PRomotion des Initiatives Sociales en Milieux Educatifs

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Qui veut changer les rythmes scolaires ? Tout le monde. Qui est prêt à faire des sacrifices ? Personne. Parents, enseignants, élus, chercheurs se sont donnés rendez-vous à la mairie d’Issy-les-Moulineaux (92) le 3 octobre pour échanger sur les résultats d’une nouvelle enquête sur les rythmes scolaires. Réalisée à grande échelle dans cette ville moyenne, elle éclaire à la fois les consensus et les oppositions  dans la population  et interroge même l’idée d’un cadre contraignant national. Alors que la concertation nationale va devoir faire des propositions, elle éclaire les difficultés sur le terrain de construire de nouveaux rythmes scolaires au primaire.

Quand le maire d’Issy-les-Moulineaux parle, avec l’éclairage violent de la salle multimédia, on se croit sous les caméras des "grosses têtes". André Santini ne peut pas s’empêcher de faire des remarques peu élégantes sur son entourage. Mais il a la clairvoyance de commander une série de travaux sur les rythmes scolaires dans sa commune et de les confier à Georges Fotinos. Mercredi 3 octobre, les résultats de la dernière enquête menée au début de l’été auprès de 1003 parents et d’une cinquantaine d’enseignants du primaire (15% de l’effectif) sont dévoilés en public. Financés par la commune, les travaux de G Fotinos apportent un éclairage unique à l’échelle d’une ville moyenne.

Le consensus

L’enquête montre qu’un consensus existe sur les rythmes à l’école primaire. Tout le monde dit donner la priorité à l’intérêt de l’enfant.  Tous estiment que 10 heures par jour à l’école est le maximum qu’on peut lui imposer. Une large majorité chez les parents comme les enseignants est pour différencier le temps scolaire entre maternelle et primaire. La 9ème demi-journée pourrait n’être faite qu’en école élémentaire ce qui permettrait d’utiliser les professeurs de maternelle en doublon à l’école élémentaire. EUne suggestion qui pourrait fortement intéresser Vincent Peillon. nfin, pour G Fotinos, le dernier consensus est sur l’idée du projet local. Enseignants et parents veulent une articulation entre temps scolaire et périscolaire.

Principes et nécessités

Les désaccords sont aussi bien là. D’abord une certaine nostalgie de la semaine de 4 jours et de la journée de 6 heures de cours existe chez les parents et les enseignants. Surtout, comme le dit adroitement Julien Goarant, directeur d’études chez Opinionway, "chacun cherche à lier les déclarations sur les rythmes et ses nécessités personnelles". Ainsi les parents sont pour le changement mais exigent que leurs obligations professionnelles soient prises en compte. Ainsi se crée des lignes de fracture entre enseignants et parents qui ont sans doute peu de rapport avec le seul intérêt des enfants.

Les parents plébiscitent le mercredi matin comme 9ème de mi-journée à rétablir. Les enseignants préféreraient le samedi matin. Mais la grande coupure est sur les congés d’été. Les parents acceptent de partir en vacances la 3ème semaine de juillet et de passer à 38 semaines de classe. Ce que réfutent 58% des enseignants, 42% acceptant 38 semaines.

Les limites de l’enquête

Curieusement, la ville d’Issy-les-Moulineaux n’a pas évalué l’impact financier de la réforme des rythmes scolaires. Philippe Knusmann, maire adjoint à l’éducation, estime que la suppression pour les écoles élémentaires de l’accompagnement scolaire le mercredi matin permettra de réaffecter des moyens sur les autres journées. "On est parti pour l’équilibre", estime-t-il. Il pourrait bine avoir des surprises. Si l’école se termine chaque jour à 15 heures, il y a fort à parier qu’il ait à accueillir tous les enfants des écoles de 15 à 17 ou 18 heures et non une frange comme c’est le cas actuellement. La ville dispose-t-elle des animateurs et des locaux pour cela ?

Une autre limite est portée par la Fcpe locale. "Ce n’est pas parce qu’on changera le calendrier scolaire qu’on va changer l’école", affirme une représentante de la Fcpe. Le débat sur les rythmes ne doit pas faire oublier celui sur le changement des pratiques pédagogiques à l’école. Son raisonnement reprend celui de Philippe Meirieu dans une tribune donnée au Café en septembre. "La réussite des enfants ne dépend pas que des rythmes… Il ne faut pas imaginer que (la réforme des rythmes) résoudra, tout à la fois, la question de la fatigue, de la démobilisation et de l’échec des élèves, ni, a fortiori, que cela abolira les difficultés des professeurs pour « tenir leur classe ». Le temps n’est qu’une variable parmi d’autres et il n’est pas séparable de la nature des activités que l’on y effectue".

Mais c’est la satisfaction qui prévaut ce mercredi. Deux enseignantes de maternelle se sont déplacées pour assister aux débats. "La réforme de 2008 a été imposée sans nous demander notre avis. On a imposé des programmes lourds avec moins d’heures de cours et une aide personnalisée dans des journées très longues". Visiblement les rythmes voulus par Darcos ne sont pas regrettés. Mais les 38 semaines ? "On est prêtes à les faires si c’est l’intérêt général", déclarent-elles. Cet état de grâce résulte de l’étude elle-même. "Enfin on nous a consulté" rappellent-elles. Et ça c’est nouveau.

François Jarraud

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