PRomotion des Initiatives Sociales en Milieux Educatifs

Le Conseil National du Numérique vient de sortir un rapport “Jules Ferry 3.0 – Bâtir une école créative et juste dans un monde numérique”. L’Unsa-Éducation a participé au travail de réflexion pendant deux demi-journées d’échanges avec le groupe éducation du CNNum et par la rédaction d’une contribution écrite.

Notre déception est grande à la lecture du rapport qui est loin de rendre compte de la richesse des échanges, des priorités qui y ont été exprimées et qui, au milieu de belles et généreuses intentions, fait des propositions inopérantes et manquant d’ambition.

  • Déception de voir que la première préconisation est l’apprentissage de l’informatique avec création d’une nouvelle discipline, recrutement de professeurs dédiés… alors que le numérique doit être l’affaire de toutes les disciplines au moment où le décloisonnement disciplinaire est à l’ordre du jour.
  • La création d’un nouveau bac généraliste “Humanités numériques” (aucune proposition pour les bacs professionnels !) alors que le numérique devrait être présent dans tous les bacs et en plus sans aucune proposition de changer la logique des filières et de transformer un examen inadapté à notre société numérique.
  • Voir évoqué seulement en dernière place “Écouter les professeurs pour construire ensemble l’école de la société numérique”. Pourtant les professeurs, et les professionnels de l’éducation en général, sont en première ligne, peu écoutés et pris en compte. A coup sûr, très peu vont se sentir partie prenante de ce qui est proposé dans ce rapport.

Tout cela est vraiment dommage car la priorité est sans aucun doute de développer chez les élèves -et chez les professionnels de l’éducation- une solide “culture numérique”. On note dans le rapport seulement 5 occurrences de “culture numérique” (sur 119 pages), auxquelles on peut ajouter 80 occurrences de “littératie”… le mot “informatique” quant à lui figure 232 fois dans le texte.

Évidemment les médias se sont focalisés sur le bac “Humanités numériques” dont on a bien du mal à visualiser l’organisation et la faisabilité en lisant le rapport. On ne comprend pas bien comment ce « bac de l’individu créatif de la civilisation numérique » pourrait contenir à la fois des maths, de la physique-chimie, des science et vie de la terre, du français, de la philosophie, de l’histoire-géographie, de l’économie, des langues vivantes et de l’informatique, tout en étant “une chance pour les non-matheux” (p 51) mais quand même capable d’“irriguer les formations supérieures en informatique (ouverture des profils d’ingénieur) » (p 50). Cela est totalement irréaliste à moins de revoir complètement, sous une forme modulaire permettant des parcours diversifiés les contenus enseignés au lycée. Mais de cela il n’est pas question dans le rapport. . De plus ce sont tous les bacs (pas que les bacs généraux) à travers toutes les disciplines qui doivent intégrer le numérique. Enfin alors que certains pays comme le Danemark ont mis en place des épreuves pendant lesquelles les élèves sont connectés, il n’y a ici pas de proposition en ce sens…

Heureusement ce rapport contient également de nombreuses propositions intéressantes:

  • l’idée d’installer à l’école une littératie numérique, c’est-à-dire l’ensemble des compétences qui donnent de l’aisance dans les situations sociales contemporaines d’apprentissage, d’interaction, d’action, celles-ci étant toutes reconfigurées par le numérique (p 17)
  • la notion d’école en réseau ouverte sur l’extérieur où les élèves seraient habitués à ce que l’école sollicite leur expérience issue d’observations de la vie courante (p 57)
  • relier la recherche et l’éducation pour s’interroger ensemble sur les savoirs reconfigurés par et avec le numérique (p 72)
  • la réflexion autour de manuels numériques qui pourraient s’ouvrir aux contenus produits par l’enseignant lui-même ou coproduits par les élèves, dans une démarche d’apprentissage éditorial (p 84)

On aurait aimé aussi des propositions plus concrètes sur ces points…

Pour conclure, rappelons que Catherine Becchetti-Bizot qui est à la tête de la Direction du Numérique pour l’Éducation au ministère porte une vision plus équilibrée faisant de la transmission d’une culture numérique où l’informatique a toute sa place, mais pas toute LA place, une priorité.

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