué le retour à un examen d’entrée en sixième abandonné depuis 1956.
A gauche, il semble que le modèle finlandais de l’école fondamentale serait la référence.


On est bien là face à deux conceptions très différentes. Nathalie Mons a formalisé ces quatre modèles en s’appuyant sur le principe de l’intégration (Les nouvelles politiques éducatives. La France fait-elle les bons choix ?, PUF, 2007).

Concernant l’orientation on peut dire qu’elle devrait sans doute jouer un rôle très différent dans ces deux systèmes.

Dans le premier, le principe d’orientation d’autrui serait renforcé et s’appliquerait très tôt selon le principe de séparation des publics en s’appuyant sur la notion de méritocratie.

Dans le deuxième, je défends l’idée que les procédures d’orientation doivent disparaître du territoire du collège. La séparation des publics dit se faire après la troisième, en dehors du collège. Aujourd’hui les enseignants sont placés dans un paradoxe pragmatique. Ils doivent à la fois faire réussir tout le monde, faire acquérir le socle à tous les élèves, et en même temps ils doivent être capable de les différencier pour l’orientation. La séparation des publics par rapport à des voies de formation différentes suppose donc dans ce modèle de l’école fondamentale de créer un autre processus. Et il n’y en a pas 36. Soit elle repose sur le choix familial, soit elle repose sur la mise en épreuve du candidat, et les deux sont souvent combinés, soit une réelle classe de seconde de détermination et d’orientation doit être créée.

Un autre effet du choix de ce modèle irait sans doute dans la suite d’une évolution récente que l’on peut observer : une intensification de l’aide à l’orientation au lycée, dans la charnière lycée-enseignement supérieur, et après. On peut faire l’hypothèse que la question de l’orientation se translate le long du système de formation au fur et à mesure de son extension.

Sur un plus long terme, quelques pistes de réflexions pour conclure

Quelle peut-être l’évolution des formes pédagogiques ?

Notre forme pédagogique actuelle est largement « frontale » (je parle, vous écoutez, enfin j’espère encore quelques minutes). On voit apparaître notamment avec l’ordinateur, mais aussi avec l’idée de coaching, une pédagogie que j’appelle côte-à-côte. Mais reste assez individualisante. Il y a une troisième forme qui sans doute va se développer, c’est la pédagogie latérale, ou active, ou groupale, basé sur la coopération.

Dans quel sens la forme scolaire peut-elle évoluer ?

Notre système actuel est très marqué par le principe du menu imposé. Même l’enseignement supérieur qui devrait être bouleversé par le LMD et ses modules à combiner a conservé très globalement la fermeture de ses filières. Je fais quand même l’hypothèse que l’organisation de la formation et de l’éducation évoluera nécessairement vers le principe de la carte. A chacun de composer son menu.

On recommence à voir apparaître des discussions sur l’organisation spatiale de l’école. Voir par exemple l’article : « Pour un grand concours national d’architecture scolaire » Par Jean-Louis Auduc ,

http://www.cafepedagogique.net/lexpresso/Pages/2012/04/17042012_architecturescolaire.aspx .

On peut se dire également que la frontière école-environnement évolue. Quelques indices, on a une montée des intervenants extérieurs, et à l’inverse un développement des stages à l’extérieur. Plus globalement les territoires locaux s’impliquent de plus en plus dans l’éducatif, de la commune à la région.


Enfin l’école elle-même est remise en question au moins de deux manières : on commence à voir un mouvement notamment aux Etats Unis vers l’école à domicile, d’autre part, et plus généralement il y a un développement des ressources virtuelles. Sur ce point, Michel Serres insiste sur l’idée d’un changement très profond dans sa tribune dans « Le monde » date du 12 avril 2012.

Pierre Frackowiak vient d’en publier un commentaire « Ecole du futur et ” vieux pépés” ». Petit extrait :
« …on utilise, en général, le numérique pour améliorer le modèle pédagogique qui résiste depuis la nuit des temps, celui de la transmission magistrale, de l’explication, comme s’il était universel, éternel, indiscutable. On ne change pas de modèle. Ceux qui le contestent provoquent encore sarcasmes et colères. Les programmes catalogues de notions surmontent les socles de compétences et les finalités. Les organisations semblent immuables : « la classe, la discipline émiettée, l’heure, le prof ». Les savoirs sociaux, les acquis de plus en plus importants extérieurs à l’école restent hors de ses murs. La compréhension du monde, du milieu, de l’environnement, l’histoire et la géographie des savoirs, le sens des apprentissages scolaires restent maintenus dans l’ombre.


