PRomotion des Initiatives Sociales en Milieux Educatifs

Scolarisation et Accompagnement Scolaire

Françoise MALIQUE
Quimper, le 5 octobre 2005

Précaution linguistique : utilisation du terme « Tsigane »
1. Mes fonctions :
– CEFISEMà le commande de l’IAà ouverture sur le modèle des CLINà CASNAV (reconnaissance de la culture tsigane sans abandonner le droit des enfants)
– ADGVEà l’action globale, la co-éducation
– Les interrogations pédagogiquesà le projet européen Coménius « Tsiganes à l’école. Pédagogie interculturelle pour entrer dans les apprentissages. »
2. Les structures : présentation et commentaires
– L’école sur le terrain
– La « classe » caravane
– La classe de soutien avec enfants inscrits dans leur classe d’âge
– Le CNED
– Les écoles et collège du lieu de stationnement, établissements de service public inclus dans le bassin de formation
3. La pédagogie
– Le droit des enfants / politique territoriale d’accès aux droits d’un groupe social qui nous amène à nos limites pédagogiques et philosophiques,
– Les finalités de l’école pour tous / demandes supposées des familles,
– Les constats
§ Le vécu des enfants itinérants ou non (quand déplacements multiples, le saucissonnage est ingérable par les apprenants)
§ L’entrée dans les savoirs de base (vision globale et zone de proche développement, le plaisir de l’effort intellectuel) : aller du plus simple au plus complexe satisfait les esprits adultes mais ne correspond pas à la réalité que les enfants doivent décoder,
§ L’évaluation et la reconnaissance des acquis-> les savoirs implicites d’un élève,
§ Le passage de l’état d’enfant tsigane à celui d’élève -> rôle du langage,
§ Le carnet de suivi (exemples),
§ La formation des enseignants et informations auprès des enseignants tout-venant ; formations de tous les acteurs d’une même zone géographique.
4. Le projet européen : nous avons essayé de comprendre les obstacles pour améliorer l’existant : la prise en compte de la culture tsigane sans transformer la classe en caravane :
– L’horizontalité des rapports humainsà le rôle de chacun pour le bien de tousà le tutorat.
– L’horizontalité spatialeà l’organisation de l’écrit dans la feuille, sur le tableau.
– La temporalitéà ritualisation des activités et la mise en place de la chronologie.
– Culture orale : de la langue de la famille à la langue orale de l’école, à savoir : apprendre ce qui se dit mais ne s’écrit pas, compétence à maîtriser pour entrer dans la lecture et tous les apprentissages. Le moyen d’effectuer le passage découvert au cours de la recherche-action : le questionnement en 3 étapes pour le développement des compétences langagières.
– Apprendre à lire : langue oraleà langue orale de l’écoleà l’écriture par l’intermédiaire d’un scripteurà la lecture sémantiqueà la lecture analytique
– Remarque : il faut savoir lire pour effectuer les actes de la vie courante, même pour utiliser un ordinateur !
5. Les résultats :
– Une réponse à l’absentéisme : les enfants sont demandeurs d’école pour aller « faire le jeu européen » ; les plus jeunes veulent continuer le travail entrepris par les aînésà l’école ne fait plus peur, la scolarisation prend du sens (exemple de Winnie qui est venue de Dijon avec sa famille pour présenter son travail au cours de la semaine de formation), les concours, la tenue de stands lors de festivités locales et nationales.
– Une réponse à l’insertion dans la vie sociale : les familles ont confiance, les enfants sont reconnus comme ayant un cerveau identique à celui des autres enfants; des familles se groupent en associations, participent à la vie publique et apprennent la démocratie en la vivant
– Une réponse à la formation : les enseignants sont devenus de véritables passeurs de connaissances, ils ont modifié le rapport à leur métier car ils ont été témoins de la transformation sociale.
– Une réponse à la formation de formateurs : les enseignants ont acquis des compétences de formateurs par leur réflexion distanciée, leur action globale et son analyse ; ils sont sortis de la description de la différence pour aller vers l’action pluri partenariale.
– Une réponse au rôle des associations : elles ont trouvé leur légitimité dans leurs actions d’aide à la scolarisation (atelier informatique, alphabétisation des adultes ou des grands ados, accompagnement à l’emploi ou aux cours proposés par le CNED, rappel de la nécessité de la scolarisation dans différentes instances et auprès des parents).
Propositions : ou « à quoi penser amont quand on crée une aire pour que la scolarisation soit réussie ? » :
– Distance du terrain / écoles,
– Vaccinations,
– Décisions de carte scolaire : les répartitions de moyens sont faites en décembre pour le mois de septembre suivant ; on peut étudier la mise en place d’un coefficient de pondération pour prévoir le nombre d’enfants à scolariser en fonction par emplacement,
– Prévoir les frais de scolarité et répartir les dépenses entre les communes du bassin,
– Penser les conditions de bon accès à la cantine et autres services (étude, transport scolaire..),
– Prévoir des rencontres élus – familles – riverains – équipes enseignantes et hiérarchies,
– Favoriser les formations conjointes d’enseignants et de partenaires,
– Penser à d’éventuels aménagements d’emploi du temps / certains déplacements incontournables.

Pour terminer, je citerai le philosophe canadien Jean Bédard, auteur du livre « Coménius ou l’art sacré de l’éducation » : pour que l’école ne soit pas le lieu de « dés-éducation », elle doit favoriser la promotion de l’être sans avoir besoin de prouver l’être par l’avoir et obtenir l’avoir par le faire ; car si l’humanité est niée dans un seul enfant, alors c’est toute l’humanité qui est niée.
Rappelons la résolution du Conseil des ministres de l’Education au sein du Conseil de l’Europe (JO de la CE du 21/6/89).
Le Conseil et les ministres de l’éducation, réunis au sein du Conseil, s’efforceront de promouvoir un ensemble de mesures en matière de scolarisation des enfants tsiganes et voyageurs, lesquelles, sans préjudice des actions déjà entreprises par les Etats membres en fonction des situations particulières qu’ils connaissent dans ce domaine, ont pour objectifs de développer une démarche globale et structurelle contribuant à vaincre les obstacles majeurs qui freinent l’accès à l’école des enfants tsiganes et voyageurs.
Ces mesures viseront :
– À favoriser les initiatives porteuses d’innovation,
– À proposer et à soutenir des actions positives et adaptées,
– À faire en sorte que les réalisations s’articulent entre elles,
– À faire largement connaître les résultats et enseignements qui en découlent,
– À favoriser les échanges d’expériences.
Le plus beau cadeau que j’ai reçu d’un enfant manouche, c’est cette phrase : « en travaillant au projet européen, j’ai appris à réfléchir » (voir le chapitre évaluation du livre)

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