PRomotion des Initiatives Sociales en Milieux Educatifs

C’est avec le rapport de synthèse de la concertation de l’été 2012 que le ministère Peillon posait la bienveillance comme une condition nécessaire à la refondation de l’école. Cette bienveillance, disait ce rapport, nécessitait de repenser les rythmes, le climat scolaire, la prévention de la violence, les notes, les sanctions et ce dans la perspective de la réussite de tous. Dès lors, le concept de bienveillance apparut quasi systématiquement, notamment dans les projets académiques, comme une valeur clé de l’amélioration du système éducatif.
Je n’ai pas l’intention ici de contester que la qualité de la relation avec les élèves soit un objet de travail nécessaire et une condition de leur réussite. Je ne nierai pas non plus que la réflexion et la formation soient indispensables pour améliorer certaines pratiques professionnelles insuffisamment préoccupées de ces questions.
Je voudrais juste interroger l’émergence subite et omniprésente de ce concept de bienveillance qui prétend avoir la vertu de pouvoir fortement contribuer à construire une réussite scolaire plus démocratique
 
Un concept « mou »
Le premier problème, c’est que bien qu’en en faisant un usage récurrent, l’institution s’est peu souciée de définir ce qu’était la bienveillance. Sous l’apparence d’un élément de culture professionnelle commune, nous recourons à un concept « mou » que chacun ajuste en fonction de ses représentations ou de ses considérations personnelles. Il y a peu de chances, au vu de cette mollesse de contours, qu’on ait là un concept véritablement opératoire. Il suffit d’assister à une réunion d’équipe enseignante pour se rendre compte combien un accord apparent ne résiste plus dès qu’il s’agit d’en traduire les principes dans les pratiques pédagogiques communes. Il suffit de lire quelques prises de position pour se convaincre du leurre qu’apporte par exemple ce concept pour réfléchir la question de la notation ou de la sanction.
Nous risquons donc en permanence le quiproquo, nous croyant rassemblés par la même idée quand nous ne partageons qu’un vocable.
 
Pourquoi un tel succès ?
Comment un concept aussi indéfini, aussi fragile, aussi illusoire dans ses capacités à fédérer un travail collectif a pu offrir une telle force de séduction qu’il soit en deux ans devenu présent dans toutes les productions institutionnelles : pas un projet académique qui ne prône la bienveillance et ne la considère comme une condition absolue des progrès nécessaires à une meilleure réussite de tous.
Je ne crois pas qu’un tel succès naisse du hasard.
Sans doute procède-t-il d’un effet de mode : on évoque aujourd’hui, dans le monde de l’entreprise, la gouvernance bienveillante; les marchands de coaching personnel vendent la gestion relationnelle bienveillante, … Mais il ne suffit pas qu’un concept soit à la mode pour que notre institution se l’approprie. On peut donc faire l’hypothèse que cette appropriation est guidée par des finalités même si elles restent implicites.
 
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