L’exemple de l’architecture cité par Michel Serres est lumineux. Si l’on continue à construire des bâtiments pour l’enseignement sur le même modèle que ceux du 19ème siècle, c’est-à-dire des classes le long de couloirs, on peut toujours les rendre plus beaux, y ajouter des classes, toujours des classes, spécialisées, et des équipements modernes, on ne permettra pas les travaux en petits groupes autonomes, les rassemblements de grands groupes pour des auditions, des rencontres avec des savants, des artistes, des porteurs de savoirs pour lesquels la classe est une unité trop petite, des lieux de réunions et d’expositions, des lieux de rencontres avec les parents, des lieux de travail pour les enseignants. » (http://www.educavox.fr/actualite/debats/article/ecole-du-futur-et-vieux-pepes#.T55StxjpqoA.twitter).

Je terminerais par le développement de l’incertitude professionnelle

Sur deux aspects : et le premier l’insertion des jeunes.

Le CEREQ vient de publier sa dernière étude d’insertion des jeunes. Je vous en lis un extrait :
« Le système éducatif, secondaire et supérieur, assure toujours sa mission de préparation des jeunes au monde professionnel. Chacun le sait, les difficultés sont ailleurs. Il y a au moins deux problèmes que les décideurs publics devront un jour affronter.
Les non-diplômés, les exclus du système éducatif secondaire ou supérieur, restent durablement éloignés de l’emploi. Or, la société française offre peu d’opportunités à ces jeunes de se rattraper. Pendant de nombreuses années, la plupart vivront « la galère » des petits boulots, de la difficulté à se loger, sans parler de l’illusion de pouvoir recommencer une formation. Leur bonne volonté n’y fera rien. Le vrai drame de la société française, c’est cette incapacité à offrir une deuxième chance aux jeunes de bonne volonté qui ont connu un échec.
Depuis trente ans, nous vivons sur l’illusion d’une possible adéquation entre les offres d’emplois pour les jeunes et les diplômes délivrés. Cela aboutit à spécialiser de plus en plus les formations, bac pro ou licences professionnelles, par exemple. C’est méconnaître les trajectoires d’insertion dans l’emploi qui durent souvent plusieurs mois, voire plusieurs années. C’est ignorer les pratiques de recrutement des entreprises. C’est nier qu’il y a un manque de confiance dans le potentiel des jeunes diplômés en France.
L’insertion professionnelle est devenue un sujet essentiel des politiques publiques au niveau national, comme au niveau régional. Les acteurs ont besoin d’enquêtes régulières d’envergure, incontestables sur le fond et indépendantes. L’enquête Génération du Céreq remplit cette fonction sociale depuis près de quinze ans. » p. 4 de l’étude du CEREQ « Quand l’école est finie… » Premiers pas dans la vie active d’une génération, enquête 2010.

(http://www.cereq.fr/index.php/actualites/Quand-l-ecole-est-finie-Premiers-pas-dans-la-vie-active-d-une-generation-enquete-2010)


L’autre aspect, c’est l’accélération des évolutions technologiques et des crises économiques. Elles rendent très incertaines les situations de travail. Permanence et stabilité des métiers et des emplois s’installent dans nos modes de vie. Le principe qui liait formation-diplôme-métier-emploi est fortement remis en question. Où placer la formation professionnelle ?

Renforcer sa position dans la formation initiale ou l’alléger pour renforcer une formation générale de plus en plus nécessaire pour les multiples adaptations à venir. La maintenir au loin des situations de travail ou l’y intégrer comme un mode permanent du fonctionnement de l’entreprise ?

De ces différents éléments, on peut envisager au moins deux conséquences pour le champ de l’orientation :
• L’orientation « scolaire » sera de plus en plus un accompagnement permanent pédagogique.
• L’orientation des adultes sera sans doute un secteur en pleine expansion dans l’avenir.

Bernard Desclaux

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