PRomotion des Initiatives Sociales en Milieux Educatifs




 

EDITO

Jean-François Magnin, Directeur général

Ce rapport d’activité a comme chaque année l’ambition de présenter publiquement les actions que les Ceméa mettent en œuvre sur l’ensemble de leurs champs d’inter­vention pour faire progresser leurs conceptions éducatives en direction du plus grand nombre. En 2008, ce sont 66 125 personnes, jeunes, adultes, bénévoles, volontaires, professionnels que les Ceméa ont accueillies dans l’ensemble de leurs activités.

Si les Ceméa ont choisi d’intervenir sur de nombreux champs éducatifs, sociaux, cul­turels et par des moyens variés – ateliers relais, accompagnement éducatif, médiation culturelle, formations d’animateurs volontaires de loisirs, actions d’insertion de per­sonnes en difficulté, formations professionnelles d’éducateurs et d’animateurs, forma­tions continues des enseignants et des professionnels de santé … – c’est qu’ils pensent que l’éducation doit être globale et concerne l’ensemble des temps et des situations de vie.

Notre société complexe, évolutive, inter et multiculturelle doit être une société éduca­tive. Pour l’être pour tous et avec un réel souci d’émancipation et de prise de respon­sabilité de chacun, pour réduire les inégalités qu’elle génère de plus en plus, elle doit pouvoir s’appuyer sur une éducation populaire vivante et une éducation nouvelle innovante, que seuls des mouvements associatifs comme les Ceméa peuvent porter. Cette action globale d’éducation populaire a été fragilisée en 2008 par des décisions et des prises de positions politiques multiples qui ont porté atteinte à nos équilibres financiers et humains et à nos choix éducatifs et plus largement de société.

Seule la mobilisation de nos militants, un travail de terrain en direction des élus de la nation et plus largement de l’ensemble du monde de l’éducation, de l’action sociale, de la santé, de la culture ont permis de stopper certains de ces funestes projets. Malheureusement, d’autres continuent leur œuvre. La vigilance doit être de tous les instants.

5

Refuser la démagogie populaire, promouvoir les valeurs collectives

Le monde occidental est de plus en plus riche et développé et pourtant notre société est de plus en plus inégalitaire. Beaucoup d’associations dans les champs éducatifs, sociaux et culturels tentent avec leurs moyens et malgré le creusement des inégalités de maintenir du lien et de la cohésion sociale, de promouvoir une citoyenneté active et responsable, de faire vivre le dialogue entre les différentes parties de la société, même si celui-ci est parfois conflictuel; POUf continuer à faire société, pour pouvoir vivre ensemble.

Face à cela, et plus fortement depuis quelques années, des responsables politiques et une partie de leurs bras séculiers, garants théoriquement de l’intérêt général et de la cohésion du pays, accentuent la division de la société, opposent des parties de la population à d’autres, stigmatisent des catégories de jeunes par leurs paroles, leufs comportements, leurs irrespects, parfois leurs mensonges. Ils réduisent aussi année après année les moyens d’action préventifs des acteufS sociaux que sont les services publics concernés par ces questions et les associations.

Et devant des analyses de ce type, ils accusent les psychologues, les sociologues, les responsables associa­tifs de complaisance coupable avec les sauvageons, les racailles, les voyous. Ils refusent de regarder en face les évolutions de la société, les mouvements de fond qui l’agitent pour ne renvoyer qu’à la responsabilité individuelle.

Nous refusons l’amalgame qui permet de ne pas traiter le désespoir, la relégation, la stigmatisation, l’irres­pect, le mensonge que vivent l’ensemble de ces populations et qui pourtant, aussi, peut pousser à la vio­lence. Nous refusons cette démagogie populiste qui rejette l’analyse objective des faits et des comporte­ments pour ne choisir, avec l’aide de la plupart des médias, que l’émotionnel et le spectacle. Le respect, la justice, la vérité, l’espoir, l’éducation pour tous, ne suffisent sans doute pas. Il faut réduire les inégalités de cette société. Mais sans eux, rien n’est néanmoins possible. Continuons au quotidien à les faire vivre mal­gré les vents contraires. C’est ce qui explique notre engagement.

 

Une autre éducation est possible, une autre école est nécessaire

 

Le système éducatif français prouve depuis plusieurs années qu’il lui est difficile de prendre en compte toute la population scolaire, et ce malgré les intentions répétées du Ministère de l’Education nationale d’égalité des chances et de réussite de tous. Les objectifs de réussite, du brevet national à l’université en passant par le baccalauréat sont bien loin d’être atteints. Des milliers de jeunes sortent du système scolaire sans qualification quand d’autres vivent des orientations « non choisies ». Un gâchis de la jeu­nesse contre lequel il est urgent d’unir nos forces pour agir 1

Dans le même temps, de façon récurrente, les mouvements pédagogiques, les associations éducatives complémentaires de l’enseignement public, ont depuis de nombreuses années mis en œuvre des pra­tiques pédagogiques alternatives qui permettent dans tous les espaces éducatifs de prendre en compte tous les enfants et les jeunes, en particulier dans les lieux d’apprentissages. Aujourd’hui, le défi que les Ceméa ont à relever est qu’une autre éducation est possible, une autre école est nécessaire.

