PRomotion des Initiatives Sociales en Milieux Educatifs

Du Pas-de-Calais aux Bouches-du-Rhône

Quatre expérimentations
remarquables

De la maternelle au lycée, l’organisation des cours et le rapport aux élèves peuvent être repensés pour redonner le goût d’apprendre à tous. De nombreuses expérimentations vont dans ce sens au sein de l’enseignement public. En voici quatre illustrations.

Des cours de 75 minutes

Au collège Léonard-de-Vinci, à Carvin (Pas-de-Calais), les rythmes scolaires ont été complètement réaménagés: « Après une large concertation, nous avons décidé de diminuer le nombre de séquences dans la journée, en les allongeant à 75 minutes, explique la principale, Dominique Litmanovski. Avecdes cours de 55 minutes se limitant souvent, de fait, à 45 minutes, certains élèves ne prenaient même pas la peine d’enlever leurs manteaux. » Avecdes cours plus longs, les élèves se posent et parviennent à mieux se concentrer, tandis que le professeur a le temps de varier les activités. Il va par exemple organiser trois périodes de vingt minutes: révision des notions abordées précédemment, étude de notions nouvelles, puis mémorisation et application des ces nouvelles notions, les élèves commençant à faire leurs devoirs en classe. Ensuite, les intercours durent un quart d’heure, pour que les élèves aient une ‘vraie respiration. Avec moins de matières différentes dans la journée, les cartables sont allégés, et les rèvisions du soir également. Ces révisions sont aussi facilitées par l’organisation des devoirs surveillés: ils ont lieu chaque semaine à horaire fixe lors d’une séquence d’une heure et demie, dans une salle dédiée avec tables individuelles, sous la surveillance d’un assistant d’éducation référent. Lecollège est passé de 13 % d’écart avec la moyenne départementale pour le taux de réussite au brevet en 2006-2008 à 1% aujourd’hui. Les retards, absences et incivilités reculent. « Cette expérimentation pourrait être étendue à d’autres établissements, indique Yannick Tenne, inspecteur d’académie. Mais cela suppose une réflexion et une implication de tous les personnels pour la réorganisation des cours et de la vie scolaire. »

Coéducation en milieu populaire

C’est une démarche lancée en 2006-2008 dans les quartiers populaires de Marseille pour changer les rapports entre parents d’élèves et enseignants, à l’initiative du centre social Saint-Gabriel et des réseaux d’éducation prioritaire LeCanet et Saint -Mauron-Bellede- mai. « Cetravail de questionnement en groupes sur les manières de favoriser l’apprentissage des enfants a permis de faire évoluer les situations ", analyse Pierre Roche, sociologue clinicien au Cereq (Centre d’études et de recherches sur les qualifications) et animateur de cette expérience, qu’il relate dans Et si on poussait les murs … (Raison et passions, 2010). Trois groupes d’acteurs ont été formés: d’un côté, les enseignants, psychologues scolaires et directeurs d’école; d’un autre, les parents, pour beaucoup contactés par le centre social; et enfin les travailleurs sociaux et éducateurs populaires. Chaque groupe s’est réuni pour construire sa parole collective, puis des réunions intergroupes ont permis de partager et de confronter les points de vue, avec un travail d’écriture de chacun pour avancer un peu plus dans la co-construction des savoirs. « Nous avons pointé ce qui faisait obstacle à la coéducation, explique Pierre Roche, notamment en dépassant les représentations des uns sur les autres: les professeurs ne sont pas indifférents, les parents ne sont pas démissionnaires. Et des projets formels se sont mis en place entre parents et enseignants ».

Des ateliers de réflexion

Améliorer la confiance en soi, apprendre à écouter les autres et à attendre son tour pour parler… « Je mets en place les ateliers de réflexion sur la condition humaine comme une activité de prévention, explique Jeannine Merdy, institutrice de maternelle à l’école Saragnac de Montech (82). Depuis des années, on constate que des enfants issus de familles sans difficultés ont des difficultés pour apprendre. C’est sans doute dû au fonctionnement de l’école et à l’évolution de la société, la place de l’enfant dans la famille a changé, et il a plus de difficultés à vivre dans le collectif ou à accepter les contraintes. » Dans cet atelier, mis en place avec le soutien d’un membre du Rased et de l’Association des groupes de soutien au soutien (Agsas), des sujets universels sont abordés, une fois par semaine: l’école, la peur, la colère …L’adulte reste à l’écart et prend des notes tandis que les enfants, qui ne sont plus alors des élèves mais des personnes du monde, ont pendant dix minutes le droit de se taire ou de parler pour dire ce qu’ils veulent, à condition qu’ils aient le bàton de parole. Ensuite, l’adulte et les enfants parlent du ressenti. Ont-ils aimé ou pas? L’adulte fait enfin une synthèse en généralisant les propos des enfants. « Ils apprennent à dépasser leurs propres mots pour entendre leur pensée énoncée différemment, explique Jeannine Merdy. L’objectif est de mettre en route la pensée, d’envisager des pensées différentes et d’apprendre que sa propre pensée peut étre modifiée au contact de l’autre. » Résultats : le vocabulaire devient plus riche et plus précis, une mise à distance vis-à-vis de certaines émotions se met en place, et une ambiance plus confiante s’installe en classe.

S’adapter aux profils des élèves

Depuis la création du collège-lycée expérimental d’Hérouville-Saint -Clair (Calvados), en 1982, les cours ont essentiellement lieu le matin. Les quelque 360
élèves ont également des cours interdisciplinaires de trois heures le vendredi après-midi, avec deux professeurs. Les cours étant réduits, cela dégage du temps aux professeurs pour l’encadrement de la vie de classe, . les ateliers, la concertation entre enseignants, etc. Les professeurs reçoivent une formation pour être tuteurs d’une quinzaine d’élèves et assurer ainsi un suivi individualisé des résultats scolaires et, dans la mesure du possible, des problèmes personnels. Ce suivi peut être le cadre de contrats particuliers, donnant par exemple deux ans à un élève pour faire sa 1ére. « Cela permet de s’adapter au profil des jeunes que
l’on reçoit, explique Valérie Guindé, adjointe au chargé de direction et professeur d’Allemand. Leraccrochage scolaire se fait aussi par des activités périscolaires comme des ateliers théâtre, arts plastiques, etc. » ‘ , Une rotation des postes de responsabilité est organisée au sein de l’équipe. « Les résultats s’améliorent, indique Valérie Guindé, mais notre rôle n’est pas uniquement de préparer aux examens. Nous cherchons aussi l’épanouissement personnel des élèves. Malheureusement, le rectorat envisage la suppression de deux postes sur 38, ce qui risque de mettre en péril notre projet. »

la revue des Parents / nO 375 / avril 20Il/29

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