PRomotion des Initiatives Sociales en Milieux Educatifs

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"Problématique de l’illusion d’incompétence scolaire
De manière générale, nous savons que les enfants avant et en début de scolarisation ont tendance à surestimer leurs compétences (Bordeleau & Bouffard, 1999; Paris & Bymes, 1989). Diverses raisons sont avancées pour expliquer cette surestimation; par exemple, les enfants de cet âge confondraient leurs désirs et la réalité (Ruble, Grosovsky, Frey, & Cohen, 1992) de même que les notions d’effort et d’habileté (Nicholls, 1979, 1984). Il est également possible qu’ ils’ agisse d’un effet des rétroactions positives et arbitraires données par les adultes qui souhaitent ainsi encourager et soutenir les enfants dans leurs apprentissages; ces rétroactions répétitives conduiraient l’enfant à se croire plus compétent qu’il J’est vraiment (Flammer, 1995; Stipek & MacIver, 1989). Toutefois, ce biais positif s’amenuise ensuite à partir du milieu du primaire (Alexander & Entwisle, 1988; Bouffard, Marcoux et al., 2003; Eccles, Wigfield, Harold, & Blumenfeld; 1993; Jacobs et al., 2002; Marsh, 1989; Nicholls, 1979; Wigfield et al., 1997). Les nombreuses rétroactions en contexte scolaire favorisant la comparaison sociale amèneraient les élèves à ajuster leurs perceptions de compétence qui deviennent alors pus conformes à leurs capacités réelles . Ainsi, autour de la année du primaire, les élèves commenceraient à avoir une vision plus réaliste de leurs compétences (Assar & Connell, 1992; Bouffard & Vezeau, 1998; Bouffard, Markovits, Vezeau, Boisvert, & Dumas, 1998). Toutefois, pour Harter (1992), il n’existe pas de direction unique et généralisée dans le changement des perceptions de compétence. Pour certains, elles demeureraient intactes alors qu’elles augmenteraient ou s’affaibliraient pour d’autres.
Si l’impact de la surévaluation de ses compétences scolaires est toujours l’objet d’une controverse, il apparaît assez clair que juger trop sévèrement ses compétences nuit à j’actualisation du potentiel. Le terme d’illusion d’incompétence a été utilisé par Phillips (1984, 1987), à la suite de Langer (1979), pour décrire les élèves, qui, dans des classes d’élèves doués, avaient des perceptions de compétence scolaire nettement plus faibles que leurs camarades. Les élèves affectés par une iIfusion d’incompétence présente un biais négatif marqué dans J’évaluation de leur compétence scolaire. Selon les études de Phillips (1984, 1987), entre 20 et 30 % des élèves doués sous-estimeraient leurs compétences. D’autres études ont montré que ce phénomène est aussi présent chez les élèves de milieux scolaires réguliers et qu’il affecte dans des proportions semblables les filles et les garçons (Boissicat, 2007; Bouffard, Boisvert, & Vezeau, 2003; Bouffard, Vezeau, Chouinard, & Marcotte, 2006; Dubois, 2010; Harter, 1985; Larouche, Galand, & Bouffard, 2008; Vaillancourt & Bouffard, 20\0).
Même si les études traitant de l’illusion d’incompétence sont peu nombreuses, leurs résultats convergent. Les élèves qui en sont affectés évitent les défis et se disent moins curieux, moins enclins à faire des efforts et moins intéressés par les matières scolaires que leurs camarades (Harter, 1985). Ils sont plus anxieux face aux évaluations (Phillips & Zimmerman, 1990), attribuent davantage leurs succès à la chance, à J’effort ou à l’aide d’autrui plutôt qu’à leurs habiletés (Bouffard, Boisvert, & Vezeau, 2003; Bouffard et aL, 2006) et rapportent moins de plaisir, de satisfaction et de participation en classe (Miserandino, 1996). Ils ont des attentes de rendement plus faibles, persévèrent moins, sont moins autonomes et leur rendement scolaire est inférieur à leurs capacités réelles (Assor & Connell, J992; Borkowski & Thorpe, 1994; Bouffard, Boisvert, & Vezeau, 2003; Kershner, 1990; Phillips, 1984, 1987). Ces élèves rapportent aussi une estime de soi plus faible et un perfectionnisme négatif plus élevé (Bouffard et aL, 2006) et se sentent, à tort, moins bien acceptés par leurs camarades (Larouche et aL, 2008). À plus long terme, ils seraient plus à risque d’isolement social, de décrochage scolaire prématuré et de difficultés d’orientation et de carrière (Assor & Connell, 1992). Si les travaux sur l’illusion d’incompétence ne permettent pas toujours de distinguer clairement les facteurs qui lui sont associés des conséquences qui en résultent, ils indiquent que ce phénomène s’accompagne de plusieurs caractéristiques propres à nuire au fonctionnement et à la performance scolaire des élèves. Maintenant, comment comprendre que certains enfants en arrivent à sous-estimer de cette manière leur compétence?"

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