PRomotion des Initiatives Sociales en Milieux Educatifs

[|5e partie de la présentation de son ouvrage "L’école à deux ans en France"|]

 

Au XIXe siècle et au début du XXe, le processus de préscolarisation participait des rapports entre le national et le local. Il résultait d’une [*volonté politique, éducative ou sociale émanant du local*] (les communes, les départements), [*de l’État*] (les ministères de l’Instruction publique et de l’Intérieur), [*et de ses services déconcentrés*] (les préfets, les recteurs, les inspecteurs d’académie, les directeurs de salles d’asile publiques ou d’écoles maternelles), et/ou de l’initiative d’institutions privées (les Comités de Dames charitables), afin de venir en aide aux enfants originaires des classes indigentes ou populaires.

 

La politique éducative envers les enfants de deux ans était territorialisée ; impulsée par l’État, elle impliquait l’intervention du local dans leur éducation et était conçue en référence à un territoire socioéconomique. Aujourd’hui, en disposant que « [*l’accueil des enfants de deux ans est étendu en priorité dans les écoles situées dans un environnement social défavorisé, que ce soit dans les zones urbaines, rurales ou de montagne*] », la loi d’orientation sur l’éducation de 1989 (art. 2) confère un statut et une légitimité à la différence de traitement dans l’espace public, et officialise le droit à la scolarisation à deux ans au nom du principe de discrimination positive. Cet accueil est assuré « particulièrement en zone d’éducation prioritaire » (décret n° 90-788 du 6 septembre 1990, art. 2) et « dans les régions d’outre-mer » (décret n° 2005-1014 du 24 août 2005, art. 1er).

 

Ces dispositions législatives et réglementaires montrent l’implication politique de l’échelon national dans la scolarisation à deux ans, dans une perspective de réduction des inégalités sociales face à l’école. Cette scolarisation implique les communes dans l’éducation, qui ont la charge des écoles publiques (création et implantation des écoles maternelles d’enseignement public après avis du représentant de l’État dans le département). Les communes sont propriétaires des locaux et en assurent la construction, la reconstruction, l’extension, les grosses réparations, l’équipement et le fonctionnement. Elles ont la responsabilité des inscriptions scolaires, des dérogations, du financement des infrastructures et du mobilier, et de la gestion de personnels tels que les ATSEM. Outre les instances décentralisées que sont les communes, la scolarisation à deux ans mobilise les entités déconcentrées : IA-DSDEN, IEN, directeurs d’école maternelle.

 

Le local est investi de certains pouvoirs et compétences, conférés aux maires (la décision politique de scolariser les enfants de deux ans et leurs inscriptions scolaires), à l’inspecteur d’académie (la définition de la carte scolaire) et aux directeurs d’école (la décision d’admission de l’enfant à l’école maternelle). Le local est producteur de logiques d’action publique éducative. Cette situation témoigne ainsi de l’attribution par l’État de certains pouvoirs de décision et de certaines compétences au local en matière de scolarisation à deux ans. En somme, la scolarisation des tout-petits est pensée en référence à la territorialisation (Warren, 2004), laquelle est lisible dans l’application à l’Éducation nationale des logiques de décentralisation et de déconcentration, et dans la mise en oeuvre de la politique d’éducation prioritaire.

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