PRomotion des Initiatives Sociales en Milieux Educatifs

 

Sociologue, professeure des universités, Cécile Carra enseigne à l’IUFM, école interne de l’Université d’Artois. Elle dirige également l’équipe de Recifes, Recherches en Education Compétences Interactions Formation Ethique Savoirs. elle est l’auteur de "Violences à l’école élémentaire", Ed.PUF, 2009

 

 

• La composante institutionnelle de la violence à l’école est-elle si importante?

– Le climat d’école contribue à atténuer ou exacerber l’expérience de violence des écoliers. Nos recherches montrent que plus le projet pédagogique d’une école sera construit, mieux cette école saura se préserver de la violence scolaire. Surtout en zone sensible. J’entends par projet pédagogique un projet construit en commun entre la direction de l’établissement et les enseignants, et orienté vers la progression de l’apprentissage des élèves. S’ils se sentent encadrés et accompagnés, alors ils adhèreront davantage aux règles. Si, au contraire, l’école instaure une logique défensive, on aura l’effet inverse avec augmentation de la violence. Trois composantes essentielles expliquent les variations du niveau de violence d’une école à l’autre: le climat de travail, le climat éducatif et le climat de justice. Dans les écoles qui apparaissent les plus violentes, le sentiment d’arbitraire et d’injustice y est aussi le plus développé, les sanctions y sont plus fréquentes. Les élèves se voient renvoyer l’image de mauvais élèves sans perspective de  progression et sans soutien de la part de l’enseignant. Dans les écoles qui parviennent à mieux se préserver, le climat de travail, le climat éducatif et le climat de justice apparaissent particulièrement bons. Nous avons pu montrer comment certaines situations pédagogiques favorisent les conflits et la violence ou au contraire les atténuent, combien le climat d’école et de classe est déterminant pour les apprentissages et la pratique enseignante. Les processus de construction-déconstruction du sentiment de violence, que ce soit chez les enseignants ou chez les élèves, renvoient ainsi au coeur même du métier d’enseignant et d’élève : la construction des apprentissages.

– Quels sont les situations pédagogiques les moins productrices de violence?

– Les situations résultant d’une politique éducative réfléchie et volontaire menée par l’équipe enseignante autour d’un projet pédagogique fort à l’instar de l’école que j’ai étudiée dans mes travaux et se réclamant de la pédagogie Freinet. D’une manière générale, les pratiques professionnelles à partir desquelles s’instaure un bon climat d’école reposent sur une dimension plus collective du travail tant au niveau de l’instauration d’un ordre scolaire via le règlement qu’à celui des apprentissages. Ces enseignants ont une certaine conception de leur métier et du rapport aux élèves: ils conjuguent socialisation et instruction, persuadés qu’ils peuvent faire progresser les élèves tout en s’attachant à le faire. Ils ne détournent pas le problème en renvoyant à des personnalités violentes ou des milieux familiaux déficients. Un travail d’équipe sur le règlement et le projet d’école contribuent à la fois à des pratiques plus cohérentes et donc moins productrices de sentiment d’injustice et recentrées autour des apprentissages des élèves.

 

 

 

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