Oui, le système éducatif doit être transformé pour évoluer et répondre à la nécessité d’un « vrai» ser­vice public d’éducation. Philippe Meirieu, dans Chronique sociale (<< Construire des pratiques éduca­tives/oca/es ») pointe la posture paradoxale qui nous assigne à une conformité à des objectifs fixés par l’administration, alors qu’historiquement nous avons porté des sens:!;)ilités fortes sur les finalités édu­catives, en cohérence avec un projet de société humaniste, solidaire, ce qui vient en contradiction avec l’économisme ambiant.

Encore une fois, le rapport d’activité des Ceméa témoigne de la résistance pédagogique dans laquelle ils continuent de s’inscrire par leurs actions au cœur des institutions éducatives. Sont réunis tous les élé­ments de l’élaboration par les Ceméa d’un Projet pour l’école, car un projet de société ne peut exister sans projet d’éducation.

 

 

L’animation volontaire existe, plus de 70 000 jeunes l’ont rencontrée …

 

C’est un fait, parfois volontairement minimisé, voire totalement ignoré! Il ya eu 74896 inscrits au BAFA en 2007 et 54 191 diplômés, excusez du peu! En même temps, 7964 personnes étaient inscrites en formation BAFD, 2340 ont été diplômées. C’est un fait de société, et ce depuis plus de 50 ans …

Les dernières statistiques délivrées par le Ministère de la Jeunesse et des Sports, communiquées en janvier der­nier, le confirment, même s’il convient de les aborder avec toute la prudence nécessaire face aux statistiques. Le BAFA est et demeure un (des) dispositif qui permet à des dizaines de milliers de personnes de prendre des res­ponsabilités éducatives dans un dispositif reconnu et porté par l’État. Pourtant, le contexte n’aide pas à cette reconnaissance, quand la question de la recherche d’emploi est dramatiquement prégnante dans notre société et que l’on se représente trop le secteur de l’animation comme un gisement d’emplois sans fin.

 

Une forme d’engagement social

Il n’est pas facile de valoriser l’engagement volontaire dans l’encadrement des accueils collectifs de mineurs. Il est souvent présenté et traité comme une vacation technique, un sous emploi, un passe temps technique, peu rémunérateur, en plus! Cet engagement volontaire, car c’en est un pour l’immense majorité de celles et ceux qui s’engagent en formation, est donc une réalité dans notre pays. Une récente enquête réalisée en 2008 à la demande du jury BAFA du Finistère à l’OVLEJ confirme cette constante.

La définition de l’animation qui est le plus souvent citée, met en évidence l’importance de s’occuper d’enfants, de contribuer à leur éducation à travers l’organisation d’activités, dans le cadre d’un travail d’équipe. Les autres points forts sont le plaisir des vacances entre jeunes, le fait de s’occuper d’ados, de voyager, de poursuivre ses expériences personnelles des centres de vacances et loisirs. C’est enfin le sentiment que cet engagement est utile pour soi, qu’il est une forme d’engagement social, qu’il conduit vers le monde du travail et qu’il est important pour l’évolution personnelle. Cet engagement dans l’encadrement occasionnel d’enfants dans les accueils col­lectifs de mineurs est aussi l’occasion de prendre des responsabilités. Des responsabilités individuelles, éducatives et sociales.

 

Mettre en action apports cognitifs, réfexions critiques et expérimentations sensibles

 

S’appuyant sur les objectifs partagés de la charte Culture éducation populaire, qu’ils ont contribué à met­tre en œuvre depuis 10 ans, les Ceméa réaffirment que l’accès à l’art et à la culture est un droit fondamen­tal qui contribue à la formation du citoyen et constitue donc un garant pour la démocratie, que l’éducation artistique et culturelle constitue le fondement nécessaire d’une politique de développement culturel, que la médiation est l’élément indispensable pour structurer une politique de démocratisation.

Mouvement d’éducation populaire, les Ceméa développent une conception éducative et sociale de la cul­ture, respectueuse des origines de chacun, des histoires individuelles et collectives, et qui cherche à rendre possible l’évolution vers des savoirs nouveaux et la recherche d’un savoir vivre: la science, les arts et la maέtrise des cultures d’écrans constituant des ressources indispensables dans ce processus.

Par cet engagement, les Ceméa sont en capacité de contribuer efficacement à la mise en œuvre de la poli­tique socioculturelle du Ministère de la Culture et de la Communication à travers les démarches d’éduca­tion artistique plaçant l’expérimentation et l’innovation au cœur du processus de médiation. Ce processus associe trois formes complémentaires:

·  une pratique personnelle eVou complémentairement articulée à des projets collectifs;

·  la fréquentation des œuvres et des productions quels qu’en soient les formes et les supports;

·  une réflexion partagée ou mutualisée sur cette expérience, un regard distancié ou critique.

La culture et l’éducation prennent sens dans la conjugaison de l’expérience et des parcours de vie de cha­cun, avec des rencontres fortes avec le patrimoine, avec la création artistique et les technologies numé­riques d’aujourd’hui. Les pratiques culturelles à cette condition sont un levier efficace pour traiter les ques­tions sociales (exclusion, alphabétisation, socialisation) qui se posent en particulier dans les « quartiers sen­sibles ». Faciliter l’accès aux productions artistiques, aux médias, aux lieux de mémoire est certes nécessaire mais reste un acte insuffisant s’il n’est pas associé à un processus d’appropriation, faisant appel conjointe­ment à des apports cognitifs, des réflexions critiques et des expérimentations sensibles.

 

 

 

Print Friendly

Répondre