PRomotion des Initiatives Sociales en Milieux Educatifs

In Cahiers pédagogiques :

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Quel doit être le rôle respectif selon toi des politiques, des experts, des enseignants, des citoyens dans leur ensemble par rapport aux choix concernant l’école ?

 

"Je crois que l’école appartient à la nation. Donc aux élus pour ce qui concerne ses orientations fondatrices. Et aux citoyens pour ce qui concerne la mise en œuvre de projets spécifiques. Ces projets doivent être adaptés aux situations locales, mais obéir à un cahier des charges national clair et ambitieux sur les objectifs à atteindre et les priorités à poursuivre. Aujourd’hui, les établissements n’ont pas de véritable cahier des charges, ils ont des moyens (de moins en moins !), des circulaires et des contrôles (de plus en plus !) : cela ne permet pas de bâtir un projet à la fois mobilisateur, à partir des ressources locales, et clairement fléché vers des ambitions nationales… Les enseignants sont, bien évidemment, eux, les acteurs privilégiés dans ce projet, tant dans l’élaboration que dans la mise en œuvre. Ils ont une professionnalité centrée sur la transmission des savoirs aux élèves et, à ce titre, rien ne peut se faire sans eux, sans leur expérience, sans leur expertise de praticiens, sans leur engagement. Mais, pour autant, je crois qu’ils doivent travailler, dans l’établissement, avec l’administration, mais aussi avec tous les autres personnels, y compris les personnels de service dont le rôle éducatif est loin d’être négligeable ! Ils doivent aussi travailler avec les parents et, sur ce point, je crois que nous devons absolument revoir les choses : les parents sont, aujourd’hui, sur un strapontin ; on ne leur donne guère que le pouvoir de protester et de changer leur enfant d’école s’ils ne sont pas contents… avant de leur reprocher d’user de ces seuls pouvoirs ! Il y a des règles du jeu à reconstruire dans ce domaine pour une vraie co-éducation en actes, dans le respect – nécessaire pour les jeunes – des fonctions réciproques. Je suis partisan, très vite, d’ouvrir une concertation approfondie avec les associations de parents d’élèves sur ce point… Enfin, je crois que les experts sont infiniment précieux pour éclairer les citoyens. Mais à condition, bien sûr, qu’un travail de médiation soit fait pour rendre leurs travaux accessibles à tous. On en est très loin ! Sur les questions éducatives, contrairement aux questions de santé ou aux problèmes économiques, il n’existe pas beaucoup de « discours intermédiaire » entre les travaux scientifiques et la polémique racoleuse (en dehors des Cahiers pédagogiques !). C’est assez terrible de voir qu’en France les questions d’éducation, dont chacun dit qu’elles sont prioritaires, sont si peu, si mal « vulgarisées », au bon sens du terme… Enfin, parmi les acteurs qui participent aux choix concernant l’école, il y a les élèves eux-mêmes et on les oublie trop ! Il ne s’agit pas, ici, de leur « donner le pouvoir » – ce qui serait extrêmement démagogique – mais de dire que l’éducation est ainsi faite que rien ne peut se faire sans l’engagement de ceux et celles que l’on éduque. C’est quand on tente de faire sans eux que les élèves exercent le pouvoir dans l’école : par leur passivité ou leur agressivité, en contraignant les enseignants à les séduire ou à les réprimer… Une École qui n’implique pas les élèves dans le fonctionnement de l’école – en fonction de ce qu’ils peuvent comprendre et intégrer selon leur âge – n’est pas vraiment une École. C’est une machine qui s’épuise dans un dressage impossible… contraignant les enseignants à osciller entre la dépression et la répression, affirmant implicitement aux élèves que, décidément, « la vraie vie est ailleurs ».

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