PRomotion des Initiatives Sociales en Milieux Educatifs

Source :

Accéder au site source de notre article.


Conclusion
1. ECLAIR : une strate supplémentaire dans le « millefeuille » des dispositifs qui ne suffit pas à donner un nouveau souffle à l’éducation prioritaire

L’objectif premier de la mission était de mesurer les effets de l’élargissement du programme CLAIR au programme ECLAIR. Les enquêtes de terrain, menées par les inspections générales dans toutes les académies et dans une cinquantaine de réseaux, donnent une image contrastée de la réalité des territoires de l’éducation prioritaire en France et de leur fonctionnement.

Le premier constat que l’on puisse faire, est que l’élargissement de CLAIR à ECLAIR, passage de la logique d’établissement à la logique de réseau qui prévalait dans les RAR, a été salué unanimement ; cela correspondait à une vraie logique de terrain.

Le second constat est qu’à l’issue des deux années de mise en oeuvre, les programmes CLAIR et ECLAIR n’ont pas transformé le paysage de l’éducation prioritaire. Malgré quelques avancées qu’il convient de noter dans le domaine de la gestion des ressources humaines notamment, ils constituent une réponse insuffisante aux problématiques de l’éducation
prioritaire.

· Il existe des points d’appui sur lesquels fonder une politique d’éducation prioritaire

Les inspecteurs généraux ont rencontré, dans les académies et les réseaux, de nombreuses équipes motivées qui conduisent des projets dans lesquels elles sont très investies. Ces équipes ont vu, dans le programme ECLAIR, le signe d’un regain d’intérêt de l’institution pour l’éducation prioritaire et ont exprimé leur satisfaction face à ce qu’elles considèrent
comme une légitimation des actions d’innovation et d’expérimentation initiées dans les écoles et les établissements. Cela traduit à la fois l’existence d’un potentiel humain capable d’insuffler de nouvelles dynamiques et de fortes attentes d’un soutien institutionnel renforcé, d’une politique d’éducation prioritaire réaffirmée et clarifiée.

Par ailleurs, la mission a relevé des acquis globalement positifs dans la mise en place de deux dispositifs importants du programme ECLAIR, même s’il convient de les préciser et de les renforcer : les préfets des études et les postes à profil.
· ECLAIR constitue une réponse inadaptée aux grands défis de l’éducationprioritaire

Les inspecteurs généraux ont mis en évidence les limites et les insuffisances des programmes successifs CLAIR et ECLAIR.
Celles-ci tiennent en particulier à la précipitation qui a prévalu dans la mise en place du programme CLAIR et à la décision précoce d’étendre l’expérimentation à tous les RAR dans le cadre d’ECLAIR, avant toute évaluation. Il en résulte une indécision dans les objectifs, le programme CLAIR devant répondre, à l’origine, à des questions de sécurité et une réflexion insuffisante sur la carte des territoires qui a été très largement calquée sur celle des RAR, sans que l’on ait pris de temps d’un examen critique qui pourtant s’imposait.

Globalement, malgré des réussites ponctuelles qu’il convient de saluer, les effets du programme ECLAIR sont très modestes dans les écoles et les établissements. La plus-value éducative et pédagogique est limitée. Dans beaucoup de cas, les spécificités de ce programme n’ont pas été perçues par les équipes qui ont continué à inscrire leur action dans la logique des
RAR.

L’innovation et l’expérimentation, qui sont au coeur des objectifs d’ECLAIR, ont suscité nombre d’interrogations, d’incompréhensions même, et les équipes ne s’en sont pas vraiment emparées. C’est dans le domaine pédagogique que les effets ont été les plus faibles, la majorité des actions continuant à se situer davantage en périphérie des apprentissages que dans le quotidien de la classe et dans le coeur des enseignements.
·

Une démarche qui se révèle inadaptée pour impulser une dynamique de changement dans le système éducatif
Ces constats conduisent la mission à s’interroger sur la méthodologie employée pour conduire la réforme. S’il était nécessaire d’opérer une relance de la dynamique de l’éducation prioritaire, la démarche retenue a montré ses limites. Il aurait certainement été profitable de prendre le temps de la réflexion, pour bâtir un projet plus global, en s’appuyant sur les
évaluations des RAR qui avaient été conduites précédemment.

La nouveauté même de la notion de « programme » est ambiguë et n’a pas vraiment été explicitée.
Si le principe de la confiance envers le terrain est tout à fait recevable, son application a souffert d’un pilotage hésitant, tant au niveau national qu’aux échelons académique et local, ainsi que d’un accompagnement pédagogique souvent limité.

La circulaire du 7 juillet 2010 (seul texte réglementaire dans le domaine pédagogique) et l’accompagnement par des vade-mecum et des séminaires nationaux ou académiques n’ont pas été suffisants pour encadrer le mouvement de relance et pour permettre aux acteurs de terrain d’utiliser pleinement les possibilités qui leur étaient offertes.

Au total, si le programme ECLAIR a eu le mérite de réactiver la question de l’éducation prioritaire, la plus-value par rapport à la politique des RAR reste faible et l’impact sur les projets éducatifs, les pratiques pédagogiques et les résultats des élèves peu perceptible.

Alors que l’éducation prioritaire devrait constituer un terrain privilégié pour développer lacontinuité des apprentissages école/collège, la réaffirmation de la politique de réseau a peu agi en ce sens et n’a que peu contribué à poser les bases véritables d’une école du socle dont les expérimentations auraient mérité d’être valorisées.

2. Perspective : une remise à plat de l’éducation prioritaire, axe majeur de la politique éducative nationale, s’avère indispensable
Cette politique de l’éducation prioritaire pourrait prendre appui sur les axes suivants :
1 – redéfinir les objectifs de l’éducation prioritaire en l’adossant à un projet global de réussite pour l’École ;
2 – repenser la géographie des territoires de l’éducation prioritaire pour en adapter les contours aux besoins éducatifs actuels qui ne correspondent plus toujours aux réalités passées et qui ignorent trop les territoires ruraux en grande difficulté ;
3 – simplifier l’enchevêtrement des dispositifs dans lequel la plupart des réseaux se trouvent pris ;
4 – renforcer le fonctionnement en réseau en réalisant et en faisant vivre l’école du socle dans l’éducation prioritaire ;
5 – définir une temporalité de réforme qui ménage le temps nécessaire à l’expérimentation et à l’évaluation et assure aux équipes la stabilité dans les orientations, stabilité indispensable à une action pédagogique durable et efficace."

Print Friendly

Répondre