PRomotion des Initiatives Sociales en Milieux Educatifs

in knowtex blog :

Accéder au site source de notre article.


Francisco Mello Castro, jeune brésilien de 21 ans, explore les nouveaux modèles éducatifs. Nous l’avons rencontré début août, à Paris, dans le cadre d’un « Tour d’Europe » réalisé en partenariat avec MakeSense.

Peux-tu revenir sur ton parcours en quelques mots ?

Je suis brésilien et j’ai 21 ans. Depuis 4 ans, j’étudie le management public et je m’implique dans des activités extra-scolaires qui sont toutes liées à l’innovation. Depuis le début de ma scolarité, je m’interroge sur les limites du système éducatif actuel. Comment peut-on, à l’échelle globale, améliorer l’expérience d’apprentissage et imaginer de nouveaux modèles, simples et efficaces, qui peuvent s’adapter à tous ?

Pour travailler sur cette question, j’ai fondé en décembre 2012 l’organisation Empower dont les activités s’organisent autour de deux programmes. Le premier, gratuit, se destine aux lycéens et permet de les initier pendant une semaine à l’entrepreneuriat et à la direction de projet. Le second – « Up To You » – propose aux collégiens des challenges entrepreneuriaux et vise à développer des formats pédagogiques qui s’appuient sur l’expérimentation, l’apprentissage par projet et la créativité (en bonne inspiration du Design Thinking). D’autres formats sont à l’étude… mon tour d’Europe a fait émerger plein de nouvelles idées !

Quel est ton regard sur le système éducatif actuel ?

Le modèle éducatif actuel a les caractéristiques de la société issue la révolution industrielle : un système pyramidal où les étudiants font face à un professeur ; une sonnerie pour marquer le début et l’arrêt du travail (semblable à celle d’une usine) ; des systèmes d’évaluation basés sur des « acquis » de connaissances et non l’innovation, etc. C’est dans cette pensée de l’éducation, calquée sur l’ancien modèle industriel et la métaphore de la chaîne de production, que nous nous inscrivons encore aujourd’hui.

Comment s’est faite la rencontre avec MakeSense ?

MakeSense fait partie des communautés que j’ai découvertes il y a quelques mois et dont je suis les activités avec beaucoup d’intérêt. Ils m’ont gentiment invité à venir à Paris pour échanger. Sur cette base, j’ai décidé d’élargir mon champ d’exploration en rentrant en contact avec les membres de la communauté situés ailleurs en Europe J’ai repéré des écoles que je souhaitais visiter : la Team Academy en Espagne, le Shumacker College en Grande-Bretagne, Living School et SenseSchool à Paris, Knowmads aux Pays-Bas…

 

Quels étaient tes objectifs avec ce Tour d’Europe ?

Je suis venu en Europe pour élargir mon champ de vision sur l’éducation, trouver des idées qui permettent de repenser les cadres d’apprentissage, découvrir les méthodologies mises en œuvre dans les écoles qui innovent et revenir au Brésil avec des solides retours d’expérience. En définitive, je me positionne comme un connecteur entre le Brésil et l’Europe : je mets en relation les idées, les projets et les gens que je rencontre au fil de mon parcours. L’année prochaine, en parallèle à mes études, je souhaite poursuivre cette démarche et prototyper des expériences auxquelles je me consacrerai pleinement dès que je serai diplômé.

Peux-tu nous résumer tes grandes observations ?

À l’heure actuelle, j’identifie trois problèmes au sein des systèmes d’enseignement traditionnel. Je ne pense pas que ces problèmes soient directement issus de la manière de penser des équipes pédagogiques. Ce sont des problèmes culturels qui se sont construits au fur-et-à mesure des années et qui concernent davantage l’institution que les enseignants eux-même. Tous s’accordent dans l’identification de ces problèmes et dans la volonté de les résoudre. Cependant, il manque des méthodologies pour accompagner ces changements.

Le premier axe de travail concerne l’expérimentation. La plupart des cadres scolaires ne permettent pas aux étudiants d’expérimenter et de tester de nouvelles méthodes ; cela constitue un frein à l’apprentissage et plus largement à l’innovation. De nombreuses alternatives existent au sein des structures que j’ai visitées. Le meilleur exemple est celui de la Team academy en Espagne ; dans cette école, les cours sont aménagés sur 3 mois, les 9 mois restants étant dédiés à la création d’un projet entrepreunarial personnel.

La seconde axe de travail concerne les environnements d’apprentissage. L’environnement d’évaluation actuel ne laisse pas de place à l’échec ; les étudiants n’expérimentent pas assez car ils craignent de se tromper et d’être blâmés pour leurs erreurs. À l’inverse, dans la culture startup – notamment aux États-Unis – l’erreur fait partie du processus et constitue une étape nécessaire pour parvenir au succès.

La troisième axe de travail est à mettre en relation avec l’idée selon laquelle l’éducation doit incarner la vie. À ce titre, Shumacker college est à mes yeux le meilleur exemple de structure où coexistent éducation et vie quotidienne. Les étudiants vivent dans une école qui n’emploie pas de personnel. Les tâches quotidiennes incombent à tous et sont réparties entre étudiants. Ce fonctionnement permet de développer des qualités humaines qui vont au-delà de l’acquisition d’un savoir immédiat. Vivre avec les autres, c’est apprendre à prendre soin de soi-même, c’est apprendre à être responsable de son écosystème.

Existe-t-il des liens entre les gens que tu as rencontrés ?

La plupart des acteurs que j’ai rencontrés ne se connaissent pas… Il me semble donc nécessaire de tisser des relations plus fortes entre ces réseaux. Je sens que les gens peuvent gagner à se connaitre les uns les autres. Par exemple, lors de ma visite au CRI à Paris, j’ai rencontré François Taddei que j’ai mis en relation avec des écoles et des entrepreneurs au Brésil,  notamment Rodrigo Baggio, entrepreneur social à la tête d’une des initiatives les plus remarquables en matière de lutte contre l’exclusion numérique.

Quels sont les ouvrages qui te semblent importants pour comprendre les enjeux actuels de l’éducation ?

Je ne sais pas s’il existe encore beaucoup d’ouvrages sur les nouveaux modèles éducatifs… J’imagine qu’ils sont en train de s’écrire. Je peux déjà citer un livre va sortir en octobre prochain et qu’il sera possible de télécharger gratuitement. Ce livre s’intitule Around the world in twelve schools, écrit par quatre de mes amis brésiliens qui ont réalisé un tour des structures éducatives au travers le monde.

Sinon, je recommande Stop silling dreams de Seth Godin qui tient davantage du manifeste et les trois interventions TED de Ken Robinson. Au travers ses interventions, il excelle à mettre en exergue les enjeux contemporains liés à l’éducation. Enfin, je suggère Design Thinking for Educators, qui dispense des « bonnes pratiques » pour repenser les méthodologies éducatives.

 

Print Friendly

Répondre